B. UNE ACTIVITÉ TOUJOURS CROISSANTE

1. En matière de justice des mineurs

En 2004, 192.624 mineurs (contre 184.425 en 2003) ont fait l'objet d'une saisine des juridictions de mineurs, 59 % comme mineurs en danger et 41 % comme délinquants (soit une baisse de deux points). Rappelons qu'il y a en France environ 20 millions de jeunes de moins de 22 ans.

Après une légère baisse en 2003, le nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie a repris sa hausse (+ 2,7 %), cependant moins forte que celle de l'ensemble des personnes mises en cause. La part des mineurs dans l'ensemble de ces mises en cause est donc passée de 18,8 % à 18,1 %.

Nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie

1994

2001

2003

2004

Évolution 2003-2004

Nombre de mineurs en cause

109.338

177.010

179.762

184.696

+ 2,7 %

Part des mineurs dans le total des personnes mises en cause

14,1 %

21,2 %

18,8 %

18,1 %

- 4 %

Source : Ministère de l'Intérieur - Service central d'étude de la délinquance

Environ 81.000 mineurs délinquants ont été adressés aux juges des enfants en 2004 (+ 2,5 %). 47 % avaient 15 ou 16 ans, et seulement 4,5 % moins de 13 ans.

Sur les 143.000 affaires poursuivables mettant en cause un mineur, 17,9 % ont donné lieu à un classement pour inopportunité des poursuites, contre 25,2 % pour l'ensemble des affaires pénales. Les parquets ont apporté une réponse dans 82,1 % des cas contre 80,3 % en 2003 et 74,8 % pour l'ensemble des affaires pénales.

Activité des parquets concernant des mineurs

(en %)

Evolution
2004/03 en %

Affaires traitées

168.693

+ 3, 4

Classements d'affaires non poursuivables

25.935

100,0

+ 3,8

infractions mal caractérisées, motifs juridiques

21.459

82,7

+ 5,3

mineurs hors de cause

4.476

17,3

- 2,8

Orientations des affaires poursuivables

142.758

100,0

+ 3,3

a) classements sans suite

25.533

17,9

- 4,5

b) procédures alternatives aux poursuites

59.092

41,4

+ 10,4

c) poursuites

58.133

40,7

+ 0,5

devant le juge d'instruction

2.292

- 6,9

devant le juge des enfants

55.025

+ 0,5

Procédures de jugement à délai rapproché

816

+ 28,5

Taux de réponse pénale (b + c)

82,1 %

(80,3 % en 2003)

Source : Cadres du parquet, SDSED (données provisoires)

Les alternatives aux poursuites (rappel à la loi, réparation, excuses, dédommagements, stages civiques) ont progressé de 10,4 % de 2003 à 2004 et constituent 41,4% des affaires poursuivables, contre 26,7 % pour l'ensemble des affaires pénales. Le rappel à la loi constitue avec près de 41.000 utilisations 69,3 % de ces troisièmes voies.

Les admonestations, remises à parents et dispenses de peine, constituent la réponse judiciaire prépondérante (33.770 décisions) et ont interrompu leur tendance à la baisse en 2004.

Les peines sont le plus souvent à visée éducative : réparation, sanctions éducatives, travail d'intérêt général (TIG), sursis avec mise à l'épreuve (SME).

Les TIG (3.200), les emprisonnements avec sursis TIG et les amendes ont augmenté de plus de 7 %, et les placements, mesures de protection judiciaire et de réparation de 11,5 %. La mesure de réparation connaît un essor croissant et régulier (près de 18.000 réparations prononcées, soit une augmentation de 40 % entre 2001 et 2004).

Les emprisonnements avec sursis avec mise à l'épreuve ont augmenté de 5 % tandis que les emprisonnements fermes diminuaient de près de 6 % (après une baisse de 16,9 % en 2003), les emprisonnements accompagnés de sursis simple de 1,3 % .

Les sanctions éducatives (réparations, interdictions...), susceptibles d'être prononcées dès 10 ans depuis 2003, sont restées rares (758), même si elles progressent fortement (+ 129 %).

Seules 816 affaires ont été poursuivies devant le tribunal pour enfants selon la nouvelle procédure de jugement à délai rapproché, cette procédure restant réservée aux mineurs multiréitérants.

