Avis n° 75 (2003-2004) de M. Pierre ANDRÉ , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 20 novembre 2003

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N° 75

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2003-2004

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 2003

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 2004 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XXIII

VILLE

Par M. Pierre ANDRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Gérard Larcher, président ; MM. Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Bernard Dussaut, Hilaire Flandre, François Fortassin, Alain Fouché, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kergueris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, Jean Louis Masson, Serge Mathieu, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1093 , 1110 à 1115 et T.A. 195

Sénat : 72 et 73 (annexe n° 37 ) (2003-2004)

Lois de finances.

CHAPITRE I -

BUDGET DE LA POLITIQUE DE LA VILLE
ET MOYENS DU MINISTÈRE DE LA VILLE

I. LE BUDGET DU MINISTÈRE DE LA VILLE

La logique qui a présidé, pour 2004, à l'élaboration du budget de la politique de la ville, en général, et de celui du ministère de la ville, en particulier, consiste à faire primer l'investissement sur le fonctionnement . C'est pourquoi plusieurs hausses sont enregistrées, lesquelles sont gagées par des réductions de lignes jugées moins prioritaires dans le cadre d'une volonté de sérier les priorités. Le total général des crédits et des divers moyens financiers publics destinés au financement de la politique de la ville croît toutefois de 10 % entre 2003 et 2004, atteignant 5,96 Md€ .

Cet agrégat se répartit en 3 masses détaillées dans le tableau ci-dessous. Les crédits budgétaires -soit 3,14 Md€- enregistrent une baisse de 2 % qui résulte principalement de la diminution des crédits des « autres ministères » pour environ 40 M€ et des crédits spécifiques « ville » pour 27 M€. Cette baisse s'explique par la volonté, déjà évoquée de privilégier les dépenses d'investissement par rapport à celles de fonctionnement .

Du fait de la relance des zones franches urbaines, le montant des exonérations fiscales et sociales attendues pour 2004 s'élève à 655 M€, en hausse de 24 %. Ces exonérations traduisent la seconde orientation de la politique du Gouvernement : miser sur le développement économique et l'encouragement à l'initiative individuelle comme source de progrès social .

Les contributions des fonds européens et des caisses d'allocations familiales demeurent stables respectivement à hauteur de 221 et 155 M€, tandis que l'apport de la Caisse des dépôts et consignations -sous la forme de prêts, pour l'essentiel- enregistre une apparente diminution pour des raisons qui seront examinées ci-dessous.

On observe, pour la première fois depuis l'adoption de la loi d'orientation pour la ville, le versement de la contribution de l'Union d'économie sociale du logement (UESL) qui atteint 550 M€ et celle de la Caisse de garantie pour le logement social (CGSL) de 30 M€, conformément à une innovation qui résulte de la loi d'orientation pour la ville discutée l'été dernier, afin d'assurer le financement du Programme national de rénovation urbaine.

Enfin, les contributions des collectivités territoriales augmentent de 2 %, en ligne avec l'inflation, pour atteindre 1,09 Md€, comme il ressort du tableau ci-dessous :

ÉVOLUTION DE L'ENSEMBLE DES MOYENS FINANCIERS
DESTINÉS À LA POLITIQUE DE LA VILLE 2002-2004

(DO + CP)

M€

2002
(Exécution)

2003

(LFI)

2004

(PJLF)

Ä 2004/2003

A-1. Crédits spécifiques ville

379,90

384,61

356,39

-7 %

A-2. Crédits des autres ministères

2 352,46

2 375,71

2 336,51

-2 %

A-3. Solidarité urbaine

433,22

448,91

448,91

-

TOTAL A

3 165,58

3 209,23

3 141,81

-2 %

B. Exonérations fiscales et sociales

693,90

528,20

655,60

24 %

TOTAL A + B

3 859,48

3 737,43

3 797,41

2 %

C. Fonds européens

221,60

221,60

221,60

-

D. Caisse des dépôts

223,00

190,00

123,00

-35 %

E. Autres financements :

-

-

-

-

Caisse d'allocations familiales

152,00

155,00

155,00

-

UESL (rénovation urbaine)

