Question de M. VERZELEN Pierre-Jean (Aisne - Les Indépendants) publiée le 27/10/2022

M. Pierre-Jean Verzelen attire l'attention de M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur l'absence de statut propre aux aidants.

En France, 8,3 millions de personnes accompagnent au quotidien un proche malade, en situation de handicap ou de dépendance. Les aidants apportent une contribution majeure à notre société. L'aide entre proches n'est pas un phénomène nouveau mais se développe dans une société marquée par certaines évolutions (multiplication des maladies chroniques, évolution des modes de vie) .

Eu égard à l'ampleur du phénomène, l'État doit reconnaître pleinement le rôle des aidants dans la société. C'est notamment leur reconnaître des droits fondamentaux : permettre à l'aidant de conserver son lien initial avec l'accompagné et permettre à l'aidant de conserver son lien à la société sans le réduire à son rôle d'aidant.

En effet, dans certains cas, notamment lorsqu'il s'agit d'enfant malade, le ou les parents sont dans l'obligation de quitter totalement leur emploi dans la mesure où un temps partiel est difficilement envisageable lorsque l'on souhaite répondre à tous les besoins de l'enfant. L'isolement et le repli sur soi peuvent être une conséquence du rôle de l'aidant.

Les aidants ont eux aussi besoin d'être aidés, d'être informés, d'être soutenus et d'être formés. Il est primordial pour l'aidant de pouvoir inscrire son expérience dans un parcours.

Or, les droits reconnus aux aidants sont souvent conditionnés par plusieurs critères. C'est le cas pour bénéficier des droits à la retraite, notamment pour l'assurance vieillesse du parent au foyer. Ce dispositif garantit une continuité dans la constitution des droits à la retraite des personnes qui cessent ou réduisent leur activité professionnelle pour s'occuper d'un ou plusieurs enfants ou d'une personne en situation de handicap. Toutefois, cette assurance n'est déclenchée que si la personne ou l'enfant présente au moins 80 % d'incapacité permanente (enfant ou adulte pour lequel la maison départementale des personnes handicapées, MDPH, a émis un avis motivé sur la nécessité de bénéficier à domicile de l'assistant d'un parent).

Autrement dit, la situation peut s'avérer extrêmement difficile lorsque l'enfant ou la personne proche n'atteint pas de justesse ce seuil de 80 %. Pourtant bel et bien dans des situations similaires, l'aidant dans ce cas ne peut prétendre à bénéficier de cette gratuité d'affiliation.

Aussi, il souhaite connaître les mesures envisagées par le Gouvernement afin d'inclure plus largement l'ensemble des aidants à bénéficier des droits qui leur sont dus.

- page 5233

Transmise au Ministère du travail, de la santé et des solidarités


Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargé de l'enfance, de la jeunesse et des familles publiée le 20/03/2024

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2024

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la question n° 235, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

M. Pierre-Jean Verzelen. Madame la ministre, je veux aborder un sujet qui ne fait pas forcément la une du journal de vingt heures, mais qui concerne de nombreuses personnes dans la société. Il fait partie de ces questions à bas bruit qui font le quotidien des familles et concerne les aidants et les proches aidants.

Les chiffres donnent le vertige : 8,3 millions de personnes seraient concernées, à des degrés très différents, depuis l'enfant qui va aider ses parents pendant quelques heures jusqu'à la personne qui renonce presque totalement à sa vie professionnelle pour accompagner son enfant handicapé. En la matière, nous ne nous posons pas en donneurs de leçons, car les chiffres explosent depuis quelques années il faut apporter pratiquement autant de solutions qu'il existe de situations ; rien ne se ressemble en la matière.

J'ai été, certainement comme nombre de mes collègues, sollicité lors de mes permanences par des familles, notamment par des mères, souvent seules, qui font face à cette situation avec toute la volonté, la force et l'engagement d'un parent pour son ou ses enfants. Elles se sentent souvent démunies, découragées, parce qu'elles ont l'impression de faire face à un mur de l'administration et d'être confrontées à des difficultés logistiques et financières, même si celles-ci sont évidemment bien secondaires au regard de ce qu'elles vivent.

J'aimerais que vous fassiez un point sur les avancées obtenues, ainsi que sur les travaux qui sont prévus.

Tout d'abord, sur la reconnaissance du statut d'aidant. La question peut paraître symbolique, mais il faut savoir que, dans les documents administratifs - je pense, par exemple, à la déclaration de revenus -, ce statut n'existe pas.

Ensuite, sur la prise en charge, pour permettre d'assumer, à la fois, un emploi pendant quelques heures dans la semaine et l'accompagnement de son enfant, ce qui pose la question des structures d'accueil de jour.

Enfin, sur les retraites, un sujet sur lequel j'aimerais que vous reveniez.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, de la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et du garde des sceaux, ministre de la justice, chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles. Monsieur le sénateur Verzelen, votre question touche toutes les familles : se retrouver dans la situation d'aidant ou de proche aidant peut en effet arriver à tout le monde, à n'importe quel moment de la vie, en raison d'un accident survenu à un proche, du vieillissement ou de la perte d'autonomie de celui-ci, ou encore du handicap d'un enfant, comme vous l'avez souligné à raison.

Vous avez évoqué le chiffre de plus de 8 millions d'aidants ou de proches aidants dans notre pays. Aujourd'hui, nous avons même dépassé la barre des 9 millions, et leur nombre atteindra 20 millions en 2060.

De nombreuses avancées ont été enregistrées : je pense notamment, dans le cadre de la première politique nationale interministérielle spécifiquement dédiée aux aidants, à la création de l'allocation journalière du proche aidant (AJPA), indexée sur le Smic, à la refonte du congé proche aidant, que nous avons élargi à davantage de bénéficiaires, à la création de solutions de répit ou encore à la validation des acquis de l'expérience (VAE).

Vous avez évoqué la vie de ces aidants, confrontés aux difficultés administratives, et la question des parents d'enfants malades. La loi renforçant la protection des enfants malades a notamment permis de protéger les salariés en congé de présence parentale contre le licenciement et de supprimer la condition d'accord explicite du service du contrôle médical pour renouveler l'allocation journalière de présence parentale (AJPP).

Vous m'avez aussi interrogée sur les droits à la retraite des aidants : là aussi, nous avons avancé, en créant, pour les proches des personnes en situation de handicap, l'assurance vieillesse des aidants (AVA), ouverte à un plus grand nombre de bénéficiaires depuis le 1er septembre 2023.

Il faut cependant continuer à travailler pour la reconnaissance et l'accompagnement des aidants. C'est pourquoi nous avons lancé, en octobre dernier, une nouvelle stratégie 2023-2027, élaborée en concertation avec les principales associations d'aidants et les administrations compétentes - puisque vous avez évoqué les difficultés administratives.

Cette stratégie repose sur trois piliers ; tout d'abord, communiquer, repérer et informer, car les proches aidants ne connaissent pas leurs droits et n'y ont donc pas recours ; ensuite, renforcer l'offre et l'accès au répit, en permettant aux aidants d'en bénéficier ; enfin, soutenir les aidants tout au long de la vie.

- page 1841

Page mise à jour le