EXAMEN EN COMMISSION
Au cours d'une séance du mercredi 13 novembre 2002 , sous la présidence de M. Philippe Nachbar, secrétaire, la commission a examiné le rapport pour avis de M. Philippe Richert sur les crédits de l'enseignement scolaire pour 2003.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.
M. Daniel Eckenspieller s'est inquiété des mesures budgétaires prévues en faveur de l'intégration scolaire des handicapés.
M. Serge Lagauche a évoqué la poursuite de la grève administrative des directeurs d'école en s'interrogeant sur les crédits prévus pour ces personnels ; il a souhaité que le ministre apporte des précisions sur les négociations en cours, notamment au regard du système des décharges, qui sont susceptibles d'avoir des incidences budgétaires.
Soulignant les difficultés rencontrées pour développer le travail en commun des équipes éducatives dans les écoles et les collèges, il a souligné la nécessité pour les écoles primaires de disposer d'un responsable ayant vocation à donner des directives effectivement appliquées.
Il s'est enfin associé aux observations du rapporteur pour avis concernant un réexamen de la profession d'enseignant qui devrait être facilité par les perspectives de départs massifs en retraite des enseignants dans les années à venir.
M. Jean-Luc Miraux a félicité le rapporteur pour avis pour la clarté et la qualité de son exposé et a noté que l'augmentation du nombre des emplois d'enseignants, conjuguée à la baisse des effectifs scolarisés depuis plusieurs années, avait logiquement conduit à un renforcement du taux d'encadrement des élèves. Se fondant sur son expérience de maire, il a rappelé les réticences qui s'étaient manifestées lors de la mise en place des emplois-jeunes dans l'éducation nationale, sans que les élus municipaux y aient été associés, et s'est inquiété de la sortie des aides-éducateurs du dispositif, compte tenu notamment de la suppression annoncée de 20 000 emplois-jeunes. Il a exprimé la crainte que les maires soient sollicités par les enseignants et les parents d'élèves convaincus de l'utilité de ces emplois, même si certains aides-éducateurs se sont heureusement réorientés alors que d'autres ont « pantouflé ».
Il a indiqué que les écoles et établissements de sa ville accueillaient une trentaine d'aides-éducateurs qui ont fait la preuve de leur utilité, notamment pour la mise en place des nouvelles technologies.
Il a par ailleurs rappelé qu'il participait déjà au financement des classes-relais et a souhaité que les expérimentations annoncées ne se traduisent pas par un alourdissement de l'effort financier des communes.
M. Pierre Martin a également estimé que le métier d'enseignant devait être redéfini car la mise en place des IUFM a négligé la formation pratique devant les élèves, et ne s'est pas traduite par une professionnalisation satisfaisante de la fonction.
Il a regretté la disparition d'un esprit d'équipe dans les écoles et a souhaité que la fonction de directeur, avec ses droits et ses devoirs, soit redéfinie et s'accompagne éventuellement d'une gratification spécifique.
Il a également évoqué le plan de lutte contre l'illettrisme en s'interrogeant sur les moyens qui y seront consacrés. Il a considéré, à cet égard, que le cours préparatoire était une classe essentielle qui appelait une pédagogie adaptée et un effort tout particulier en faveur de la lecture, l'école dite de la deuxième chance n'ayant pas vocation à remédier à l'échec scolaire constaté dès les premières années de l'école primaire.
Il a par ailleurs souligné l'utilité de certains aides-éducateurs alors que d'autres se sont cantonnés à des tâches mineures en refusant de suivre une formation. Il a également indiqué que certains chefs d'établissement s'étaient opposés à ce que leurs emplois-jeunes consacrent comme il était prévu quelques heures de leur horaire au service des communes. Il a enfin souhaité que des formules soient mises en place pour faciliter la sortie des aides-éducateurs du dispositif au terme de leur contrat de cinq ans.
Mme Brigitte Luypaert a fait part de la déception des jeunes enseignants à l'égard de la formation qui leur est dispensée dans les IUFM et a évoqué les carences pédagogiques de ces instituts qui ne permettent pas aux nouveaux professeurs d'être armés pour affronter des publics scolaires difficiles. Elle a regretté par ailleurs que les expériences antérieures acquises par les candidats dans le domaine de l'encadrement des jeunes ne soient pas prises en compte lors de leur inscription en IUFM.
M. Jean-François Picheral s'est interrogé sur les mesures budgétaires proposées pour remédier à l'insuffisance chronique des personnels médico-sociaux.
Mme Annie David a estimé que la scolarisation avant l'âge de trois ans constituait un volet de la prévention de l'illettrisme, mais a regretté que le taux de cette scolarisation se réduise, notamment dans son département où il est inférieur à 10 %.