Mineurs délinquants : activité des juges des enfants
et des tribunaux pour enfants

2004

Evolution
2004/03
(en %)

Mineurs délinquants dont le juge des enfants a été saisi

80.982

+ 2,5

Âgés de moins de 12 ans

3.648

+ 5,0

Âgés de 13 et 14 ans

16.139

+ 3,5

Âgés de 15 et 16 ans

38.102

+ 1,1

Âgés de 17 ans

23.093

+ 3,9

Mesures présentencielles prononcées

27.139

+ 9,6

Enquêtes sociales, IOE, expertises

7.618

+ 12,4

Placements, liberté surveillée, réparations

15.358

+ 12,2

Contrôles judiciaires

3.225

- 1,8

Détentions provisoires

938

- 6,8

Mineurs jugés

75.168

+ 3,8

Mineurs jugés en audience de cabinet

41.075

+ 3,1

Mineurs jugés en audience de TE

34.093

+ 4,7

dont mineurs jugés pour crime

507

+ 13,4

Mesures et sanctions définitives prises

86.131

+ 4,4

Mesures rejetant la poursuite

9.615

+ 15,1

Admonestations, remises à parents, dispenses de mesure
ou de peine

33.770

+ 1,5

Liberté surveillée, protection judiciaire, placement, réparation

9.623

+ 11,5

Sanctions éducatives

758

+ 129,0

TIG, sursis TIG

3.828

+ 7,3

Amendes fermes ou avec sursis

6.703

+ 7,7

Emprisonnements avec sursis simple

9.836

- 1,3

Emprisonnements avec sursis et mise à l'épreuve

5.368

+ 4,9

Emprisonnements fermes

6.630

- 5,9

Source : Tableaux de bord des tribunaux pour enfants

La part des mineurs jugés deux fois ou plus au cours des douze derniers mois, qui permet d'apprécier la proportion de mineurs réitérants, est restée stable en 2004 à 18,4 %.

L'implication de mineurs dans les violences urbaines de novembre 2005

Le garde des sceaux a indiqué lors de son audition par la commission des Lois le 22 novembre dernier que depuis le 27 octobre, date du début des violences urbaines, 577 mineurs avaient été présentés devant le juge des enfants, 118 avaient fait l'objet d'un mandat de dépôt et 15 avaient été placés en CEF. La protection judiciaire de la jeunesse avance pour sa part le nombre de 944 mineurs et jeunes majeurs protégés présentés au juge, parmi lesquels seuls 310 étaient suivis par les services de la protection judiciaire de la jeunesse. Il semblerait donc que seule une minorité des jeunes présentés aux juges des enfants ait été connue des services de la protection judiciaire de la jeunesse (même si une majorité pouvait être connue des services de police).

En matière civile , les juges des enfants ont été saisis en 2004 de plus de 113.610 mineurs en danger , soit une hausse de 7,8 % rompant avec la baisse des cinq dernières années. Les limites de la déjudiciarisation de la protection des mineurs en danger semblent donc atteintes. La situation de danger pour un mineur demandant un accompagnement du juge des enfants qui dure souvent plusieurs années, le nombre total des mineurs en danger suivis (206.397 fin 2004, soit +3,3 %) est nettement supérieur au nombre de nouveaux mineurs suivis dans l'année.

Environ 320.300 mesures éducatives ont été prononcées.

2003

2004

Évolution

Mineurs en danger dont le juge des enfants est saisi

105.425

113.610

+ 7,8 %

Mesures d'investigation
- mesures nouvelles
- mesures nouvelles et renouvelées
Décisions d'AEMO prononcées
- mesures nouvelles
- mesures nouvelles et renouvelées
Décisions de placement prononcées
- mesures nouvelles
- mesures nouvelles et renouvelées


49.591
58.012

59.188
126.730

39.459
116.225


53.150
62.510

65.146
135.173

41.690
122.604


+ 7,2 %
+ 7,8 %

+ 10,1 %
+ 6,7 %

+ 5,7 %
+ 5,5 %

30,4 % des nouveaux mineurs suivis en assistance éducative avaient moins de sept ans et 61 % ont moins de treize ans.

2. En matière d'activité de la protection judiciaire de la jeunesse

La direction de la protection judiciaire de la jeunesse met en oeuvre, par une action éducative adaptée, les décisions de justice prises par les magistrats de la jeunesse à l'égard des mineurs en danger et délinquants.

Au 1 er septembre 2005, le secteur public comprend 339 structures administratives, soit 186 centres d'action éducative (CAE), 23 centres d'action éducative et d'insertion (CAEI), 2 centres éducatifs fermés (CEF), 6 centres éducatifs renforcés (CER), 76 foyers d'action éducative (FAE), 43 centres de placement immédiat (CPI) et 10 services éducatifs auprès des tribunaux (SEAT).

Le secteur associatif habilité est constitué de 1.255 établissements gérés par 516 associations, soit 839 structures d'hébergement dont 68 CER, 4 CPI et 13 CEF, 174 services d'action éducative en milieu ouvert (SAEMO), 102 services d'investigation et d'orientation éducative (SIOE), 95 services d'enquête sociale (SES) et 45 services de réparation pénale (SRP).

