Question de Mme CANALÈS Marion (Puy-de-Dôme - SER) publiée le 10/04/2025
Question posée en séance publique le 09/04/2025
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Marion Canalès. Madame la ministre, hier, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les manquements des politiques publiques de protection de l'enfance a rendu un rapport très attendu. Au total, en deux ans, 1 800 pages de rapports ont été publiées, 450 préconisations ont été formulées, des procès ont eu lieu, des travailleurs sociaux ont alerté, des enfants ont témoigné. D'autres ne le peuvent plus.
Personne ne peut ignorer l'état de la protection de l'enfance et le sort des 400 000 enfants accompagnés, parfois, protégés, mais pas toujours. L'écart entre ce qui est dit et su et la réalité de l'action est immense. Quand les lois déjà adoptées se traduiront-elles enfin par des décrets, pour certaines, et dans les faits, pour les autres ?
Seulement 30 % des enfants bénéficient du bilan de santé global, pourtant prévu par la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 et par la loi relative à la protection des enfants de 2022.
Quand obtiendrons-nous enfin une loi pluriannuelle des moyens alloués à la protection de l'enfance pour tracer de vraies perspectives ? Qu'avez-vous fait du rapport sur le travail social ? Ne pas renforcer les métiers du lien, c'est creuser le gouffre de la protection de l'enfance. Aujourd'hui, il faut agir !
Chacun de ces 400 000 enfants est une figure républicaine à l'égard de laquelle notre responsabilité est immense. Ces enfants tiennent, parfois sous les coups, souvent sous les dominations ou le déni. Certains ne tiennent pas.
Nous leur devons une mobilisation à la hauteur de leur résistance. Pour les enfants d'aujourd'hui et de demain, peut-on sérieusement continuer de laisser le financement des solidarités dans nos départements reposer en partie sur les droits de mutation et des dynamiques de marché comme c'est actuellement le cas ?
Si je force le trait, l'offre en protection de l'enfance dans un département donné dépend du nombre d'appartements qui y sont vendus. Voilà la réalité de notre système !
Quid des enfants d'hier, qui n'ont pas trouvé la protection qui leur était due et auxquels les manquements historiques de l'État n'ont pas permis d'écrire une nouvelle page ? Prendrez-vous l'initiative de créer une commission nationale de reconnaissance de ces victimes ? ((Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. - MM. Ian Brossat et Philippe Grosvalet applaudissent également.)
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Réponse du Ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles publiée le 10/04/2025
Réponse apportée en séance publique le 09/04/2025
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Madame la sénatrice Canalès, vous abordez différents sujets dans votre question.
Vous avez évoqué le remarquable travail qui vient d'être rendu hier par la députée Isabelle Santiago, avec laquelle j'ai eu l'occasion de m'entretenir à plusieurs reprises, comme j'ai eu l'occasion de le faire avec sa collègue Perrine Goulet, qui préside la délégation aux droits des enfants à l'Assemblée nationale.
Je souhaite travailler sur plusieurs sujets liés à l'enfance, que j'ai mis en avant pas plus tard que lundi.
Tout d'abord, je souhaite que nous publiions les décrets d'application qui doivent l'être. J'ai d'ailleurs fait publier un décret d'application de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite loi Taquet, il y a exactement quinze jours.
Ensuite, je discute avec les départements au sujet du financement de certaines mesures, car, comme vous le savez très bien, dès lors qu'il est question de normes d'encadrement, cela implique un financement supplémentaire. Actuellement, les départements s'engagent de façon importante sur l'aide sociale à l'enfance (ASE) et l'État les accompagne.
Aussi, j'ai établi avec Florence Dabin, vice-présidente de Départements de France et présidente du groupement d'intérêt public Enfance en danger, un plan d'action sur l'aide à l'enfance.
Premièrement, nous travaillons sur le sujet des pouponnières : nous voulons qu'aucun enfant de moins de 3 ans ne soit gardé en accueil collectif dans un délai le plus court possible.
Deuxièmement, nous souhaitons renforcer le vivier des assistants familiaux en leur permettant de travailler quand les enfants qu'ils gardent sont scolarisés.
Troisièmement, nous nous penchons sur la rémunération de ces derniers, qui est un élément important.
Quatrièmement, nous travaillons sur l'orientation professionnelle de chacun des enfants de l'ASE.
Cinquièmement, nous voulons instaurer un bilan de santé lorsqu'un enfant est dirigé vers l'aide sociale à l'enfance.
Madame la sénatrice, vous avez également fait allusion à la question des travailleurs sociaux. J'ai rendez-vous à seize heures trente avec le président du Haut Conseil du travail social (HCTS), Mathieu Klein, et le président de l'Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss), Daniel Goldberg, précisément pour travailler sur l'ensemble de ces sujets.
Enfin, en ce qui concerne le rapport de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), le Premier ministre a arbitré : nous avons prolongé cette commission jusqu'en septembre 2026 pour qu'elle continue de travailler avec l'ensemble de ses membres sous la houlette de la haute-commissaire à l'enfance Sarah El Haïry. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour la réplique.
Mme Marion Canalès. Madame la ministre, je regrette que rien dans vos annonces ne concerne les enfants qui dépendent à 100 % de l'État : je pense aux enfants qui attendent des places en institut médico-éducatif (IME). En Gironde, près de 150 d'entre eux sont pris en charge par le conseil départemental.
Comme vous avez cité la présidente de la délégation aux droits des enfants de l'Assemblée nationale, je déplore le fait que nous n'ayons pas la chance de vous auditionner dans ce cadre au Sénat. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
Mme Laurence Rossignol. Très bien !
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