II. QUELLES PERSPECTIVES POUR L'AVENIR ?
A. D'IMPORTANTES RÉFORMES SONT ENGAGÉES DANS LE DOMAINE DE LA RECHERCHE
1. La mise en oeuvre de la loi de programme pour la recherche
Afin de renforcer l'efficacité et l'attractivité du système français, la réforme du paysage de la recherche - au travers du Pacte et de la loi n° 2006-450 de programme pour la recherche du 18 avril 2006 - se caractérise par la volonté d'encourager les coopérations et partenariats, de privilégier l'excellence, de garantir le financement des recherches sur des thématiques prioritaires, avec notamment le développement du financement sur projets, et de dynamiser la recherche privée. Le but est d'atteindre l'objectif communautaire de 3 % du produit intérieur brut consacré aux dépenses de recherche adopté au Conseil européen de Barcelone (2002).
Compte tenu des enjeux et de l'urgence de cette réforme, votre rapporteur se réjouit de la rapidité avec laquelle les principaux décrets d'application de la loi de programme pour la recherche ont été publiés.
a) Vers un meilleur pilotage de la recherche
La loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006 permettra de renforcer les capacités de définition des priorités et d'évaluation stratégique de la recherche dans notre pays.
Rappelons qu'en application de l'article 3 de la loi, le décret n° 2006-698 du 15 juin 2006 a institué le Haut conseil de la science et de la technologie, placé auprès du Président de la République et chargé d'éclairer le Gouvernement sur toutes les questions relatives aux grandes orientations dans ses domaines de compétence.
Parallèlement, le ministère chargé de la recherche a été réorganisé par un décret n° 2006-572 du 17 mai 2006 et un arrêté du même jour. Il s'est ainsi doté d'une direction générale de la recherche et de l'innovation comprenant une nouvelle direction de la stratégie. Cette dernière est chargée de proposer les orientations stratégiques de la recherche et de l'innovation en s'appuyant sur un dispositif spécifique de prospective. Dans ce cadre, elle va assurer le secrétariat général du Haut conseil.
Les priorités stratégiques se traduiront notamment dans la programmation de l'Agence nationale de la recherche (ANR).
b) La réforme de l'évaluation
Avec la création de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AÉRES), la loi de programme a mis en place un système d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur unifié, cohérent, transparent et conforme aux standards internationaux.
Autorité administrative indépendante, l'Agence sera chargée d'évaluer les activités de recherche des établissements publics et des unités de recherche. Elle sera également compétente pour l'évaluation des formations et diplômes de l'enseignement supérieur, et pour valider les procédures d'évaluation des personnels.
Au terme d'une large concertation au sein de la communauté scientifique, et après consultation des instances compétentes, le décret portant organisation et fonctionnement de l'Agence a été publié le 3 novembre 2006.
Cette réforme de l'évaluation est essentielle et vos rapporteurs souhaitent qu'elle s'applique dans un esprit d'efficacité, en vue d'une allocation optimale des moyens, humains et financiers, consacrés à l'enseignement supérieur et à la recherche.
c) Le renforcement des coopérations et partenariats
L'un des objectifs de la loi de programme est d'encourager et faciliter toutes les formes de coopération et de partenariats entre les acteurs, publics et privés, de l'enseignement et de la recherche, en renforçant le cadre institutionnel dans lequel elles pourront désormais s'exercer.
Outre les centres thématiques de recherche et de soins (CTRS), deux nouvelles structures ont été créées à cet effet. Elles peuvent être mises en oeuvre sur la base d'une démarche volontaire des établissements et organismes concernés. Il s'agit des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) et des réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA).
D'après les informations fournies à votre rapporteur, une enveloppe de 300 millions d'euros, dont la gestion sera confiée à l'ANR, sera consacrée à ces structures : à hauteur de 200 millions pour les RTRA (constitués sous forme de fondations de coopération scientifique) et de 100 millions pour les PRES et CTRS (tous statuts confondus).
(1) Les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES)
Les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) s'inscrivent dans une logique géographique de sites. L'objectif est de permettre à plusieurs établissements ou organismes d'enseignement supérieur et de recherche de regrouper tout ou partie de leurs activités et de leurs moyens, notamment en matière de recherche. Ces PRES pourront, en outre, associer des entreprises et des collectivités territoriales.
Ils pourront revêtir des configurations variées, mais ils devront comporter au moins un établissement public à caractère scientifique. Ils pourront être dotés de la personnalité morale soit sous la forme d'un groupement d'intérêt public, soit en adoptant l'un des deux nouveaux statuts juridiques créés par la loi : l'établissement public de coopération scientifique (EPCS) ou la fondation de coopération scientifique (FCS). L'EPCS constitue une nouvelle catégorie d'établissement public. La fondation de coopération scientifique bénéficie, quant à elle, de certaines dérogations au statut régissant les fondations reconnues d'utilité publique.
Les modalités de mise en oeuvre des PRES ont été précisées par le ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche en mai 2006.