Au 31 décembre 2004, 173.814 mineurs et jeunes majeurs étaient confiés par les magistrats.

Stock de population
au 31 décembre 2004

Mineurs
délinquants

Mineurs
en danger

Jeunes
majeurs

Total
des jeunes
concernés

Secteur public

25.740 (82 %)

12.682 (9 %)

1.019 (20 %)

38.533 (22 %)

Secteur associatif habilité

5.680 (18 %)

125.408 (91 %)

4.193 (80 %)

135.281 (78 %)

Ensemble

31.420

138.090

5.212

173.814

En 2004, les magistrats ont prononcé des mesures concernant 192.057 mineurs et jeunes majeurs.

Flux

Mineurs
délinquants

Mineurs
en danger

Jeunes
majeurs

Ensemble
des jeunes

Secteur public

46.131 (78 %)

32.640 (25 %)

1.743 (31 %)

77.281 (40 %)

Secteur associatif habilité

13.123 (22%)

97.752 (75 %)

3.901 (69 %)

114.776 (60 %)

Ensemble

59.254

130.392

5.644

192.057

78 % de l'ensemble des mineurs et des jeunes majeurs sont pris en charge par le secteur associatif et 22 % par le secteur public (contre 76 % et 24 % en 2003).

Tous secteurs confondus, les mineurs délinquants représentent 18 % (contre 22 % en 2003) du total des mineurs pris en charge . 9 délinquants sur 10 sont des garçons. Un mineur délinquant sur deux a entre 16 et 17 ans. La protection judiciaire de la jeunesse concerne donc principalement des mineurs en danger, essentiellement pris en charge par le secteur associatif habilité , qui y consacre l'essentiel de son activité.

Les plus jeunes sont principalement confiés au secteur associatif habilité, les grands adolescents au secteur public. 49 % des jeunes ont moins de 13 ans et sont prioritairement suivis au titre des mineurs en danger.

La prépondérance de l'activité pénale des services du secteur public se confirme. Son public est de plus en plus délinquant, de plus en plus masculin et de plus en plus âgé. Les jeunes délinquants représentent 76  % de ses prises en charge , contre un tiers de l'activité du secteur public il y a 10 ans. La part des mineurs en danger est passée de 70 % à 24 % en 10 ans. Le nombre de jeunes suivis dans les établissements du secteur public s'est accru de 5,4 % pour atteindre 42.000 à la fin de 2004. Le mode de prise en charge est majoritairement le milieu ouvert (40.557 mineurs suivis au 31 décembre 2004 soit 5,3 % de plus que l'année précédente).

Le secteur associatif exécute pour sa part 91 % des mesures en cours et demeure l'acteur majeur de l'action éducative fondée sur l'article 375 du code civil. Le nombre de mineurs délinquants qui lui sont confiés est modeste (4.992 au 31 décembre 2004) s'il progresse rapidement (+21 %). Le nombre de mineurs pris en charge dans ses établissements s'établissait au 31 décembre 2004 à 120.865 mineurs soit + 3,6 %. La prise en charge s'effectue majoritairement en milieu ouvert (76,7 %) et les moins de 13 ans représentent 44,5 % des prises en charge.

Jeunes pris en charge dans les établissements
de la protection judiciaire de la jeunesse

Secteur
public

Secteur
associatif habilité

2003

2004

2003

2004

Mesures en cours au 31 décembre
(hors mesures d'investigations)

39.896

42.062

116.618

121.229

au titre de l'enfance délinquante

30.009

31.941

4.126

5.197

au titre de l'enfance en danger

8.886

9.034

108.459

111.857

au titre de la protection des jeunes majeurs

1.001

1.087

4.033

4.175

Placement

1.384

1.505

23.574

24.405

Milieu ouvert

38.512

40.557

93.044

96.824

Civil

9.083

9.304

89.698

92.762

Pénal*

29.429

31.253

3.346

4.062

Mesures nouvelles de l'année
(hors mesures d'investigations)

51.241

54.038

71.432

78.135

au titre de l'enfance délinquante

35.870

38.216

10.018

11.714

au titre de l'enfance en danger

13.571

13.697

57.293

62.409

au titre de la protection des jeunes majeurs

1.800

2.125

4.121

4.012

Placement

4.921

5.235

16.722

18.555

Milieu ouvert

46.320

48.803

54.710

59.580

Civil

12.497

13.089

46.639

50.513

Pénal

33.823

35.714

8.071

9.067

Age et sexe des jeunes concernés par les mesures nouvelles de l'année**
(hors mesures d'investigation)

37.691

39.074

71.432

77.648

moins de 10 ans

1.106

1.188

23.640

24.313

de 10 à 12 ans

1.237

1.183

9.759

10.255

de 13 à 15 ans

8.472

8.769

18.704

19.073

de 16 à 17 ans

17.094

17.388

16.577

19.293

18 ans et plus

9.782

10.546

2.752

4.714

Garçons

31.304

32.305

41.578

45.271

Filles

6.387

6.769

29.854

32.377

* Le secteur associatif assure uniquement des réparations, le secteur public exécutant toutes les catégories de mesures éducatives de milieu ouvert pénal.

