Question de Mme ESPAGNAC Frédérique (Pyrénées-Atlantiques - SER) publiée le 16/01/2025

Mme Frédérique Espagnac attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur la fermeture de la pêche dans le Golfe de Gascogne, imposée entre le 22 janvier et le 20 février 2025, pour protéger les petits cétacés.
Cette mesure, confirmée par le Conseil d'État, vise à limiter les captures accidentelles de dauphins et de marsouins, conformément au droit européen. Si la préservation de ces espèces est une priorité, les professionnels de la pêche, notamment les armateurs des navires de plus de 8 mètres, s'inquiètent des répercussions importantes de cette décision sur leur activité et sur l'économie locale.
Elle salue les efforts de protection de la biodiversité mais regrette que cette fermeture soit perçue par les pêcheurs comme un coup supplémentaire porté à leur profession, déjà fragilisée par de nombreuses réglementations récentes. De plus, dans le contexte politique actuel, cette mesure ne permet pas de créer un dialogue mais au contraire souffle sur les braises.
Elle souhaite donc savoir quelles mesures le Gouvernement prévoit pour soutenir financièrement les pêcheurs affectés par cette fermeture, en particulier les petits armateurs fortement dépendants des zones concernées.
Elle demande quels dispositifs d'accompagnement seront proposés pour aider les pêcheurs à adopter des pratiques réduisant les captures accidentelles, comme l'intégration de technologies de détection ou de répulsion des cétacés.
Enfin elle interroge le Gouvernement pour savoir comment il envisage de renforcer le dialogue entre les autorités, les scientifiques, les associations environnementales et les professionnels, afin que de futures décisions soient mieux acceptées par l'ensemble des acteurs concernés.

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Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 03/04/2025

