Question de M. ROCHETTE Pierre Jean (Loire - Les Indépendants) publiée le 10/04/2025
Question posée en séance publique le 09/04/2025
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le président, permettez-moi d'associer mes trois collègues sénateurs de la Loire à ma question.
Monsieur le ministre chargé de l'industrie et de l'énergie, Verney-Carron est le dernier fabricant français d'armes légères d'envergure industrielle. Cette entreprise située à Saint-Étienne - commune qui, au passage, fut baptisée par le passé Armeville... - se trouve aujourd'hui en grande difficulté et est menacée de liquidation judiciaire.
La ville de Saint-Étienne, par le biais d'un montage immobilier, a apporté son soutien à Verney-Carron pour un montant de 2 millions d'euros, mais il reste 1 million d'euros à trouver.
Ma question est simple : à l'heure où l'on parle quotidiennement de souveraineté, de réarmement et d'autonomie stratégique, comment se fait-il que l'État n'arrive pas à mobiliser et à injecter, directement ou indirectement, une telle somme dans une entreprise aussi stratégique ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains. - M. Jean-Claude Tissot et Mme Cécile Cukierman applaudissent également.)
M. Emmanuel Capus. Excellent !
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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie publiée le 10/04/2025
Réponse apportée en séance publique le 09/04/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'industrie et de l'énergie.
M. Marc Ferracci, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie et de l'énergie. Monsieur le sénateur Rochette, vous m'interrogez sur la situation de Verney-Carron. Comme vous le savez, mes équipes et moi-même suivons le dossier de cette entreprise historique de Saint-Étienne, qui compte environ soixante salariés.
Il s'agit d'une société spécialisée dans la fabrication d'armes de prestige pour le secteur de la chasse. Chacun le sait, elle s'inscrit dans une tradition locale très importante, celui de la production d'armes dans la région stéphanoise.
En revanche, je tiens à le préciser ici, aujourd'hui, l'entreprise n'a pas de contrat stratégique en lien avec nos enjeux nationaux de défense. (Mme Cécile Cukierman proteste.) De ce point de vue, les difficultés de Verney-Carron n'ont aucune implication directe sur notre souveraineté.
Mme Cécile Cukierman. Évidemment, on y a renoncé !
M. Marc Ferracci, ministre. Cela n'enlève évidemment rien aux compétences très spécifiques et précieuses de ses salariés. L'entreprise est en grande difficulté depuis plusieurs années, résultante d'une charge de travail insuffisante et des dettes très importantes qui se sont accumulées. Cela a conduit Verney-Carron à l'état de cessation de paiements et à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
Dans ce contexte, notre objectif est tout d'abord de trouver une solution pérenne. Concrètement, l'État soutient financièrement l'entreprise, afin de lui laisser le temps de trouver une réponse. Cela se traduit par le gel d'un passif public à hauteur de plus de 1 million d'euros, par l'application du régime d'activité partielle à 80 % des salariés et, enfin, par le déblocage ces derniers jours du versement du crédit d'impôt recherche.
Notre objectif est ensuite de trouver, avec l'administrateur judiciaire et l'entreprise, une solution de reprise qui lui assure un avenir. Les discussions sont en cours entre l'actionnaire et divers acteurs industriels. Je serai, avec Sébastien Lecornu, particulièrement vigilant à ce que la solution qui émerge soit la plus pertinente, c'est-à-dire la plus durable, pour les salariés, le maintien des savoir-faire et le territoire.
J'ai demandé à mes équipes de resserrer les liens entre mon ministère et vous, monsieur le sénateur, ainsi qu'avec l'ensemble des élus du territoire, pour que le dialogue soit le plus fluide et le plus transparent possible dans ce dossier. Vous pouvez compter sur notre mobilisation. (MM. François Patriat et Bernard Buis applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour la réplique.
M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le ministre, j'ai envie de vous croire, d'autant que l'on n'a pas bien le choix...
Vous nous dites que Verney-Carron ne fournit pas d'armes à la défense. Soit, mais elle fournit le ministère de l'intérieur aujourd'hui ! Sans compter que, si elle ne fabrique pas d'armes pour notre défense, c'est parce que notre commande publique s'est détournée des entreprises françaises et qu'elle a préféré acheter allemand ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Cécile Cukierman. Bien sûr !
M. Pierre Jean Rochette. Voilà le fond du sujet !
Les appels d'offres, c'est très bien, mais la prise en considération du seul critère du prix tue l'entreprise française. C'est ce qui se passe pour Verney-Carron. Nous espérons, bien entendu, un avenir meilleur pour cette entreprise.
Mme Cécile Cukierman. On a renoncé à notre souveraineté nationale !
M. Pierre Jean Rochette. Nous souhaitons, monsieur le ministre - et j'espère que vous allez vous engager pleinement sur ce dossier pour que l'entreprise et ses emplois restent à Saint-Étienne -, que Verney-Carron continue de fabriquer des armes à Saint-Étienne.
Que cette société soit reprise par une autre, d'accord, mais il faut que la nouvelle entreprise respecte les valeurs que notre pays défend et que notre fleuron ne tombe pas entre des mains hostiles. Cela m'apparaît d'une logique implacable, mais il n'est pas inutile de le préciser.
Monsieur le ministre, je vous le redis une dernière fois, parce que cela ne concerne pas que l'armement : la commande publique française pose problème aux entreprises françaises ; si, aujourd'hui, on ne fournit pas d'armes françaises à notre défense, c'est notamment parce que l'on a acheté à l'étranger. C'est une faiblesse qu'il faudra corriger à l'avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC, Les Républicains, SER et CRCE-K.)
Mme Cécile Cukierman. Exactement !
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