0,00

0,00

550,00

-

Caisse de garantie pour le logement social

0,00

0,00

30,00

-

TOTAL A + B + C + D + E

4 456,08

4 304,03

4 877,01

13 %

F. Contribution des collectivités territoriales

1 040,51

1 065,68

1 090,68

2 %

TOTAL GÉNÉRAL

5 496,59

5 369,71

5 967,69

10 %

Source : Jaune budgétaire

L'évolution qu'enregistrent les crédits de fonctionnement , qu'il s'agisse de ceux de la Délégation interministérielle à la ville (DIV), du « Partenariat national » (contribution au financement de diverses associations), du fonds interministériel pour la ville (FIV) ou des grands projets de ville (GPV) est la conséquence de la priorité accordée aux crédits d'investissements, règle qui connaît une dérogation en ce qui concerne le financement des postes d'« adultes-relais » qui croissent de 12 %, pour faire face au développement de ce type d'emplois.

En termes d'investissement , on enregistre une hausse des crédits qui concernent la section du fonds interministériel pour la ville y afférente (+ 8 %), ceux destinés aux même type de dépenses dans le cadre des grands projets urbains et des opérations de renouvellement urbain (ORU) (ils atteignent 57 M€, soit + 20 %) qui traduisent une bonne consommation des autorisations de programme ouvertes dans des exercices antérieurs.

Certaines évolutions résultent de mouvements purement comptables et s'expliquent par des modifications de nomenclature ou des transferts de crédits d'anciennes vers de nouvelles lignes, à l'instar de celles qui concernent : les services publics (transférés vers la ligne 37-60-80), ou la hausse apparente enregistrée au titre de l'opération « ville vie vacances » qui trouve sa contrepartie dans la diminution réciproque des transferts opérés à ce titre.

Les crédits spécifiques « ville » , sont, quant à eux détaillés, dans le tableau ci-dessous :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES
CONSACRÉS À LA POLITIQUE DE LA VILLE 2002-2004

(DO + CP)

M€

2002

(Exécution)

2003

(LFI)

2004

(PJLF)

Ä 2004/2003

A-1. Crédits spécifiques ville

A-1-1.  Crédits de la section budgétaire ville & rénovation urbaine

Fonctionnement de la DIV

4,10

6,46

5,77

-11 %

Services publics

2,98

7,41

4,50

-39 %

Frais de soins des appelés ville

0,04

0,00

0,00

-

Animation, formation

1,00

0,00

0,00

-

Dépenses de personnel

0,00

0,13

1,50

1 054 %

Fonds interministériel pour la ville (fonct.)

207,08

145,99

131,45

-10 %

Partenariat national et innovation

4,83

4,34

4,00

-8 %

Soutien aux grands projets de ville

10,81

31,67

20,00

-37 %

Ville-vie-vacances

11,68

7,89

10,01

27 %

Fonds de revitalisation économique (fonct.)

10,28

19,00

0,00

-

Adultes-relais

25,18

50,73

57,00

12 %

Etudes et assistance technique

0,67

0,00

0,00

-

Fonds interministériel pour la ville (invest.)

64,43

49,00

53,00

8 %

Grands projets et renouvellement urbain

22,15

47,69

57,00

20 %

Fonds de revitalisation économique (invest.)

