Question de Mme ARTIGALAS Viviane (Hautes-Pyrénées - SER) publiée le 24/11/2022
Question posée en séance publique le 23/11/2022
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, le « pacte de confiance » désigne le nouveau dispositif de limitation des dépenses de fonctionnement des collectivités proposé par le Gouvernement. Derrière cette formule, on distingue très nettement l'esprit des contrats de Cahors, en pire ! Tant et si bien que, sur le terrain, il est renommé : « pacte de défiance ».
La démarche du Gouvernement se vit dans les territoires, qu'ils soient de banlieue, urbains ou ruraux, comme une recentralisation diffuse du fonctionnement des collectivités territoriales, dont l'État grignote de plus en plus les prérogatives.
La transformation des impôts locaux directs en compensations supprime la fiscalité dynamique des communes, entraîne une dépendance financière à l'égard de l'État et révèle la volonté sous-jacente de prendre la main sur les politiques locales.
Cet état d'esprit jacobin remet en cause le principe constitutionnel de libre administration des collectivités.
Alors que le Gouvernement se dit engagé dans un nouvel acte de décentralisation, les services de l'État, nationalement et localement, surinterprètent souvent les textes ou règlements, au détriment des exécutifs locaux. Auparavant, l'État accompagnait les maires pour réaliser leurs projets, mais nous sommes passés à la méthode de l'injonction ; désormais, nous en sommes à la contrainte.
Les maires ne sont pas les simples exécutants des priorités de l'État. Monsieur le ministre, allez-vous favoriser l'accompagnement des collectivités, leur faire confiance et stopper cette mise à mal du principe de décentralisation voulu par la loi de 1982 ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe CRCE. M. Alain Chatillon applaudit également.)
Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement publiée le 24/11/2022
Réponse apportée en séance publique le 23/11/2022
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice Viviane Artigalas, pour compléter ce que vient de dire mon collègue Roland Lescure, je dirai que la plus belle preuve d'autonomie fiscale d'un maire, c'est de baisser systématiquement les impôts, comme je l'ai fait pendant onze ans, respectant ainsi mes engagements. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)
Mme Sophie Primas. Mais on ne peut pas !
M. Olivier Klein, ministre délégué. Le Gouvernement a fait le choix d'introduire le « pacte de confiance » dans le PLF pour 2023, sous la forme d'un rapport du Gouvernement au Parlement. Tous les acteurs publics, État comme collectivités territoriales, doivent participer à l'effort collectif pour rétablir les comptes de la Nation. Il y va de la crédibilité de notre pays à l'égard de nos partenaires européens. C'est le sens des trajectoires budgétaires inscrites en loi de programmation des finances publiques. Nous serons bien sûr attentifs aux débats qui se dérouleront ici, au Sénat, sur le sujet. Vous savez que le Gouvernement est à l'écoute des collectivités territoriales, donc de vous-mêmes, mesdames, messieurs les sénateurs, qui les représentez.
La suppression de la CVAE aura lieu en deux ans. Elle s'accompagne évidemment d'une compensation pour les collectivités concernées, c'est-à-dire le bloc communal et les départements. Cette compensation a fait l'objet de nombreux échanges avec les associations d'élus, en particulier l'Assemblée des départements de France (ADF) sur la partie départementale.
Je le répète, le PLF pour 2023 prévoit actuellement la compensation à l'euro près par une part de TVA dynamique.
M. François Bonhomme. C'est faux !
M. Olivier Klein, ministre délégué. Par ailleurs, l'État ne conservera pas un euro de la CVAE qui aurait dû être versée aux collectivités en 2023. Elle sera territorialisée pour le bloc communal et forfaitisée pour les départements, comme je l'ai rappelé tout à l'heure.
Enfin, il ne s'agit pas de réduire l'autonomie des collectivités. Nous passons d'un système de CVAE nationale, répartie selon des critères de territorialisation, à un autre impôt national et non pas à une dotation qui serait répartie selon les mêmes critères.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, vous ne vous rendez pas compte de la nécessité de faire confiance aux élus locaux. Le Président de la République lui-même s'est engagé, le 10 octobre dernier, à mener réellement la décentralisation. Il vous reste à passer aux actes, ce qui doit vous conduire à nous proposer une grande loi sur les libertés locales et sur tous les moyens qui vont avec, selon le principe simple du « qui décide paie, qui paie décide ». Si vous souhaitez réindustrialiser nos territoires et assurer la transition écologique de notre pays, il vous faut entendre les élus locaux, car vous ne pourrez pas faire sans eux. Ils demeurent incontournables, comme l'a démontré la gestion de la crise sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. Mme Laurence Cohen applaudit également.)
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