Question de Mme PUISSAT Frédérique (Isère - Les Républicains) publiée le 20/03/2025
Mme Frédérique Puissat attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire au sujet de l'impossibilité d'indemniser les éleveurs lorsque leurs animaux proches de la naissance sont tués par le loup. Aujourd'hui, le barème d'indemnisation relatif aux attaques de loups indique que les animaux doivent être nés pour être indemnisés, même s'ils sont seulement à quelques jours de la naissance. Ainsi, une brebis, qu'elle soit allaitante, en début de gestation ou à quelques heures d'agneler, est indemnisée au même prix. Une seule catégorie pour indemniser ces différentes situations ne semble pas être équitable et peut à juste titre créer un sentiment d'incompréhension chez les éleveurs. En effet, lorsqu'une brebis allaitante est attaquée, elle est indemnisée et son agneau peut soit survivre, soit être indemnisé s'il est lui-même attaqué. Lorsqu'une brebis gestante est attaquée, seule la brebis est indemnisée alors que l'éleveur perd la brebis mais aussi l'agneau qu'elle porte. Ceci est un problème récurrent aussi bien pour les ovins que pour les bovins. Il conviendrait donc de faire évoluer la grille d'indemnisation en instaurant des catégories différentes pour ces types d'animaux afin de prendre en compte l'animal en gestation dans l'indemnisation, ainsi que l'animal vide et non allaitant. Elle lui demande si elle envisage de modifier la grille d'indemnisation en ce sens et à quelle échéance.
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Transmise au Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité publiée le 26/03/2025
Réponse apportée en séance publique le 25/03/2025
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, auteur de la question n° 395, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Frédérique Puissat. Madame la ministre, comme vous le savez, dans cet hémicycle, nous sommes nombreux, parlementaires de tout bord, à interpeller régulièrement le Gouvernement sur les enjeux de la prédation, notamment celle du loup. Nous ne lâcherons pas, conscients du travail des éleveurs, mais également de leurs souffrances. Je sais que notre position, à bien des égards, est aussi la vôtre.
N'ayant pas eu de réponse à ma question écrite, très spécifique, je vous la pose oralement. Elle porte sur les montants forfaitaires d'indemnisation par espèce, précisément sur la grille d'évaluation de février 2024. Cette dernière tient compte d'un certain nombre de paramètres : l'espèce, selon qu'il s'agisse d'indemniser des ovins, des bovins ou des équins, l'âge de l'animal, son sexe et sa finalité. Cependant, madame la ministre, il n'y a qu'une seule catégorie d'indemnisation pour les brebis, qu'elles soient allaitantes, gestantes, vides ou non suitées, ce qui ne nous paraît pas équitable.
En effet, lorsqu'une brebis allaitante est prédatée, l'éleveur est indemnisé, et l'agneau de celle-ci peut soit survivre, soit donner lui aussi lieu à une indemnisation s'il est également prédaté. En revanche, lorsqu'une brebis gestante est prédatée, seule cette dernière fait l'objet d'une indemnisation, alors que l'éleveur perd à la fois la brebis et l'agneau qu'elle porte.
Ainsi, j'ai à l'esprit une situation au cours de laquelle des brebis étaient très proches de l'agnelage, au point qu'elles auraient pu allaiter dans l'heure qui aurait suivi leur décès. En colère, l'agriculteur a retiré les agneaux du ventre des mères concernées, prédatées par le loup : il était visible que ces derniers étaient sur le point de naître.
Envisagez-vous, madame la ministre, une révision de cette grille, afin de tenir compte de ce paramètre ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Madame la sénatrice Puissat, votre question porte sur la prédation des troupeaux par les loups. Ce sujet est extrêmement important, ce qu'illustrent les deux questions dont il fait aujourd'hui l'objet.
Ma collègue Agnès Pannier-Runacher, qui ne peut être là aujourd'hui, me charge de vous dire que nous portons une attention particulière à ce phénomène, parce qu'il a des conséquences économiques graves. Une indemnisation des pertes, directes ou indirectes, subies par le troupeau, est donc prévue en application d'un arrêté de février 2024.
Les pertes directes correspondent à celles d'animaux vivants, lesquels font l'objet d'une indemnisation pour leur valeur intrinsèque. Celle d'un ovin est donc compensée en fonction de la catégorie et de l'âge de l'animal victime : laitière, allaitante, bio, etc. Vous connaissez très bien le sujet, madame Puissat...
Ces indemnités pour pertes directes ont été revalorisées d'environ 30 % en février 2024. Il est aussi prévu une indemnisation pour les femelles gestantes ou reproductrices à une valeur de près de deux à cinq fois plus élevée que celle des agneaux, pour tenir compte de ce potentiel reproducteur.
Les pertes indirectes sont, elles, liées à la perturbation du troupeau du fait, notamment, du stress, de la moindre prise de poids, des avortements ou de la baisse de lactation. Le montant de l'indemnisation de ces pertes est fixé de façon forfaitaire, selon la taille du troupeau attaqué.
Toutefois, cela n'est pas satisfaisant, je vous l'accorde. C'est pourquoi, dans le cadre du plan national d'actions 2024-2029 sur le loup et les activités d'élevage, la prise en compte de ces pertes indirectes, notamment liées aux avortements consécutifs à une attaque de loup, est en cours de révision. L'objectif est de proposer un système d'indemnisation mieux proportionné aux pertes effectivement subies par les éleveurs. Je ne doute pas, madame la sénatrice, que vous suivrez avec beaucoup d'attention les travaux sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.
Mme Frédérique Puissat. Bien sûr, madame la ministre, nous suivrons ces travaux avec attention.
Je rappellerai alors l'exemple précis d'un agriculteur qui a subi de nombreuses attaques, dont la dernière a été la goutte qui a fait déborder le vase. J'ai une pensée pour tous les éleveurs, alors que les estives ont commencé. Franchement, dans tous les territoires, c'est pour eux la panique, et nous ne pouvons que les comprendre.
Nous comptons vraiment sur vous et sur ce gouvernement, madame la ministre.
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