Par décisions du 20 mars 2023 et du 22 décembre 2023, le Conseil d'État a enjoint au Gouvernement de prendre des mesures pour limiter les captures accidentelles de petits cétacés par les activités de pêche dans le golfe de Gascogne, afin de garantir un état de conservation favorable pour le dauphin commun au titre de la directive européenne pour la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage. Ces mesures incluant une période de fermeture de la pêche, le Gouvernement a pris un arrêté établissant une fermeture de la pêche du 22 janvier au 20 février pour les années 2024, 2025 et 2026 pour les navires équipés d'engins de pêche à risque. La mesure a été étendue aux navires européens et du Royaume-Uni équipés des mêmes engins. Le premier bilan environnemental de la fermeture en 2024, réalisé par l'institut Pelagis, met en évidence une réduction des captures accidentelles sur la période hivernale du 1er décembre 2023 au 31 mars 2024, avec une estimation de 1 450 mortalités par captures accidentelles contre 5 800 en moyenne les 5 années précédentes (réduction de -75 % des captures accidentelles de dauphin commun). Afin d'accompagner la filière de la pêche, le Gouvernement a mis en place un soutien économique pour les pêcheurs contraints de s'arrêter et pour les mareyeurs impactés. L'État a ainsi indemnisé les navires touchés par la fermeture du Golfe de Gascogne à hauteur de 80 % du chiffre d'affaires perdu pour les chalutiers et 85 % pour les fileyeurs et senneurs, ce qui a permis de prendre en charge la totalité des pertes, la part restante non couverte correspondant aux frais variables non supportés lorsque le navire est à l'arrêt (comme les frais de carburant ou l'usure du matériel). 288 navires ont reçu des aides à hauteur de 16,3 millions euros en 2024. L'État, via l'Établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer), a veillé à ce que le paiement des indemnités soit réalisé au plus vite après réception des dossiers et vérification du respect des obligations liées à la fermeture de la pêche. Les cas particuliers, tel que les entrées en flotte tardives de nouveaux navires ne disposant pas des 120 jours de mer qui constituent la durée minimale d'activité nécessaire à l'éligibilité au niveau européen, ont par ailleurs bien été pris en compte. Les entreprises de mareyage ont également bénéficié d'un dispositif d'accompagnement, à hauteur de 2,6 Meuros pour 43 dossiers déposés. Toutes ces modalités qui ont permis de soutenir les entreprises impactées sont reconduites en 2025. Pour les pêcheurs, un nouveau dispositif d'arrêt temporaire, validé par la Commission européenne, a ouvert le 24 février, tandis que le régime en faveur des entreprises de mareyage a été validé plus tardivement par la Commission européenne et sera ouvert dans les prochaines semaines. L'État est particulièrement attentif à l'évaluation de l'impact socio-économique de ces fermetures spatio-temporelles sur l'ensemble de la filière. Deux études commandées auprès de l'Ifremer et du LEMNA (Université de Nantes) permettront d'analyser plus finement les impacts sur les flottilles et sur les revenus des pêcheurs. A ce stade, il ressort que les pertes de valeurs débarquées ont été globalement compensées, bien que des disparités soient constatées selon les flottilles et les activités de pêche. Certaines catégories de navire présentent en effet plus de difficulté à compenser la fermeture par une diversification de leur activité de pêche. Les disparités constatées sont également la conséquence d'une succession de crise liées au contexte de ces dernières années, sans lien direct avec la fermeture du Golfe de Gascogne (diminution des stocks, Brexit, prix du carburant, arrêts temporaires soles, etc.). Suite aux négociations européennes conduites au cours de l'année 2024, un règlement délégué européen publié le 9 décembre 2024 a imposé en 2025 la fermeture de la pêche pour tous les navires, français et étrangers, de plus de 8 mètres utilisant des chaluts pélagiques, des chaluts boeufs de fond, des sennes pélagiques, des filets maillants calés, des trémails ou des trémails et filets maillants combinés. Dans l'optique de mettre fin à cette fermeture de la pêche à partir de 2027, le Gouvernement a pris un nouvel arrêté le 13 décembre 2024 pour mettre en oeuvre une expérimentation visant à améliorer les connaissances et la collecte de données sur les captures accidentelles de mammifères marins et à évaluer l'efficacité de dispositifs techniques de réduction des captures accidentelles de dauphin commun. Cette expérimentation implique l'installation de caméras sur 100 fileyeurs et 15 chalutiers, avec un renforcement des observateurs scientifiques embarqués. Deux dispositifs techniques sont également testés sur 160 navires (65 navires pour les balises bio-inspirées DOLPHINFREE sur les filets et 95 navires pour les pingers PIFIL fixés sur la coque et émettant un signal autour du navire au moment du filage ou de la remontée du filet). D'autres dispositifs sont étudiés en parallèle, tels que les réflecteurs acoustiques sur les filets ou la mise en place d'équipement sur les parties hautes des filets droits et trémails. Enfin, le projet de recherche DELMOGES, développé par les universités de la Rochelle-CNRS, de Bretagne-Ouest, l'Ifremer et le comité national des pêches maritimes et des élevages marins, permet de contribuer à l'amélioration des connaissances sur les dauphins communs. Lancé en mars 2022 pour une durée de 3 ans, il vise à apporter de nouvelles connaissances sur les mécanismes à l'origine des mortalités par capture accidentelle de dauphins communs dans le Golfe de Gascogne, indispensable pour l'adaptation des mesures de gestion. L'État a veillé à assurer un dialogue avec les parties prenantes tout au long de la mise en place du plan d'action, en particulier pour favoriser l'acceptation de l'expérimentation et de l'équipement et suivre sa mise en oeuvre. Un comité de pilotage « Expérimentation » se réunit ainsi tous les 15 jours avec les différents services de l'État concernés, les professionnels, les scientifiques, et les opérateurs techniques des dispositifs actuellement testés, afin de suivre l'avancement des équipements et l'exécution du plan et résoudre les difficultés éventuelles. L'objectif est d'avancer rapidement sur les améliorations pratiques ou de prévoir des évolutions techniques dans les actions de recherche à moyen terme, afin de trouver des solutions pérennes qui permettent de ne plus avoir de fermetures de la pêche en hiver. Par ailleurs, la DGAMPA et la DEB animent un groupe de travail national créé spécifiquement pour travailler à la réduction des captures accidentelles de petits cétacés. Il se réunit au moins une fois par an et rassemble les professionnels, les scientifiques, les opérateurs techniques, les services de l'État, ainsi que certaines ONG actives sur le sujet.

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