2,48

0,00

0,00

-

Sous-total A-1-1

367,72

370,31

344,23

-7 %

A-1-2. Autres budgets

-

Transfert FIV

9,14

9,15

9,15

-

Transfert VVV

0,76

2,32

0,18

-92 %

Personnel DIV

2,28

2,83

2,83

-

Sous-total A-1-2

12,18

14,30

12,16

-15 %

Sous-total A-1

379,90

384,61

356,39

-7 %

Source : Jaune budgétaire

L'évolution des crédits relevant de divers ministères contribuant à la politique de la ville est présentée dans le tableau ci-après :

ÉVOLUTION DES CRÉDITS RELEVANT DE DIVERS MINISTÈRES
CONTRIBUANT À LA POLITIQUE DE LA VILLE 2002-2004

(DO + CP)

M€

2002

(Exécution)

2003

(LFI)

2004

(PJLF)

Ä 2004/2003

A-2. Crédits relevant de divers ministères contribuant à la politique de la ville

Affaires étrangères

0,43

0,43

0,43

-

Travail

295,48

247,41

172,66

-30 %

Culture et communication

27,78

27,23

27,35

-

Défense

12,18

15,17

15,17

-

Ecologie et développement durable

3,06

4,05

7,83

93 %

Economie, finances et industrie (FISAC)

7,00

7,00

7,00

-

Équipement, logement, transports

179,63

208,05

219,08

5 %

Fonction publique, réforme de l'Etat et AT

17,72

13,99

12,69

-9 %

Intérieur, sécurité intérieure et libertés locales

909,88

931,71

931,71

-

Jeunesse, éducation et recherche

559,39

563,67

589,37

5 %

Justice

57,03

75,42

73,74

-2 %

Outre-mer

15,92

17,29

17,72

2 %

Santé, famille et personnes handicapées

133,59

136,12

133,59

-2 %

Sports

6,55

6,55

6,55

-

FAS (*)

126,82

121,62

121,62

-

Sous-total A-2

2 352,46

2 375,71

2 336,51

-2 %

* La contractualisation sur le FAS est effectuée sur les contrats de ville et non les CPER en 2000

Source : Jaune budgétaire

Des réductions de crédits apparaissent principalement au titre de la fonction publique et du budget du travail, à cause de la fin du programme « nouveaux services, nouveaux emplois », auquel succèdera un nouveau dispositif, ainsi que des diminutions modiques sur les budgets de la justice et de la famille.

En revanche, des hausses sont enregistrées au titre des crédits :

- du ministère de l'équipement (219 M€, + 5 %) pour la mise en oeuvre du programme national de rénovation urbaine ;

- du ministère de l'écologie (près de 8 M€ en quasi-doublement), consacrés à des opérations d'intérêt local qui, concernant l'environnement croissent fortement afin d'assurer une meilleure prise en compte des paysages et de l'intégration urbaine, une réduction des nuisances sonores et de la publicité lors de l'élaboration des plans de déplacements urbains ou de la réhabilitation d'immeubles ;

- de la jeunesse et de l'éducation nationale (plus 26 M€), au titre de la rémunération des personnels affectés en zones d'éducation prioritaire.

Les interventions de la Caisse des dépôts enregistrent également des variations de sens contraire retracées dans le tableau ci-dessous :

ÉVOLUTION DES INTERVENTIONS DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
2002-2004

M€

2002 (1)

2003 (1)

2004 (1)

Ä 2004/2003

D. Intervention de la Caisse des dépôts et consignations

Prêts projets urbains (versements)

249,00

350,00

500,00

43 %

Prêts renouvellement urbain (versements)

546,00

630,00

680,00

8 %

Concours sur fonds propres

120,00

150,00

90,00

-40 %

pour information, intégralité prêts & concours

915,00

1 130,00

1 270,00

12 %

Sous-total D (bonifications et concours)

223,00

190,00

123,00

-35 %

(1) source : CDC, cf présentation p. 18-19.

Source : Jaune budgétaire

Alors que les prêts « projets urbains » et « renouvellement urbain » augmentent respectivement de 43 % et de 8 %, les concours sur fonds propres diminuent de 40 % pour atteindre 90 M€. Cette diminution n'empêche pourtant pas l'augmentation de l'ensemble des prêts et concours de la Caisse des dépôts (+12 %) qui atteignent 1,27 Md€.