Elle a également regretté que le projet de budget ne prenne pas suffisamment en compte le problème des classes surchargées et a estimé qu'il n'était pas possible de faire lire tous les enfants d'une classe de cours préparatoire lorsque celle-ci accueille trente élèves, comme c'est parfois le cas dans les zones d'éducation prioritaires. Elle a rappelé enfin que les fermetures de classes conduisent souvent à accueillir 28 à 30 jeunes enfants en classes de maternelle.
Répondant à ces interventions, M. Philippe Richert, rapporteur pour avis , a notamment apporté les précisions suivantes :
- la troisième tranche du plan Handiscol bénéficiera en 2003 de 2,8 millions d'euros pour accueillir les élèves handicapés scolarisés dans le premier degré, et de 4,2 millions d'euros pour leur accueil dans le second degré ; une partie des aides-éducateurs « auxiliaires de vie scolaire » devrait par ailleurs être chargée d'assister les élèves handicapés ;
- les directeurs d'école bénéficieront en 2003 de 12,2 millions d'euros au titre de la seconde tranche de revalorisation de leur indemnité de sujétions spéciales ; le maintien de la grève administrative s'explique par l'alourdissement de leurs charges administratives qui appellent des compétences de gestionnaire que les directeurs d'écoles, qui sont parallèlement enseignants, n'ont pas le temps d'acquérir et d'exercer ; il conviendrait d'engager une réflexion sur la redéfinition de la fonction dans le droit fil de la proposition du ministre, dans le cadre du développement annoncé des réseaux d'écoles ;
- le taux d'encadrement pédagogique de notre système scolaire est aujourd'hui le plus élevé après celui de l'Italie mais ce taux doit tenir compte des enseignants qui ne sont pas devant les élèves ;
- le dispositif de surveillance et d'encadrement des écoles et des établissements doit être apprécié en fonction de la suppression de 5 600 emplois de MI-SE et de 20.000 emplois-jeunes, mais aussi de la création de 11 000 nouveaux assistants d'éducation ; certains établissements disposent sans doute d'un nombre excessif d'aides-éducateurs, qui s'ajoutent aux personnels de surveillance traditionnels et les chefs d'établissement nouvellement nommés décident parfois avec raison d'en réduire le nombre ; d'autres établissements sont au contraire sous-encadrés et la disparition de plus de 25 000 MI-SE et emplois-jeunes risquent d'aggraver leur situation ;
- les collectivités locales n'ont pas vocation à suppléer l'Etat dans le financement et la gestion du nouveau dispositif de surveillance, même si cette hypothèse a été évoquée dans le cadre du débat sur la décentralisation ;
- alors que les anciennes écoles normales proposaient trois années de formation, les IUFM n'en proposent plus que deux puisqu'un an de formation générale est consacré après la licence à la préparation du concours et que les deux années restantes comportent davantage de pédagogie théorique que de stages pratiques devant les élèves ; le système de formation des IUFM devrait donc privilégier la professionnalisation des futurs enseignants, afin notamment de mieux les préparer à exercer dans les établissements difficiles, où même des personnels chevronnés peuvent être en difficulté ;
- alors que les lauréats des concours de recrutement bénéficient d'une formation en IUFM, les « reçus-collés » figurant sur liste complémentaire sont susceptibles d'être placés immédiatement devant des élèves sans un minimum de formation pratique ; il importe donc de réduire le nombre de postes sur ces listes complémentaires afin de diminuer la proportion d'enseignants dépourvus de toute formation, qui est excessivement élevée dans certaines académies ;
- la prévention de l'illettrisme passe par de nouvelles pratiques pédagogiques et un enseignement de qualité, alors que des expérimentations malheureuses ont été lancées dans le passé, sans suffisamment mesurer leurs conséquences pour les élèves ;
- la réforme de la formation dispensée en IUFM devrait conduire à s'interroger sur la nature de la fonction enseignante, notamment par rapport à celle d'éducateur, et la prise en compte des motivations des candidats permettrait d'élargir éventuellement les viviers de recrutement à ceux qui justifient déjà d'une expérience de l'encadrement des jeunes ;
- le projet de budget pour 2003 prévoit la création de 262 emplois de personnels médico-sociaux, soit 210 infirmiers et infirmières, 35 assistants et assistantes sociales et 17 médecins scolaires ;
- le nombre d'élèves par classe est en baisse régulière depuis plusieurs années mais une variation minime du taux moyen d'encadrement, en plus ou en moins, n'est pas significative au niveau des écoles et établissements ;
- la scolarisation à moins de trois ans peut être positive dans certains quartiers défavorisés mais il convient de se demander si l'accueil des très jeunes enfants, en vue de leur socialisation future, doit s'effectuer dans un cadre exclusivement scolaire : certains pays comme l'Allemagne ne scolarisent pas les enfants de trois ans et offrent d'autres alternatives ; si notre école maternelle est légitimement enviée par nos voisins, il n'est pas certain qu'elle soit la plus performante en termes d'accueil des très jeunes enfants et que la formation de ses enseignants soit la plus adaptée.
A l'issue de ce débat, et suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement scolaire pour 2003 .