Question de Mme BERTHET Martine (Savoie - Les Républicains) publiée le 20/02/2025
Mme Martine Berthet attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur les difficultés majeures que rencontrent les collectivités en charge de la « Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (GEMAPI) dans le département de la Savoie, auxquelles l'État a transféré la gestion des digues domaniales le 29 janvier 2024.
Malgré plusieurs alertes, notamment par courrier, par question orale et lors de l'audition de Mme la ministre en commission des affaires économiques du Sénat le 13 novembre 2024, la situation demeure inchangée et continue de compromettre la capacité des collectivités à assurer la sécurité des populations et des infrastructures.
Conformément à la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, ce transfert supposait que l'État garantisse, avant la mise à disposition, la mise en conformité des ouvrages avec les exigences réglementaires et légales en vigueur. Or, les collectivités ont dû accepter un transfert « à prendre ou à laisser », sans que ces mises aux normes aient été réalisées, alors même que l'état des digues, souvent très dégradé, requiert d'importants travaux de sécurisation.
Si des subventions sont prévues via le fonds Barnier, leur montant est notoirement insuffisant, et leur plafond fixé à 80 % ne s'applique que pour les dossiers validés avant 2027, seuil après lequel l'aide chute à 40 %. Ce calendrier est totalement irréaliste compte tenu des longues procédures administratives à respecter et des contraintes techniques et environnementales qui encadrent ces travaux.
En Savoie, les 90 km transférés nécessitent près de 110 millions d'euros hors taxe de travaux. La taxe Gemapi, même portée à son maximum, ne permettrait de financer que 14 millions d'euros. De plus, l'obligation d'inscrire ces ouvrages dans l'actif comptable des collectivités alourdit encore leurs charges sans garantie de financement suffisant.
Pour compenser cet écart, le prédécesseur de Mme la ministre, M. Christophe Béchu, s'était engagé à compléter l'aide du fonds Barnier par des subventions supplémentaires afin d'atteindre 95 % du coût des travaux.
Au regard de l'incohérence entre les contraintes imposées et les réalités complexes des vallées alpines, auxquelles doivent faire face nos collectivités, elle souhaiterait savoir si le Gouvernement entend prolonger le taux de subvention à 80 % jusqu'en 2035, comme cela a été accordé à d'autres collectivités en charge de la GEMAPI, et, s'il s'engage à respecter l'engagement pris d'un financement quasi intégral des travaux, malgré les restrictions budgétaires annoncées.
Elle souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur ces points afin d'assurer aux collectivités les moyens nécessaires pour exercer leurs missions en matière de prévention des inondations.
- page 648
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ville publiée le 09/04/2025
Réponse apportée en séance publique le 08/04/2025
M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteure de la question n° 322, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Martine Berthet. J'appelle l'attention du Gouvernement sur les difficultés majeures que rencontrent certaines collectivités chargées de la compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), auxquelles l'État a transféré la gestion des digues domaniales le 29 janvier 2024.
Bien que Mme la ministre chargée de l'environnement ait été alertée à plusieurs reprises, par courrier, par une question orale et lors de son audition, la visibilité financière demeure inchangée pour la deuxième collectivité la plus touchée par ces transferts, le syndicat mixte de l'Isère et de l'Arc en Combe de Savoie (Sisarc). Sa capacité à assurer la sécurité des populations et des infrastructures se trouve ainsi compromise.
La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (Maptam) prévoyait le transfert par l'État de la gestion d'ouvrages mis en conformité avec les exigences réglementaires et légales. Or le Sisarc a dû accepter un transfert « à prendre ou à laisser », sans que ces mises aux normes aient été réalisées, alors même que d'importants travaux de sécurisation étaient nécessaires.
Si des subventions sont prévues via le fonds Barnier, leur montant est insuffisant. Le plafond de 80 % des dépenses ne s'applique qu'aux dossiers validés avant 2027, contre un plafond de 40 % une fois passée cette échéance. Ce calendrier est irréaliste compte tenu de la longueur des procédures administratives, de l'ampleur des travaux, de la nature des contraintes techniques et environnementales et de la disponibilité des entreprises.
Pour le Sisarc, les quatre-vingt-dix kilomètres transférés nécessitent près de 110 millions d'euros hors taxe de travaux. Même portée à son maximum, la taxe Gemapi, jamais revalorisée depuis 2014, ne permettrait de financer que 14 millions d'euros.
Pour compenser cet écart, le ministre d'alors, M. Christophe Béchu, s'était engagé à octroyer des aides supplémentaires permettant d'atteindre 95 % du coût des travaux.
Aussi, madame la ministre, au regard de l'incohérence observée entre les contraintes qui sont imposées à nos collectivités et les réalités auxquelles elles font face, le Gouvernement respectera-t-il l'engagement qu'il a pris de financer quasi intégralement les travaux et de prolonger jusqu'en 2035 l'application du taux de subvention à 80 %, et ce malgré les restrictions budgétaires nécessaires ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Madame la sénatrice Berthet, la taxe Gemapi a été créée, vous le savez, pour donner aux « Gemapiens » les moyens d'exercer leur compétence.
La loi Maptam de 2014 avait prévu une période de transition de dix ans dans le cas des digues domaniales, qui représentent moins de 10 % des digues dans la France entière et dont l'État a poursuivi temporairement la gestion pour le compte des Gemapiens.
Cette période a pris fin le 28 janvier 2024. La très grande majorité de ces ouvrages a été reprise en gestion par les Gemapiens, par voie de convention.
En Savoie, le syndicat mixte de l'Isère et de l'Arc en Combe de Savoie s'est vu confier un linéaire d'ouvrages d'environ soixante et onze kilomètres. Des travaux de réhabilitation sont en cours, financés en totalité par le fonds Barnier, à hauteur de 6 millions d'euros.
D'autres travaux prioritaires ont été programmés par le Sisarc, pour 46 millions d'euros ; le syndicat mixte les financera sans reste à charge grâce aux subventions bonifiées du fonds Barnier à 80 % et à une soulte de 10,5 millions d'euros, dont la moitié a été versée au moment du transfert de gestion.
Si des travaux complémentaires demeurent nécessaires à l'horizon de 2030, le Gouvernement continuera de soutenir le Sisarc via les différents dispositifs de soutien à l'investissement, afin que le reste à charge, une fois optimisées les recettes procurées par la taxe Gemapi, soit aussi réduit que possible.
Par ailleurs, compte tenu du rôle joué par ces ouvrages pour la protection d'infrastructures routières et ferroviaires stratégiques, d'autres contributeurs pourraient être appelés à soutenir leur financement à long terme.
Enfin, l'obligation d'inscrire les ouvrages dans l'actif comptable de la collectivité est une mesure technique sans effets sur ses finances.
- page 4734
Page mise à jour le