Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - Les Républicains) publiée le 20/10/2022
M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les inquiétudes partagées par les producteurs de pommes de terre sur leurs récoltes 2022.
L'été exceptionnellement chaud et sec que nous avons connu n'en finit pas de révéler ses conséquences désastreuses sur notre agriculture. Après les vignobles, c'est la filière de la pomme de terre qui accusera cette année une baisse moyenne de 20 % de son rendement en raison des effets de la chaleur sur les cultures. Les pertes devraient s'avérer encore plus dramatiques pour les petits producteurs ne disposant pas de système d'irrigation.
En ajoutant à cela les effets de l'inflation sur les coûts de production et l'explosion des tarifs de l'énergie, c'est une baisse sans précédent de la superficie totale cultivée qui devrait poindre en 2023.
L'union nationale des producteurs de pommes de terre, qui avait été reçue au ministère de l'agriculture début septembre 2022, a exprimé le souhait qu'un dispositif de sauvegarde soit mis en place sous la forme d'un prêt garanti par l'État engagé sur les seules surfaces plantées en 2023 et remboursable en fin de campagne.
Une hausse des aides couplées à hauteur de 500 euros par hectare serait aussi susceptible de sauver de la faillite nombre de petits producteurs pris à la gorge par l'accumulation des imprévus.
L'assurance récolte sur les aléas climatiques prévue par la loi du 2 mars 2022 aurait pu jouer le rôle d'un matelas de protection tout à fait rassurant. Celle-ci ne prendra pourtant effet qu'à compter du 1er janvier 2023, quelques mois trop tard pour couvrir les pertes subies à l'été 2022 à tout le moins pour les producteurs qui auraient déjà été couverts par l'assurance.
Dans sa région des Hauts-de-France, qui concentre 64 % de la production nationale de pommes de terre, la demande est forte pour qu'un accompagnement financier salutaire soit mis en place pour la filière. C'est pourquoi il lui demande quels instruments pourraient être apportés dans la période transitoire qui précèdera la pleine application de la garantie climatique sur les récoltes.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire publiée le 26/10/2022
Réponse apportée en séance publique le 25/10/2022
Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 223, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le ministre, les producteurs de pommes de terre ne cachent pas leur préoccupation concernant les récoltes de l'année 2022.
En effet, l'été exceptionnellement chaud et sec que nous avons connu n'en finit pas de révéler ses conséquences désastreuses sur notre agriculture. Après les viticulteurs et les producteurs de lait, que nous venons d'évoquer, c'est au tour des producteurs de pommes de terre de tirer la sonnette d'alarme quant aux pertes prévisionnelles qui seront endurées au titre de la prochaine récolte. Leur filière accusera cette année une baisse moyenne de 20 % de son rendement en raison des effets de la chaleur sur les cultures. Les chiffres devraient se révéler encore plus dramatiques pour les producteurs qui ne disposent pas d'un système d'irrigation.
Ajoutons-y les effets de l'inflation sur les coûts de production et l'explosion des tarifs de l'énergie, et c'est une baisse sans précédent de la superficie totale cultivée qui devrait poindre en 2023.
L'Union nationale des producteurs de pommes de terre, que vous aviez reçue au ministère de l'agriculture au début du mois de septembre, a exprimé le souhait qu'un dispositif de sauvegarde soit mis en uvre sous la forme d'un prêt garanti par l'État engagé sur les seules surfaces plantées en 2023 et remboursable en fin de campagne.
Une hausse des aides couplées à hauteur de 500 euros par hectare serait par ailleurs susceptible de sauver de la faillite nombre de petits producteurs pris à la gorge par l'accumulation des imprévus.
Le régime universel d'indemnisation des pertes de récoltes résultant d'aléas climatiques prévu par la loi du 2 mars 2022, que le Sénat a très largement marqué de son empreinte, aurait amplement suffi à compenser les pertes et assuré une protection salutaire aux agriculteurs. Celui-ci ne prendra effet qu'à compter du 1er janvier 2023, soit quelques mois trop tard pour couvrir les pertes subies à l'été 2022 par les producteurs assurés.
Quels instruments transitoires pourrait-on donc mobiliser, monsieur le ministre, pour compenser les pertes des producteurs de pommes de terre ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Lefèvre, votre question vient éclairer d'un nouveau jour le problème soulevé par les orateurs qui vous ont précédé. Vous l'avez dit : troisième filière évoquée, troisième occasion de traiter des difficultés liées au dérèglement climatique et aux aléas climatiques.
J'ai en effet rencontré les organisations de producteurs de pommes de terre, personnellement ou par l'intermédiaire de mon cabinet, pour essayer de trouver un chemin.
Pour ce qui est de la production, les nouvelles sont moins mauvaises, malgré tout, qu'on ne le craignait initialement. L'inquiétude, vous l'avez dit, porte avant tout sur l'année prochaine. La remise en culture pourrait susciter de graves difficultés, puisque la production va diminuer, selon nos évaluations, de 9 % par rapport à 2021 et de 6,5 % par rapport à la moyenne quinquennale 2017-2021.
Cette situation appelle différentes réponses.
Concernant la sécheresse, compte tenu du déroulement de la récolte, un nouvel examen de la situation dans les prochaines semaines est à privilégier. Nous allons identifier ceux qui peuvent être indemnisés par les dispositifs classiques.
Vous avez évoqué la piste d'un PGE spécifique. Nous y avons travaillé avec Bruno Le Maire et ses services. Pour être tout à fait clair avec vous, aucune voie ne nous semble praticable sur ce terrain-là. S'agissant d'un sujet climatique, la création d'un nouveau PGE, sur le modèle du « PGE covid » et du PGE du « plan de résilience Ukraine », dit PGE résilience, ne nous paraît pas l'instrument adéquat. Par ailleurs, la porte serait ainsi ouverte pour d'autres filières, ce qui représenterait une difficulté supplémentaire.
Nous avons en revanche orienté les professionnels vers les aides du dispositif de prise en charge de cotisations du plan de résilience Ukraine, dit PEC résilience, doté d'une enveloppe de 150 millions d'euros, et j'ai demandé que soit expertisée cette option.
Nous continuons à travailler à la recherche de solutions pour parer à l'augmentation des coûts énergétiques, qui produit un effet ciseaux. Je pense notamment aux sujets de réfrigération : un régime d'aide qui permettra le maintien au frais des récoltes de pommes de terre est en cours de notification.
Voilà pour les éléments de court terme. Je dis un mot, pour conclure, des réponses que nous pouvons apporter à moyen et long terme.
Vous avez parlé de l'assurance récolte. À cet égard, je voudrais saluer le travail réalisé, en particulier au Sénat, pour instaurer en un temps record un dispositif robuste loi promulguée au mois de mars, entrée en vigueur au 1er janvier , qui, certes, ne concerne pas les exploitants touchés par les sinistres de cette année.
Il nous faut maintenant travailler à un autre sujet : face à des difficultés comme celles que nous rencontrons cette année, la meilleure des résiliences pour le monde agricole, au-delà de l'assurance récolte, consiste à garantir l'accès à l'eau.
Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.
M. Antoine Lefèvre. Je vous remercie, monsieur le ministre. Toutes les mesures prises pendant la période du covid-19 avaient permis de maintenir à flot le monde agricole ; un petit effort reste à faire pour que l'on puisse voir l'avenir, notamment l'exercice 2023, sous de bons auspices.
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