Cette évolution résulte de la combinaison de la distribution des prêts pour le renouvellement urbain (PRU), en forte progression, de la stabilité des versements de prêts projet urbain (PPU) et des versements du fonds de renouvellement urbain.

L'enveloppe triennale de PRU , ouverte en octobre 2001, s'élève à 2,3 Md€ à un taux qui, depuis le 1 er août 2003, est abaissé à 2,5 %, à la suite de la réduction du taux du livret A. Les émissions d'emprunts destinés au financement d'opérations de restructuration des quartiers dans le cadre des grands projets de ville (GPV) et des opérations de restructuration urbaine (ORU) ont connu une forte croissance entre 2001 et 2002, passant de 592 à 691 Md€. Selon le fascicule « jaune » budgétaire. Ces financements sont destinés pour 51 % de leur montant total à des organismes de logement et ont permis 2.636 démolitions, 4.192 reconstructions de logements sociaux et 23.873 réhabilitations de ces mêmes logements.

L'enveloppe triennale de PPU , ouverte à l'automne 2001 au taux de 4,2 %, qui se monte à 1,52 Md€ a enregistré une diminution en termes d'émissions, passant de 394 Md€ en 2001 à 315 millions en 2002. Selon le même fascicule budgétaire « ce phénomène est lié à l'avantage comparatif que présente le PRU grâce à son taux plus attractif. Ce tassement s'explique également par une pause dans le programme d'investissement de certaines collectivités locales [...] ».

Le fonds de renouvellement urbain est destiné au financement de projets dans un cadre contractualisé. Il concerne, selon la source précitée, le réaménagement de grands ensembles d'habitat social, la réalisation d'aménagement et d'équipements publics et d'infrastructures de transport, voire même des opérations de requalification de friches urbaines ou industrielles, en banlieue comme en centre-ville. Ces crédits enregistrent une hausse constante depuis trois ans, passant de 113 à 150 millions d'euros, de 2001 à 2003.

II. LES MOYENS DU MINISTÈRE DE LA VILLE

Le ministère de la ville repose, pour la mise en oeuvre de la politique qu'il conduit, sur une administration de mission : la Délégation interministérielle à la ville (DIV).

Les effectifs de la DIV s'élèvent à 104 emplois réels (pour 110 autorisés), contre 84 pour 94 autorisés en 1999. Sur ce total, 51 agents figurent dans un cadre d'emplois spécifique à la DIV, les autres sont mis à disposition par le ministère de l'équipement auquel la Délégation est fonctionnellement rattachée, des agents mis à disposition par des ministères (éducation nationale, intérieur, affaires sociales, défense, justice) et des organismes publics tels que l'INSEE et la Caisse des dépôts et consignations. L'accroissement des effectifs est justifié par l'extension des missions de la DIV, notamment pour le suivi du programme de renouvellement urbain et des grands projets de ville.

CHAPITRE II -

LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

I. LES RÉSULTATS DU PACTE DE RELANCE POUR LA VILLE DE 1996

A la suite de la création des 44 premières zones franches urbaines par la loi n° 96887 du 14 novembre 1996 portant mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, ce dispositif simple et efficace, reposant sur l'encouragement à l'initiative individuelle et sur un volet économique négligé jusqu'alors, a permis de passer de 25.000 à 75.000 emplois dans ces zones (dont 65.000 exonérés) traduisant la création nette de 35.000 emplois nouveaux.

De ce fait, les effectifs salariés présents dans la première génération de zones franches ont triplé et atteint un objectif bien supérieur aux 10.000 emplois envisagés par les concepteurs du pacte de relance pour la ville.

La clause d'embauche locale de 20 % d'habitants des quartiers par les entreprises qui recrutent en ZFU a été largement dépassée pour atteindre près de 30 %, 85 % des recrutements étant réalisés dans le cadre de contrat à durée indéterminée.

