Question de M. MENONVILLE Franck (Meuse - UC) publiée le 03/04/2025

M. Franck Menonville attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins sur la prise en charge de patients incarcérés lors de leurs transferts vers les établissements psychiatriques.
On compte en France, trois fois plus de troubles psychiatriques en population carcérale qu'en population générale. En effet, les études épidémiologiques montrent que la prévalence des troubles psychiatriques graves est importante à l'entrée en prison, ce qui pose inéluctablement la question de la prise en charge médicale de ces patients avec ce statut particulier.
Si les détenus bénéficient d'escortes d'agents pénitentiaires lors de consultations hospitalières conventionnelles, il subsiste une problématique lorsqu'ils présentent des troubles psychiatriques nécessitant une hospitalisation adaptée. En effet, dans le cadre d'un arrêté de « soins sans consentement sur décision d'un représentant de l'État » (SDRE), signé par le préfet, est déterminée la nature de l'escorte mais il est fréquent que des soignants soient contraints d'assurer le transport de ces patients, exposant ces professionnels à un risque majeur d'agression à l'intérieur ou à l'extérieur du véhicule.
En outre, un transfert de responsabilité s'opère entre le directeur de l'établissement pénitentiaire et celui du centre hospitalier. Le détenu devient alors un patient, ce qui lui confère des droits liés au code de la santé publique et non plus ceux régis par le code pénitentiaire. Or, les professionnels de santé n'ont pas connaissance de la nature de la détention, ni de l'évaluation de la dangerosité du détenu opérée par les services pénitentiaires.
Ainsi, dans un contexte de sous-effectif des professionnels soignants, nécessitant le recours à des intérimaires pas toujours aguerris à ce type de situations délicates, l'insécurité est particulièrement élevée.
Ainsi, il souhaiterait connaître les mesures que le Gouvernement entend mettre en place afin de renforcer la sécurité lors des transferts de détenus et au cours de leur hospitalisation en psychiatrie.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 09/04/2025

Réponse apportée en séance publique le 08/04/2025

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, auteur de la question n° 441, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins.

M. Franck Menonville. Madame la ministre, ma question porte sur la sécurité du personnel soignant lors des transfèrements de détenus vers les établissements psychiatriques.

Les troubles psychiatriques sont trois fois plus élevés parmi la population carcérale que dans le reste de la population. De ce fait, la prise en charge médicale de ces patients au statut particulier est cruciale.

Si les détenus bénéficient systématiquement d'escortes sécurisées lors de consultations hospitalières conventionnelles, il n'en va pas de même lorsqu'ils présentent des troubles psychiatriques nécessitant une hospitalisation.

Lorsqu'il signe un arrêté de soins sans consentement sur décision d'un représentant de l'État (SDRE), le préfet détermine la nature de l'escorte et, force est de le constater, les soignants sont très fréquemment contraints d'assurer le transport de ces patients, s'exposant ainsi à des risques majeurs pour leur sécurité.

En outre, en cas d'hospitalisation, un transfert de responsabilité s'opère entre le directeur de l'établissement pénitentiaire et celui du centre hospitalier. Le détenu devenu patient dispose de droits régis par le code de la santé publique et non plus par le code pénitentiaire.

Néanmoins, aucune information relative à la nature de la détention ou à la dangerosité des individus n'est communiquée aux personnels de santé. Ainsi, dans un contexte tendu, alors que l'hôpital public est déjà confronté à des problèmes de recrutement et de sous-effectif, la dangerosité particulièrement élevée de ce type d'opérations se révèle de plus en plus préoccupante.

Madame la ministre, le personnel soignant a besoin d'être rassuré. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour renforcer leur sécurité tant lors des transfèrements qu'au cours de l'hospitalisation en psychiatrie des détenus ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Monsieur le sénateur Franck Menonville, vous m'interrogez sur la sécurité des soignants au contact de détenus qui nécessitent un suivi psychiatrique.

Dans le cadre de la dernière feuille de route Santé des personnes placées sous main de justice, une action est consacrée à « l'amélioration du parcours de soins en santé mentale sur [...] trois niveaux ».

Vous le savez, bien que la prise en charge des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques sans consentement en hospitalisation complète soit en priorité orientée vers des unités d'hospitalisation spécialement aménagées (UHSA), un grand nombre d'entre elles fait l'objet d'une prise en charge dans d'autres services au sein d'établissements de santé autorisés en psychiatrie.

Cela nous a conduits à publier, à l'automne dernier, un guide de bonnes pratiques pour la prise en charge en établissement de santé autorisé en psychiatrie des personnes détenues hospitalisées en soins sans consentement.

Ce guide a été réalisé en étroite concertation avec tous les professionnels, notamment les représentants de l'Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP), des membres de la commission nationale de psychiatrie (CNP) et de la sous-commission psychiatrie médico-légale, des représentants de l'association des établissements du service public de santé mentale (ADESM).

Il permet d'accompagner les professionnels et les directions hospitalières des établissements autorisés en psychiatrie amenés à prendre en charge des patients détenus, en apportant des réponses concrètes à chacune des difficultés rencontrées. Il rappelle notamment les règles applicables en matière d'escorte, ainsi que les modalités d'application des droits fondamentaux des patients.

Parallèlement, le ministre de la santé copilote avec le ministre de la justice le déploiement de la seconde tranche des UHSA, avec la construction de trois nouvelles unités. Celles-ci permettront la création de 160 lits supplémentaires, s'ajoutant aux 440 lits déjà existants.

Enfin, il faut souligner les travaux parlementaires sur ce sujet. La mission d'évaluation de la prise en charge des troubles psychiques des personnes placées sous main de justice, dont Mmes Josiane Corneloup et Élise Leboucher sont les rapporteures, permettra aussi d'appuyer l'action de l'État.

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