L'État intervient dans la création administrative et juridique du PRES, ainsi que dans la contractualisation. Le cadre contractuel est défini au terme d'un dialogue avec le ministère, qui peut apporter un soutien financier pour compléter la mutualisation des ressources des établissements pour les activités considérées.
Au 30 août 2006, huit dossiers de PRES étaient officiellement transmis au ministère : Universud, Paris Universitas, PRES « Biodiversité » du Muséum, Paristech, PRES « Université de Bordeaux », « Nantes Atlantique Université », Caen Basse-Normandie et « Université européenne de Bretagne ». Par ailleurs, d'autres dossiers sont très avancés : notamment Marne-la-Vallée et École des Ponts, Lorraine, Aix-Marseille, Nord-Pas-de-Calais, Alsace, Nice, Lyon...
(2) Les réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA)
Les réseaux thématiques de recherche avancée (RTRA) ont pour but de mettre en oeuvre des projets thématiques d'envergure mondiale dans un ou plusieurs domaines de recherche d'avenir.
Dans le cadre de l'appel à propositions lancé le 23 mai 2006, une trentaine de dossiers concernant tous les domaines de la recherche ont été déposés, impliquant chacun en moyenne 500 chercheurs de haut niveau.
Sur la base des avis rendus par un comité d'évaluation indépendant présidé par M. Jean Dercourt, Secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences , 13 projets viennent d'être sélectionnés , au regard de l'excellence, de la plus-value et de l'originalité des projets scientifiques présentés. Il est également tenu compte des modalités proposées pour favoriser une interactivité forte des unités, fondée sur de multiples coopérations et un renforcement des approches multidisciplinaires. Les RTRA se caractérisent par la formation « à et par » la recherche, la capacité d'entraînement des projets sur les équipes de recherche et la qualité des liens avec le secteur économique, notamment dans le cadre des pôles de compétitivité.
Les RTRA, nécessairement constitués sous la forme de fondation de coopération scientifique (FCS), sont créés par décret simple et passent avec l'Etat une convention d'objectifs qui conditionnera le versement de l'apport financier de l'Etat.
D'après les informations fournies à votre rapporteur, chaque statut de FCS devant être approuvé par les conseils d'administration des établissements fondateurs 1 ( * ) , seuls deux ou trois décrets portant approbation de ces statuts pourront vraisemblablement être pris avant la fin de l'année. Les premiers versements de la dotation de l'Etat interviendront donc début 2007.
Enfin, certains projets non retenus pourront donner lieu à une aide financière spécifique du ministère, sous réserve à la fois d'un soutien des organismes fondateurs et d'une évaluation scientifique positive du Comité d'évaluation, 20 millions d'euros étant réservés à cette fin.
(3) Les fondations de recherche
S'agissant des fondations de recherche, votre rapporteur se félicite qu'une dynamique se soit instaurée depuis 2004. Elle s'est traduite par la création de vingt nouvelles fondations d'utilité publique dans le domaine de la recherche, dont la dotation a été constituée conjointement par les acteurs privés et par l'État.
Au total, 110 millions d'euros consacrés à cette opération auront été financés sur le compte d'affectation spéciale, 40 millions d'euros ayant été par ailleurs consacrés sur ce fonds à la voiture propre, et ils auront permis de mobiliser 125 millions d'euros privés.
Une dizaine de créations devraient encore intervenir. La création, à l'aide de ce fonds, de 20 fondations nouvelles constitue un bilan positif , lorsque l'on sait qu'avant 2004, le nombre de fondations d'utilité publique dans le domaine de la recherche s'élevait à une trentaine seulement.
L'action de l'État a joué un rôle d' « amorçage » pour inciter les entreprises à se tourner vers ce mode de financement. L'action de l'État a permis également d'afficher un certain nombre de priorités scientifiques, d'où le nom de « Fonds des priorités de recherche » donné à ce fonds. Parmi ces priorités, le Gouvernement a notamment souhaité décliner dans le cadre des fondations de recherche, les trois chantiers prioritaires que le Président de la République a fixés au début du quinquennat : handicap, sécurité routière et cancer. Plus généralement, ont été affichées les priorités de santé (11 fondations), de sécurité (4 fondations), de développement durable (3 fondations), de sciences humaines et sociales (1 fondation), de culture scientifique (1 fondation).
Toutefois, votre rapporteur s'inquiète de ce que, compte tenu du succès de l'opération, aucun nouveau financement de l'État n'ait été prévu pour 2007, alors que l'enveloppe financière qui était destinée aux fondations de recherche est épuisée.
Votre rapporteur souhaite qu'une nouvelle enveloppe soit prévue à cet effet pour 2008. S'agissant de l'année 2007, il suggère qu'en fonction des besoins - tels qu'évalués dans les conditions habituelles - une fraction de l'enveloppe prévue pour les fondations de coopération scientifique puisse être allouée aux fondations de recherche abritées.
* 1 La direction du CNRS a néanmoins choisi de présenter trois projets à son prochain conseil d'administration, le 30 novembre 2006, et de demander une délégation pour son directeur général pour les autres dossiers, dans le cadre d'une enveloppe financière globale à préciser.