Au total, selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis sur la base de l'année 2001, le coût du dispositif d'exonération par emploi maintenu, transféré ou créé s'établit à 5.400 € par mois.

Votre Commission des Affaires économiques se réjouit du plein succès enregistré par les zones franches urbaines, non moins que de sa prorogation et des améliorations qui lui ont été apportées depuis sa création.

II. LES OBJECTIFS RÉAFFIRMÉS PAR LA LOI DU 1ER AOÛT 2003

Réuni en session extraordinaire, le Parlement a adopté, en juillet dernier, la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine qui réaffirme la priorité gouvernementale que constitue la politique de la ville. Cette loi poursuit trois objectifs essentiels :

- la réduction des inégalités sociales et territoriales ;

- la rénovation durable de l'habitat, et notamment de l'habitat social ;

- et enfin le développement des activités économiques dans 85 zones franches urbaines (ZFU).

Ces objectifs se traduisent par deux grandes orientations : la rénovation urbaine et l'encouragement à la création d'emplois, auxquelles s'ajoute un volet consacré à la lutte contre le surendettement des ménages.

A. LA RÉNOVATION URBAINE

L'objectif poursuivi par le Gouvernement en matière de rénovation de l'habitat et des équipements urbains, dans le cadre du programme national de rénovation urbaine (PNRU) est de favoriser la mixité sociale dans les quartiers en difficulté et d'améliorer les conditions de logement et de vie de leurs habitants grâce à la constitution d'une offre nouvelle de 200.000 logements locatifs sociaux, la réhabilitation de 200.000 de ces logements et la démolition pure et simple de 200.000 autres logements dont la vétusté exclut toute réhabilitation. Le PNRU comprend des opérations d'aménagement urbain, la réhabilitation, la résidentialisation, la démolition et la production de logements, la création, la réhabilitation et la démolition d'équipements publics ou collectifs et la réorganisation d'espaces d'activités économiques et commerciales.

L'outil de cette politique sera l' Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) , établissement public national qui accordera des concours financiers au titre de la mise en oeuvre de ces opérations. En vertu de l'article 10 de la loi précitée, cette Agence contribue à la réalisation du PNRU aussi bien dans les quartiers situés en ZUS qu'à titre exceptionnel, et après avis conforme du maire et des ministres respectivement chargés de la ville et du logement, dans ceux qui présentent des caractéristiques économiques et sociales analogues. L'Agence élabore également une charte d'insertion qui intègre les exigences d'insertion professionnelle des habitants des ZUS.

La loi du 1 er août 2003 institue un mécanisme original de financement de l'ANRU, par le versement d'une contribution de l'Union d'économie sociale du logement (UESL) qui s'élèvera, de 2004 à 2008, à 457 millions d'euros par an. S'y ajoutent 570 millions d'euros de prêts pour la rénovation urbaine versés aux organismes d'habitations à loyer modéré. La loi prévoit enfin une réforme de la gouvernance des sociétés anonymes d'habitation à loyer modéré destinée à permettre l'émergence, au sein des conseils d'administration de ces entités, d'un actionnariat de référence qui détiendra la majorité du capital social. Cette réforme donnera par ailleurs une minorité de blocage aux collectivités locales et aux représentants des locataires en leur assurant le tiers des droits de vote au sein des assemblées générales d'actionnaires. Sur ce sujet, votre rapporteur renvoie aux développements du rapport de votre commission sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

B. LA CRÉATION D'EMPLOIS GRÂCE AUX ZFU

En matière de créations d'emplois, on a relancé, depuis le vote de la loi de finances pour 2003, l'importante mesure que constitue la « réouverture » du régime d'exonération en vigueur entre 1996 et 2001, dans les 44 premières zones franches urbaines pour les seules entreprises qui s'y installeraient entre le 1 er janvier 2002 et le 31 décembre 2007, à l'exclusion de celles qui en ont bénéficié dans le cadre du premier régime institué en 1996. Ces dispositions permettent aux communes dotées d'une ZFU de valoriser les disponibilités foncières qu'elles auraient constituées qui seraient encore disponibles.

