CHAPITRE IV
DISPOSITIONS RELATIVES À L'EMPLOI

ARTICLE 12

Elargissement du régime d'exonération des groupements d'employeurs du paiement de la taxe d'apprentissage

Commentaire : le présent article vise à étendre le régime d'exonération de la taxe d'apprentissage dont bénéficient les groupements d'employeurs agricoles, aux autres groupements d'employeurs, dans la mesure où leurs membres sont eux-mêmes exonérés de la taxe d'apprentissage, ou n'y sont pas assujettis.

I. LE DROIT EXISTANT

Il convient de rappeler que la taxe d'apprentissage est assise sur la masse des salaires, au taux de 0,5 %.

En application du 3 de l'article 224 du code général des impôts, sont en particulier 86 ( * ) affranchis de la taxe, « les groupements d'employeurs composés d'agriculteurs ou de sociétés civiles agricoles bénéficiant de l'exonération, constitués selon les modalités prévues au chapitre VII du titre II du livre I er du code du travail ».

Les articles L. 127-1 à L. 127-9, qui composent le chapitre VII du titre II du livre I er du code du travail, traitent des groupements d'employeurs . Le premier alinéa de l'article L. 127-1 du code du travail en expose l'objet : « Des groupements de personnes physiques ou morales entrant dans le champ d'application d'une même convention collective peuvent être constitués dans le but exclusif de mettre à la disposition de leurs membres des salariés liés à ces groupements par un contrat de travail ».

Ainsi, les groupements d'employeurs composés d'agriculteurs ou de sociétés civiles agricoles bénéficiant eux-mêmes de l'exonération du paiement de la taxe d'apprentissage, en sont aussi exonérés. Cette disposition a pour objet d'éviter que des exploitants ou des sociétés civiles agricoles non assujettis ne le deviennent indirectement au titre des salaires versés par le groupement.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Les groupements d'employeurs composés exclusivement d'exploitants agricoles bénéficient de dispositions avantageuses : non seulement l'exonération de la taxe d'apprentissage, mais encore une exonération de la taxe professionnelle, ainsi qu'un abattement de cotisations pour l'embauche de travailleurs occasionnels.

Aussi, le dispositif actuel, qui incline à la fermeture des groupements d'employeurs agricoles aux employeurs non agricoles, est de nature à priver ces groupements de certaines synergies.

Pour y remédier, le présent article , complétant le 3. de l'article 224 du code général des impôts, vise à exonérer, dans certaines limites, les groupements d'employeurs, agriculteurs ou non, du paiement de la taxe d'apprentissage .

Cette exonération serait à la fois :

- conditionnelle , car la mise à disposition devrait s'effectuer auprès des adhérents non assujettis ou exonérés d'un groupement d'employeurs ;

- et proportionnelle aux rémunérations versées dans le cadre de ce type de mise à disposition.

Il est prévu que ces dispositions s'appliqueront à la taxe d'apprentissage exigible à raison des rémunérations versées à compter du 1 er janvier 2004.

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent dispositif a été adopté à l'Assemblée nationale sans modification.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Ainsi conçue, l'évolution du régime d'exonération proposée ne devrait pas entraîner de diminution significative du produit de la taxe d'apprentissage, et ce d'autant plus que 98 % de la taxe d'apprentissage 87 ( * ) est acquittée via le paiement de dépenses libératoires, la part payée au Trésor public demeurant contenue à 28 millions d'euros en 2003 et 2004.

En facilitant la création de nouveaux groupements et l'ouverture des groupements existants, elle paraît propre à favoriser la création de partenariats participant à la dynamisation de l'économie rurale.

En cohérence avec cette mesure, il est prévu qu'une disposition réglementaire modifie le décret n° 95-703 du 9 mai 1995 relatif à certaines cotisations dues pour l'emploi de salariés occasionnels, afin que les groupements d'employeurs non exclusivement agricoles soient, de même, partiellement exonérés de charges sociales.

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article.

ARTICLE 12 bis (nouveau)

Constitution d'une réserve défiscalisée en prévision de la mise en oeuvre de la responsabilité solidaire des groupements d'employeurs

Commentaire : afin de permettre aux groupements d'employeurs de constituer une provision couvrant le risque d'engagement de leur responsabilité solidaire, le présent article leur permet d'alimenter une réserve au moyen de versements venant en diminution du bénéfice imposable.

I. LE DROIT EXISTANT

Aux termes de l'article L. 127-1 du code du travail, « des groupements de personnes physiques ou morales entrant dans le champ d'application d'une même convention collective peuvent être constitués dans le but exclusif de mettre à la disposition de leurs membres des salariés liés à ces groupements par un contrat de travail. (...)

« [ Les membres d'un groupement d'employeurs ] sont solidairement responsables de ses dettes à l'égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires ».

En application de l'article 39 du code général des impôts, ces dettes sont insusceptibles de faire l'objet de provisions donnant lieu à déduction des bénéfices industriels et commerciaux.

En effet, cet article dispose que « l e bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...), [qui comprennent notamment] les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables (...) ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le dispositif proposé résulte d'un amendement gouvernemental, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Il introduit à l'article 214 du code général des impôts un cas supplémentaire d'admissibilité en déduction du bénéfice imposable au titre de l'impôt sur les sociétés, qui concerne les groupements d'employeurs constituant une réserve destinée à couvrir le risque d'engagement de leur responsabilité solidaire.

Les caractéristiques et les contraintes de la déduction acquise au titre de la constitution de la réserve instituée seraient les suivantes :

- plafonnement de la déduction du bénéfice imposable à hauteur de 10.000 euros au titre d'un même exercice ;

- constitution effective d'une réserve , se traduisant par l'obligation d'inscrire à un compte d'affectation spéciale ouvert auprès d'un établissement de crédit une somme provenant des recettes de l'exercice au moins égale au montant de la déduction ;

- dans le cadre de la mise en oeuvre de la responsabilité solidaire prévue au dernier alinéa de l'article L. 127-1 du code du travail précité, utilisation des sommes déposées au cours des cinq exercices suivant celui de leur versement ; si ces sommes ne sont pas utilisées dans le cadre de la responsabilité solidaire, ou si elles n'ont pas été utilisées au cours des cinq exercices suivant leur versement, elles sont alors réintégrées dans le bénéfice imposable.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif envisagé, qui présente l'avantage d'inciter les groupements d'entreprise à mieux maîtriser les risques concernés, est étroitement inspiré de celui de la déduction pour aléas instaurée au profit des agriculteurs par l'article 82 de la loi de finances initiale pour 2002 88 ( * ) , qui figure à l'article 72 D bis du code général des impôts.

Il est à craindre que le succès de la mesure proposée ne surpasse guère celui du dispositif précité, qui, d'après les informations transmises à votre rapporteur pour avis, concernerait un nombre restreint d'agriculteurs. Sans doute, le suivi d'un tel type de dispositif exige-t-il trop d'attention de la part du contribuable.

En contrepartie, la perte fiscale correspondante -qui ne peut être que de trésorerie, car toute déduction donne normalement lieu à réintégration comptable d'un montant équivalent le jour de la réalisation du risque- devrait donc être mesurée.

Il demeure une nouvelle complexification de la matière fiscale, que d'aucuns déploreront.

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article.

* 86 Outre, notamment, les entreprises occupant un ou plusieurs apprentis et dont la masse salariale n'excède pas un plafond égal à six fois le montant annuel du SMIC.

* 87 Le produit annuel de la taxe d'apprentissage est de l'ordre de 1,5 milliard d'euros.

* 88 Loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001.

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