** En 2004, l'amélioration des outils de calcul et la fiabilisation des données saisies ont permis de « dédoublonner » le nombre de jeunes suivis dans le secteur public au titre de deux mesures éducatives.

Dans le secteur associatif, restent comptabilisées des « mesures-jeunes ».

Source : DPJJ.

L'activité de la protection judiciaire de la jeunesse a fortement augmenté en 2004 (+ 5,4 % en stock dans le secteur public et 9,5 % en flux et +3,9 % en stock et + 9,4 % en flux dans le secteur associatif habilité).

Les mesures en direction des mineurs délinquants (hors investigations) ont connu une forte progression, dans le secteur public (+6,4 en stock et 6,5 % en flux), mais surtout dans le secteur associatif habilité ( +25,9 % en stock et + 16,9 % en flux)

S'agissant de l'enfance en danger, on constate une stabilisation dans le secteur public, tandis que le secteur associatif habilité connaît une hausse de 3,1 % en stock et de 8,9 % en flux).

Par ailleurs, la protection jeunes majeurs (18-21 ans) a progressé dans le secteur public (+18,6 %). En 2004, 5.644 mesures ont été prononcées. Depuis 1998, la part des 18-21 ans a augmenté de 81 %.

Les mesures de placement ont augmenté de 6,4 % dans le secteur public et de 10 ,9 % dans le secteur associatif habilité et le milieu ouvert de 5,4 % dans le secteur public et de 8,9 %. Par ailleurs, les établissements de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse ont réalisé 57.297 investigations en 2004 soit 6,8 % de plus qu'en 2003.

En 15 ans, l'activité totale de la protection judiciaire de la jeunesse s'est accrue de 235 % pour les mesures pénales et de 22 % pour les mesures civiles. La part des mesures pénales est passée de 9 % en 1990 à 21 % en 2004.

Améliorer la réactivité des services de la protection judiciaire de la jeunesse et exécuter dans les meilleurs délais les mesures judiciaires est essentiel. En effet, une réponse rapide doit permettre de mettre fin à un trouble à l'ordre public ou à une situation de danger ou de rappeler le lien entre la mesure et les faits reprochés. La réponse apportée par la justice est donc primordiale pour prévenir la récidive et la réitération.

Le délai moyen de prise en charge est passé de 25,5 jours en 2003 à 27,1 jours en 2004 . Cette hausse s'explique par une plus grande rigueur dans la production des statistiques, grâce à la fiabilisation du logiciel, mais aussi par la croissance de 7 % des mesures nouvelles.

Alors que la LOPJ -et désormais un indicateur- fixent comme objectif de réduire le délai de prise en charge des mesures pénales nouvelles 3 ( * ) dans le secteur public 4 ( * ) de 51,9 jours (en 2002) à 15 jours en 2007 , ce délai était encore de 52,6 jours en 2004 , contre 48,5 jours en 2003. Ces résultats s'expliquent par l'augmentation concomitante des mesures de 26 % de 2001 à 2004.

Ce délai moyen recouvre cependant des situations très différentes. Le placement pénal intervient en pratique sous 3 jours, tandis que la réparation nécessite 31 jours et les TIG 90, 5. Les délais concernant le milieu ouvert demeurent globalement excessifs (56,1 pour le pénal et 28,7 pour le civil), avec pour conséquence que certains services d'investigation proposent directement un placement, sachant qu'une mesure en milieu ouvert ne sera pas exécutée assez rapidement. Ceci touche principalement les enquêtes sociales, les investigations et orientations éducatives, les réparations, les libertés surveillées, les travaux d'intérêt général et les sursis avec mise à l'épreuve.

Délai moyen de prise en charge dans le secteur public en jours

2003

2004

pénal

civil

pénal

civil

Investigation

5,4

15,4

6,7

17,2

Placement

1,8

3,9

2,8

3,2

Milieu ouvert

54,2

25,2

56,1

28,7

Ensemble

30

17,7

31,4

20

* 3 Calculés par différence entre la date de décision du magistrat et la date de prise en charge effective par le service protection judiciaire de la jeunesse.

* 4 Le délai moyen de prise en charge ne peut être pour l'heure mesuré que pour le secteur public, seul à être équipé du logiciel GAME. Le déploiement du logiciel IMAGES en 2005 en directions régionales permettra de disposer de données identiques en secteur associatif.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page