La loi du 1 er août 2003 prévoit, quant à elle, la création de 41 nouvelles ZFU à partir du 1 er janvier 2004, lesquelles bénéficieront, outre d'une exonération d'impôt sur les sociétés, de taxes foncières et de taxes professionnelles -celles-ci étant compensées aux collectivités locales-, d'une exonération de cotisations sociales patronales totale pendant cinq ans puis dégressive pendant trois ans, ouverte aux entreprises de moins de 50 salariés dont un établissement est installé, se transfère ou est créé en ZFU, au titre de l'emploi de salariés en contrat à durée indéterminé ou à durée déterminée d'au moins douze mois.

Un soin particulier a été apporté par le législateur à la définition de l'emploi des salariés susceptibles de bénéficier des exonérations de cotisations sociales patronales, lesquels sont entendus comme ceux dont l'activité réelle, régulière et indispensable à l'exécution du contrat de travail s'exerce, en tout ou en partie, dans une ZFU. La réalité de l'activité de cet établissement s'appréciera en fonction de l'existence, dans la zone, d'éléments d'exploitation, ou de stocks nécessaires à l'activité de ces salariés.

En outre, la clause d'embauche locale a été modifiée afin de faciliter l'emploi des habitants de tous les quartiers classés en zone urbaine sensible de l'agglomération dans laquelle est située la ZFU. De la sorte, on évitera tout « effet de frontière » entre les habitants de la ZFU et ceux des quartiers défavorisés se trouvant à proximité qui pourront bénéficier des exonérations existantes dans celle-ci.

Enfin, la même loi a étendu l'exonération de cotisations sociales patronales aux emplois par des associations dans les ZFU (cf. le chapitre sur les acteurs de la politique de la ville, ci-après).

C. LA NOUVELLE PROCÉDURE DE RÉTABLISSEMENT PERSONNEL

Sans qu'elle soit limitée aux populations qui résident dans les zones concernées par la politique de la ville, la nouvelle procédure de rétablissement personnel a pour objet d'offrir une « deuxième chance » à tous les « accidentés de la vie » en permettant l'apurement juridictionnel de leurs dettes dès lors que la commission de surendettement conclut à l'existence d'une « situation irrémédiablement compromise ». Entraînant la suspension des poursuites, cette procédure de rétablissement au cours de laquelle le juge chargé de la mener à bien peut faire procéder à une enquête et ordonner un suivi social se conclut soit par l'élaboration d'un plan de redressement d'une durée limitée à dix ans, soit par le prononcé de la liquidation judiciaire du patrimoine personnel du débiteur avec effacement de ses dettes. Afin d'améliorer le suivi social de cette procédure, deux personnes justifiant d'une expérience dans le domaine de l'économie sociale et familiale, d'une part, et dans le domaine juridique, d'autre part, seront associées à l'instruction du dossier et assisteront aux réunions de la commission de surendettement avec voix consultative.

III. VERS UNE MEILLEURE ÉVALUATION ?

A l'occasion de l'examen des précédents projets de loi de finances, votre Commission des Affaires économiques s'est déclarée préoccupée par l'absence d'évaluation de la politique de la ville, observation confirmée, dans d'autres circonstances, par la Cour des Comptes. Votre rapporteur pour avis s'est lui-même ému de cette situation dans le rapport d'information sur les zones franches urbaines qu'il a publié en juin 2002. Ces remarques ne sont pas restées sans effet puisque la loi du 1 er août 2003 a considérablement renforcé le dispositif d'évaluation de la politique de la ville en modifiant, d'une part, le statut des comités d'orientation et de surveillance institués dans les ZFU et en créant, d'autre part, un Observatoire national des zones urbaines sensibles, tout en prévoyant un débat annuel devant le Parlement.

