CHAPITRE III -
L'ESPACE
ET LE RENSEIGNEMENT MILITAIRES
Le renforcement des moyens consacrés aux programmes spatiaux et aux services de renseignement constitue un objectif prioritaire de l'actuelle loi de programmation, en raison du rôle majeur de la maîtrise de l'information dans la gestion des crises.
Votre rapporteur n'insistera pas sur la place capitale de ces deux domaines dans l'acquisition de l'autonomie stratégique. Il tient simplement à rappeler l'écart considérable, une nouvelle fois illustré lors du conflit du Kosovo, entre les capacités des Etats-Unis et celles de ses alliés européens en la matière, la France se situant cependant, au sein de ces derniers, parmi les mieux pourvus en moyens de recueil du renseignement et de communications. D'autre part, les ambitions affichées en matière de capacités militaires européennes passent par un effort beaucoup plus soutenu des pays membres, notamment en matière spatiale.
Sur ce plan, les perspectives apparaissent, en cette fin d'année 2000, un peu plus favorables qu'elles ne l'étaient les années précédentes.
Dans le domaine spatial, l'échec des coopérations européennes a perturbé la poursuite des programmes français, que ce soit en matière d'observation ou de télécommunications, mais plusieurs de nos partenaires semblent de nouveau manifester un intérêt pour les projets de satellites radars.
S'agissant des services de renseignement, ils bénéficient d'une augmentation régulière et continue de leurs moyens, en pleine conformité avec la loi de programmation.
I. L'ESPACE MILITAIRE : UNE AMORCE DE REDRESSEMENT APRÈS QUATRE ANNÉES NOIRES
L'espace militaire a certainement constitué le domaine où l'écart a été le plus fort entre les objectifs affirmés par la loi de programmation et les réalisations, compte tenu de l'échec des coopérations européennes qui a conduit à l'abandon de certains projets et à des retards sur d'autres.
Quelques mois après l'opération Force alliée au Kosovo, qui a montré l'importance des équipements spatiaux militaires, ceux-ci semblent revenir à l'ordre du jour des préoccupations européennes. La déclaration d'engagement de capacités militaires adoptée à Bruxelles le 20 novembre souligne les insuffisances portant sur le renseignement de niveau stratégique et mentionne les équipements satellitaires dont le développement est envisagé par plusieurs Etats membres.
Ce nouveau contexte européen apporte donc une lueur d'espoir dans un domaine où toute ambition passe par une politique de coopération extrêmement volontariste.
Le programme spatial français, fortement perturbé par les défections successives de plusieurs de nos partenaires, pourrait donc se poursuivre dans de meilleures conditions, l'effort de notre pays étant susceptible de s'intégrer, si les intentions de l'Allemagne et de l'Italie se confirment, dans une politique européenne cohérente de renforcement des moyens spatiaux.
Sur le plan strictement budgétaire, la France a dû assumer seule le financement de programmes initialement envisagés en coopération. Le budget spatial, bien que très inférieur aux objectifs de la loi de programmation, amorce une remontée après un point bas atteint en 2000.
A. UN REGAIN D'INTÉRÊT EUROPÉEN POUR LES PROGRAMMES SPATIAUX
1. Les déconvenues de la coopération européenne depuis 1998
Les trois années écoulées ont accentué l'isolement de la France, seule nation européenne à s'être engagée dans un programme spatial militaire significatif.
La principale défection est venue de l'Allemagne, qui n'a pas donné suite aux principes de coopération posés lors du sommet franco-allemand de Baden-Baden en décembre 1995. Faute de financement, elle ne s'est pas engagée aux côtés de la France dans le programme d'observation optique Helios II, ni dans le programme radar Horus, au sein duquel elle devait détenir une participation majeure.
S'agissant d'Hélios II, la France a cherché, sans succès, à compenser le retrait de l'Allemagne par une implication de ses deux partenaires sur Hélios I, à savoir l'Espagne et l'Italie, qui n'ont pas donné suite. La Belgique, également approchée, s'était déclarée intéressée mais a dû renoncer en raison de ressources insuffisantes. Ces défections successives n'ont toutefois pas remis en cause la poursuite du programme Hélios II dans un cadre purement national.
La coopération européenne a également échoué sur le programme de satellites de télécommunications Syracuse III. Le projet de coopération franco-germano-britannique Trimilsatcom a été remis en cause après le retrait, à l'été 1998, du Royaume-Uni qui a considéré qu'une solution nationale lui apportait de meilleures garanties pour son futur système. Quant à l'Allemagne, sa participation éventuelle n'est désormais envisagée que dans le cadre de la seconde étape du programme, lorsque sera lancé fin 2006 le second satellite.