B. LA NÉCESSITÉ DE COMPLÉTER CETTE APPROCHE

1. Le niveau des engagements de retraite

Votre commission a déjà insisté, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, sur la nécessité de connaître le niveau des engagements de retraite à long terme des régimes. Il est même singulier que l'on puisse envisager d'assurer un pilotage efficace de l'assurance vieillesse en l'absence de ces informations. La volonté manque parfois pour se livrer à ce genre d'exercice et seuls quelques régimes publient ces estimations pourtant indispensables.

C'est heureusement le cas de la RATP qui les chiffre à 21 milliards d'euros. Votre commission, grâce à ses propres pouvoirs d'investigation et de contrôle, est parvenue à obtenir le montant des engagements de retraite de la SNCF (103 milliards d'euros), du régime des marins (38 milliards d'euros) et de celui des mines (25 milliards d'euros). Ces données mériteraient d'être exploitées et analysées dans les documents budgétaires de la présente mission.

Plus encore, et par analogie avec l'adossement des industries électriques et gazières, il conviendrait d'indiquer la décomposition des engagements de retraite entre les droits de base, c'est-à-dire la part équivalant à celle du régime général, et les avantages spécifiques de ces régimes spéciaux, et d'exploiter les hypothèses de projection et le mode de calcul de ces estimations.

Ce travail devrait conduire in fine à déterminer le surcoût financier annuel des spécificités de ces régimes de retraite, par rapport aux régimes de droit commun.

2. L'âge de cessation d'activité

Les régimes de retraite spéciaux ont été conçus à la fin du XIX e siècle et au début du XX e siècle à une époque où la pénibilité des métiers exercés par les personnels entraînait à une surmortalité avérée, justifiant des départs précoces. Les conditions de travail ont changé depuis lors. Il conviendrait donc de mieux connaître les assurés sociaux des régimes spéciaux, afin de pouvoir comparer leur situation actuelle à celle des autres régimes.

Ainsi, votre commission préconise d'intégrer de nouveaux indicateurs portant sur l'âge moyen de liquidation des pensions, ainsi que sur la proportion des départs en retraite :

- des personnes en service actif ;

- avant l'âge de cinquante-cinq ans ;

- à l'âge de cinquante-cinq ans ;

- avant l'âge de soixante ans.

Ils pourraient être utilement complétés par des données relatives à la durée moyenne de perception des pensions et à l'espérance de vie respective, à soixante ans, des assurés sociaux de tous les régimes de retraite analysés par la commission des comptes de la sécurité sociale.

Age comparé des départs en retraite

(en 2003)

RATP

SNCF

EDF/GDF

Marins

Régime général

Avant 55 ans

65,3 %

14,0 %

13 %

9,6 %

-

A 55 ans

14,0 %

75,9 %

50 %

2,2 %

-

Entre 56 et 59 ans

16,4 %

9,7 %

21 %

31,1 %

-

Total avant 60 ans

95,7 %

99,6 %

84 %

42,3 %

0,4 %

A 60 ans et plus

4,3 %

0,4 %

16 %

57,1 %

99,6 %
(dont 64,8 %
à 60 ans)

100 %

100 %

100 %

100 %

100 %

Les régimes de droit commun se trouvent dans une situation moins favorable.

Age moyen à la liquidation des droits directs
des générations de retraités les plus récentes

(en années)

Sources : DREES/Etudes et résultats n° 237 - mai 2003 (pour les données sur le secteur privé et la génération 1934) -Annexe PLF pour 2005 (données sur les départs en retraite de la fonction publique en 2003)

3. Appréhender l'effort contributif des régimes sociaux

Dans son premier rapport publié en 2001, le Conseil d'orientation des retraites n'a abordé qu'avec réticence la question de la comparaison de l'effort contributif des différents régimes de retraite. Il souligne ainsi que les taux « de cotisation des régimes de retraite » ne sont pas directement comparables : ils ne s'appliquent pas aux mêmes assiettes de rémunération (dans la fonction publique, par exemple, les primes ne sont pas soumises à cotisations et n'ouvrent pas de droits à pension) et ne couvrent pas les mêmes périmètres (certains régimes couvrent, outre le risque vieillesse, le risque invalidité et cessation d'activité). »

Pourtant, l'ampleur des écarts observés est telle que les réserves formulées par le COR méritent d'être dépassées.

Le taux de la part salariale de cotisation est sensiblement supérieur dans le secteur privé : un ressortissant non-cadre du régime général acquitte ainsi 10,35 % (calcul du conseil d'orientation des retraites) pour le total des retraites de base et complémentaire, contre 7,85 % dans les régimes spéciaux, comme d'ailleurs dans les trois fonctions publiques.

Taux de la part salariale de cotisation des régimes de retraite des salariés (en 2004)

NB : Pour le régime général, taux calculés par le conseil d'orientation des retraites.

La comparaison des taux de cotisation employeur fait ressortir des situations diverses. Pour la SNCF et le régime des marins, l'effort contributif de l'employeur est supérieur à ce que l'on observe dans les régimes de droit commun ; mais c'est l'inverse à la RATP et dans le régime des mines.

Taux de cotisation employeur des régimes de retraite des salariés (en 2004)

NB : Pour le régime général, taux calculés par le conseil d'orientation des retraites.

Seule l'existence de « cotisations fictives » correspondant à l'écart entre les recettes et les dépenses à combler pour financer le régime, ainsi que l'ampleur des ressources externes, rendent possible le niveau des prestations des régimes spéciaux.

En définitive, la structure de l'effort contributif diverge fortement entre les secteurs public et privé. Dans le régime général, les cotisations des salariés et celles des employeurs assurent respectivement environ 40 % et 60 % du total. Dans la fonction publique et pour les régimes spéciaux, le rapport est très différent : entre 10 % et 20 % du produit global des cotisations sont acquittés par les salariés et de 80 % à 90 %, voire même parfois davantage, proviennent de l'ensemble formé par les cotisations fictives et les cotisations employeurs.

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