En ce qui concerne les comités d'orientation et de surveillance (COS), l'article 29 de la loi précitée modifie leur composition, afin d'assurer une meilleure représentation de toutes les forces vives susceptibles d'apprécier l'évolution de la situation dans une ZFU. Désormais, le COS comprendra outre tous les membres qui y participent déjà, les députés et sénateurs intéressés du département, le ou les maires des communes où se trouve la ZFU, le président de l'EPCI compétent en matière d'aménagement et de développement, le président du Conseil général, le président du Conseil régional ou leurs représentants, ainsi que ceux des chambres consulaires, des organisations syndicales de salariés représentatives au plan national, des organisations d'employeurs représentatives au plan national et des représentants des services de l'Etat.

S'agissant de l' Observatoire national des zones urbaines sensibles (ZUS), créé par l'article 3 de la loi précitée, il est chargé de mesurer l'évolution des inégalités sociales et des écarts de développement dans chacune des ZUS, de suivre les politiques publiques conduites en leur faveur, de mesurer les moyens spécifiques mis en oeuvre et d'en évaluer les effets par rapport aux objectifs et aux indicateurs de résultats fixés par la loi. L'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs sont tenus de lui communiquer les éléments nécessaires à l'accomplissement de sa mission. Cet Observatoire sera fonctionnellement géré par la Délégation interministérielle à la ville.

On notera enfin qu'à compter du 1 er janvier 2004, le Gouvernement présentera, au plus tard à l'ouverture de la session ordinaire du Parlement, un rapport annuel détaillé sur l'évolution des ZUS et des ZFU, lequel donnera lieu à un débat d'orientation devant chacune des deux assemblées.

A l'ensemble de ces innovations s'ajoute l'évaluation effectuée par le Comité national d'évaluation de la politique de la ville avec le concours de la mission « Observation, veille scientifique, évaluation » créée en septembre 2001 par la Délégation interministérielle à la ville. Après son installation en janvier 2002, le Comité national s'est réuni une première fois le 14 mars suivant avant que soit lancé un appel à consultation de recherche pour analyser, selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, « les modalités de construction et d'usage des objectifs de la politique de la ville » . Les résultats des recherches engagées seront disponibles d'ici à la fin 2004.

Tirant les leçons de la mission d'information qu'il a effectuée au cours de l'année 2002 sur les zones franches urbaines, votre rapporteur pour avis souhaite que des méthodes simples et robustes d'évaluation de la politique de la ville soient définies et que les services compétents se préoccupent, dès à présent, de réunir les premiers éléments statistiques qui permettront d'évaluer l'impact des mesures qui découlent de la loi du 1 er août 2003 .

CHAPITRE III -

LES ACTEURS DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

I. LES INTERVENTIONS DE L'UNION EUROPÉENNE

Pour la période 2000-2006, l'Union européenne contribue au financement de la politique de la ville par le biais des fonds structurels. En ce qui concerne la France, les enveloppes de crédits demeurent importantes. Les programmes régionaux permettent de consacrer :

- 3,8 milliards d'euros au titre de l' objectif 1, pour la promotion du développement et de l'ajustement structurel des régions en retard de développement, ce qui concerne d'une part les départements d'Outre-Mer (Réunion, Martinique, Guadeloupe et Guyane) et, d'autre part, dans le cadre d'une sortie « en sifflet », la Corse et le Hainaut français qui bénéficient d'un soutien dégressif ;

- 22,5 milliards d'euros au titre de l' objectif 2 , destinés à la reconversion économique et sociale des zones en difficulté structurelles du fait de mutations importantes (crise de l'industrie, restructuration des services, déclin des zones rurales, crise des zones urbaines ou du secteur de la pêche) et qui concernent notamment les quartiers en difficulté, 2/3 des contrats de villes bénéficiant de ces crédits pour un montant annuel moyen de 136,4 millions d'euros ;

- 24,05 milliards d'euros dans le cadre de l' objectif 3 , pour financer les politiques nationales destinées à favoriser l'adaptation et la modernisation de l'éducation, de la formation et de l'emploi.

