Question de M. BROSSAT Ian (Paris - CRCE-K) publiée le 20/02/2025

M. Ian Brossat attire l'attention de Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les suppressions de postes d'enseignants, la fermeture de classes et la remise en cause de la décharge des directeurs d'école à Paris.

L'école de la République doit garantir à chaque enfant un enseignement de qualité. Or, cette mission est aujourd'hui menacée dans la capitale par des fermetures de classes en nombre et la suppression de nombreux postes d'enseignants.

Le 11 février dernier, 1 200 parents, enseignants et élèves se sont rassemblés devant le rectorat de Paris pour exprimer leur inquiétude et leur opposition à ces mesures, qui compromettent l'avenir de l'école publique. À la rentrée 2025, il est prévu de supprimer 110 postes dans le premier degré et de fermer 198 classes dans la capitale. Pourtant, alors que Paris ne représente que 3 % de la baisse démographique nationale, elle concentre à elle seule 23 % des suppressions de postes.

Ces décisions auraient des conséquences préoccupantes. La surcharge des classes, alors que le nombre d'élèves par enseignant est déjà supérieur à la moyenne européenne, nuira à la qualité de l'enseignement. De plus, ces fermetures creuseront encore davantage les inégalités scolaires, en pénalisant en premier lieu les élèves issus de familles précaires. La baisse démographique aurait pourtant pu être l'occasion de réduire les effectifs par classe afin d'améliorer les conditions d'apprentissage. À l'inverse, ces choix risquent d'accélérer le départ vers l'enseignement privé et d'accroître la ségrégation scolaire.

Par ailleurs, la remise en cause de la décharge des directeurs d'école inquiète fortement la communauté éducative. Depuis 1982, une convention entre la ville de Paris et le ministère de l'éducation nationale permet aux directeurs d'école d'être déchargés d'une partie de leur service d'enseignement afin de se consacrer à leurs missions administratives et pédagogiques, notamment la lutte contre le harcèlement scolaire ou l'accompagnement des parents. Mettre un terme à cette décharge risquerait d'alourdir considérablement leurs tâches et de diminuer leur capacité à répondre aux besoins des élèves et des équipes pédagogiques, ce qui aurait un impact direct sur la qualité du fonctionnement des écoles parisiennes.

Dans ce contexte, il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de revenir sur ces décisions, notamment sur les suppressions de postes alors que les besoins à Paris restent immenses. Enfin, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement quant à la pérennisation de la décharge des directeurs d'école, qui demeure essentielle pour garantir un environnement éducatif de qualité.

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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité publiée le 26/03/2025

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2025

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, auteur de la question n° 329, adressée à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Ian Brossat. Madame la ministre, ma question concerne les écoles parisiennes. En effet, communauté scolaire parisienne est en colère depuis de nombreuses semaines, de nombreux mois. Ce mécontentement est imputable à deux causes principales.

La première est l'éventualité de la suppression des décharges de directeur. À Paris, au-delà de 5 classes dans l'école, les directeurs sont déchargés de leurs heures d'enseignement, ce qui leur permet de se consacrer pleinement à leurs tâches de direction. Mme Borne voulait supprimer cette disposition. Elle a finalement renoncé à ce projet en annonçant un moratoire : tant mieux ! Cette victoire est à porter au crédit des directeurs, des parents d'élèves et des enseignants, qui se sont mobilisés.

Reste néanmoins le second objet de cette colère : la suppression, très massive, de postes d'enseignants dans le premier degré. Ainsi, 180 classes sont aujourd'hui menacées de fermeture. La démographie, argument invoqué, a bon dos : en effet, Paris représente 3 % de la baisse de la démographie à l'échelle nationale, alors que le territoire concentre 23 % des suppressions de postes à l'école.

J'ajoute que, parmi les classes qui risquent d'être fermées, très nombreuses sont celles qui sont situées en réseau d'éducation prioritaire (REP), avec des enfants dont les parents ont de tout petits revenus. La qualité de l'enseignement dont ils bénéficient se dégraderait alors considérablement.

Ma question est donc simple : au vu de cette mobilisation, qui s'ancre dans la durée, le Gouvernement compte-t-il revenir sur ces suppressions de postes, notamment dans les zones situées en REP ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Françoise Gatel, ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité. Monsieur le sénateur Ian Brossat, le sujet du taux d'encadrement des élèves et des décisions de fermetures de classe est, de manière générale, sensible sur tous les territoires, particulièrement à cette époque de l'année.

Il l'est aussi, naturellement, dans l'académie de Paris, où la baisse démographique, qui nous touche tous, sera particulièrement sensible à la rentrée prochaine, puisque nous compterons 3 200 élèves en moins pour le seul premier degré. Cette baisse s'accompagne d'une réduction du nombre d'élèves par classe.

Le texte de votre question écrite mentionne le fait que le nombre d'élèves par classe est plus important en France qu'en en Europe. Cependant, pour l'académie de Paris, ce n'est pas tout à fait exact, puisque, au niveau européen, on compte 21 élèves par classe, ce qui correspond aussi à la moyenne française, alors que, à Paris, ce nombre est de 20, donc inférieur.

La lutte contre les inégalités sociales, que vous évoquez, est aussi notre priorité. Mais à Paris, en éducation prioritaire, 8 élèves sur 10, tous niveaux confondus, sont scolarisés dans des classes de moins de 20 élèves. Les fermetures prévues se traduiront donc, non pas par une baisse, mais par une hausse du taux d'encadrement. Nous y sommes attentifs.

Par ailleurs, vous l'avez rappelé, les directeurs des écoles publiques de Paris bénéficient d'un régime dérogatoire de décharges d'enseignement. Depuis 1982, les directeurs des écoles parisiennes sont ainsi déchargés de leurs fonctions d'enseignement, se consacrant totalement à leurs missions de direction, à partir de 5 classes dans l'établissement, contre 13 ailleurs en France.

Ce dispositif dépendait d'un accord avec la Ville de Paris. Or depuis 2019, celle-ci ne contribue plus à ce dispositif, comme vous le savez très bien, monsieur Brossat, compte tenu de vos fonctions locales. Cette décision a entraîné une perte sèche de 116 millions d'euros pour le ministère. La situation qui en résulte est très différente entre Paris et le reste du territoire national.

En septembre, la Cour des comptes a pointé du doigt cet état de fait et a demandé au Gouvernement d'y mettre fin. Le ministère a donc lancé une concertation avec la Ville. Élisabeth Borne a annoncé un moratoire, dont je me doute qu'il a été bien accueilli. Il n'empêche, monsieur le sénateur, que la question reste entière.

M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour la réplique.

M. Ian Brossat. Je remarque tout d'abord que, sur les décharges de directeur, vous avez raison d'affirmer que Paris bénéfice d'un dispositif dérogatoire. Mais rien n'interdit au Gouvernement de l'élargir aux autres villes et départements qui, j'en suis sûr, seront très heureux d'en profiter... (Mme la ministre déléguée rit.)

Ensuite, je rappelle que Paris concentre 3 % de la baisse démographique nationale, pour 23 % des suppressions de poste. C'est dire que le sort qui lui est réservé n'est pas particulièrement favorable.

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