Question de Mme LE HOUEROU Annie (Côtes-d'Armor - SER) publiée le 17/11/2022

Question posée en séance publique le 16/11/2022

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Annie Le Houerou. Monsieur le ministre de la santé et de la prévention, souvent tabous, les troubles psychiques concernent 13 millions de personnes : un Français sur cinq en souffre.

Il s'agit du premier poste de dépense de l'assurance maladie, devant les cancers. La souffrance psychique conduit chaque année, en France, à 200 000 tentatives de suicide, avec 9 000 issues fatales, soit un taux de suicide parmi les plus élevés d'Europe. De nombreux décès sont évitables, pourtant.

En 2017, Agnès Buzyn, ministre de la santé, reconnaissait « l'abandon de la psychiatrie ». Cinq ans après, rien n'a changé !

Monsieur le ministre, vous avez la responsabilité de la santé, mais aussi de la prévention. Un repérage précoce et une prise en charge adaptée amélioreraient la qualité de vie des patients.

Vous me direz que, depuis 2022, l'assurance maladie rembourse les consultations de psychologue dès l'âge de 3 ans. C'est une avancée, mais elle est loin d'être à la hauteur des attentes. Parent pauvre de la médecine, aujourd'hui sinistrée, la psychiatrie publique manque d'argent et d'effectifs : 30 % des postes de psychiatres hospitaliers sont vacants et le nombre de postes d'infirmiers non pourvus a doublé entre 2019 et 2022.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 n'apporte aucune mesure pour sortir la psychiatrie de cette situation. Le nombre de patients augmente et augmentera en raison du covid-19. La prise en charge de ceux-ci se dégrade. L'usage des psychotropes et des mesures de contention augmente, dénoncé par les médecins eux-mêmes, qui n'ont pas d'autre choix.

Les soignants sont en grande difficulté. Des enfants et leurs parents souffrent du manque d'accompagnement, alors que les files d'attente s'allongent dans les centres médico-psychologiques et médico-psycho-pédagogiques. Depuis des années, les professionnels tirent la sonnette d'alarme. Ils sont à bout.

Monsieur le ministre, quelle est la stratégie du Gouvernement pour répondre aux besoins de soins urgents en psychiatrie publique, notamment pour les enfants et adolescents ? Quel est votre projet de prévention sur le long terme pour les maladies psychiques ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Patricia Schillinger et M. Xavier Iacovelli applaudissent également.)


Réponse du Ministère de la santé et de la prévention publiée le 17/11/2022

Réponse apportée en séance publique le 16/11/2022

M. le président. La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Le Houerou, les personnels de psychiatrie exercent dans des conditions difficiles, qui se sont encore accentuées, nous le savons tous, à l'issue de la crise de la covid-19, qui a accru la détérioration de la santé mentale, y compris chez les enfants, ce qui est inquiétant. Je rends hommage au travail qui est fait par l'ensemble de ces professionnels.

La volonté de ce Gouvernement est que nos concitoyens aient tous accès à la prévention et aux soins. C'est l'objet de la refondation et de la réforme que je souhaite conduire. Les Assises de la psychiatrie et de la santé mentale se sont déroulées l'année dernière, et nous allons en faire le bilan très prochainement. Le dispositif MonPsy, qui donne accès à des psychologues cliniciens, montre tout son intérêt, tout comme la mise en place du numéro national de prévention du suicide.

Des enveloppes financières importantes et pérennes ont été mises en place depuis 2018, et seront prolongées dans les années qui viennent, à destination, entre autres, des établissements de psychiatrie, qui doivent être réformés.

De façon structurelle, la psychiatrie subit les mêmes problèmes d'attractivité et de perte de sens que l'hôpital. Les solutions mises en place dans le cadre de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), en particulier pour l'hôpital, seront bénéfiques pour la psychiatrie.

Sur le plan structurel, il y a plusieurs problèmes et deux combats à mener. Le premier combat se joue au niveau territorial, et consiste à travailler sur le maillage de l'accès aux soins non programmés et sur l'attractivité. Il est conduit dans le cadre des conseils nationaux de la refondation (CNR) territoriaux. Le second, au niveau national, consiste à accroître le nombre d'infirmiers en pratique avancée (IPA), à rendre plus facile l'accès aux psychologues, à réformer le financement pour une meilleure équité entre les territoires et les autorisations pour améliorer le maillage du territoire.

Nous avons intégré le cas particulier de la pédopsychiatrie aux travaux en cours avec les professionnels sur la santé de l'enfant et la pédiatrie et nous publierons une feuille de route au début du printemps. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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