Parallèlement à ces trois objectifs, la politique européenne repose sur trois programmes d'initiative communautaire (PIC) : URBAN, EQUAL et INTERREG, dont les montants atteignent :

- 96 millions d'euros pour le PIC URBAN , qui finance des actions, dans le cadre des contrats de ville, à Clichy sous-Bois / Montfermeil, Grigny / Viry-Châtillon, Mantes-la-Ville / Mantes-la-Jolie, dans le Val-de-Seine (Les Mureaux / Ecquevilly), la Communauté d'Agglomération de Grenoble, la Communauté Urbaine de Strasbourg, à Bastia, Bordeaux / Cenon / Floirac, au Havre ;

- 300 millions d'euros pour le PIC EQUAL , destiné à lutter contre les discriminations sur le marché du travail ;

- et enfin, 397 millions d'euros au titre du PIC INTERREG , pour favoriser la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale au sein du territoire communautaire.

Si, selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, l'incidence de la future réforme des fonds structurels sur le montant des crédits communautaire ne peut être définie, votre Commission des Affaires économiques souhaite très vivement que les pouvoirs publics s'attachent à utiliser, dans les meilleurs délais, le montant des crédits européens, et fassent en sorte que le principe du « cofinancement » des opérations qu'ils sont destinés à subventionner n'aboutisse pas à annihiler toute initiative en la matière .

II. L'ACTION DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Les collectivités locales jouent un rôle déterminant dans la mise en oeuvre de la politique de la ville assurant la gestion concertée de celle-ci avec l'Etat. Les relations de celles-ci avec celui-là s'inscrivent dans le cadre des 247 « contrats de ville » 2000-2006 qui s'insèrent dans le volet territorial des contrats de plan Etat-Région et préfigurent les futures « contrats d'agglomérations ».

Les crédits contractualisés au titre des régions s'élèvent à 778 M€ (hors Auvergne), tandis que les crédits délivrés par les départements font l'objet de décisions au cas par cas.

Rappelons, par comparaison, que les crédits d'Etat contractualisés dans ce cadre s'élèvent à :

- 1,363 Md € au titre des contrats de plan Etat-Région (CPER) ;

- 470 M€ pour les crédits dits des « autres ministères », également contractualisés dans les CPER ;

- 850 M€ au titre de divers crédits tels que ceux du fonds d'action sociale ou ceux destinés à la résorption de l'habitat insalubre ;

- et une enveloppe supplémentaire de 1,19 Md € consacrée, pour la même période, aux grands projets de ville et aux opérations de renouvellement urbain.

III. LE RÔLE DES ASSOCIATIONS

La loi du 1 er août 2003 précitée a étendu le régime d'exonération de cotisations sociales patronales prévu dans les zones franches urbaines aux emplois associatifs créés aussi bien dans les zones de redynamisation urbaine (ZRU) que dans les ZFU. Cette exonération sera ouverte aux associations implantées à la date du 1 er janvier 2004, et à celles qui s'y créeront avant le 1 er janvier 2009, dans la limite de 15 salariés à temps plein par mois (les salariés à temps partiel étant pris en compte au prorata de la durée de travail prévue par leur contrat). Cette exonération est ouverte au titre de l'emploi de salariés résidant dans l'une des zones précitées dont l'activité réelle, régulière et indispensable à l'exécution du contrat de travail s'exerce principalement dans ces zones. Ces dispositions, qui sont applicables aux entreprises d'insertion, sont de nature à favoriser l'emploi de populations précarisées par des associations.

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Suivant la proposition de son rapporteur pour avis, la commission des Affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la politique de la ville inscrits dans le projet de loi de finances pour 2004.

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