Question de M. CANÉVET Michel (Finistère - UC) publiée le 22/09/2022
M. Michel Canévet attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur les suites de la « mission Mérignac ».
Cette mission conjointe d'inspection et de fonctionnement, dont les conclusions ont été rendues en juin 2021, fait suite aux faits survenus à Mérignac le 4 mai 2021, à savoir le meurtre d'une femme par son mari, déjà condamné pour violences conjugales, qui l'a blessée par balle avant de la brûler vive dans la rue. Un mois et demi plus tôt, cette victime avait porté plainte une nouvelle fois contre cet homme dont elle était séparée.
Un certain nombre de dysfonctionnements avaient alors été mis en lumière. Cette suite de défaillances et de négligences des services de police et de justice n'avaient pas permis d'empêcher le meurtre de cette femme.
Au terme d'une mission menée conjointement par l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale de la justice, -un rapport interne de l'inspection générale de la police nationale (IGPN) a également été remis en octobre 2021 concernant ces faits- 12 recommandations concrètes ont été présentées en juin 2021. Parmi celles-ci, l'on trouve notamment la systématisation de l'information de la victime à tous les stades de la procédure pénale, l'attribution d'un téléphone grave danger, la fusion de la grille d'évaluation du danger avec la grille d'évaluation personnalisée des victimes (EVVI) ou encore l'accès et le partage par tous les services compétents du futur fichier des auteurs de violences conjugales.
Concrètes et prenant en compte les réalités judiciaires, policières ainsi que l'action des associations de lutte contre les violences faites aux femmes, ces mesures ont été, dans leur ensemble, bien accueillies. Pour autant, ce rapport ne prévoyait pas de « clause de revoyure ».
Aussi, il lui demande si un bilan a été dressé, un an après, quant à ces 12 recommandations et, dans l'affirmative, quelles en sont les conclusions. Il lui demande également quelles sont les mesures qui ont été mises en œuvre, celles qui sont en cours et celles qui ne le sont pas encore.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 12/01/2023
La lutte contre les violences conjugales reste une priorité d'action du Gouvernement. Les recommandations issues du rapport de la mission conjointe d'inspection et de fonctionnement intervenue à la suite des faits survenus à Mérignac ont été suivies de l'adoption de mesures spécifiques, visant à renforcer la protection des victimes, le suivi des auteurs et la circulation des informations entre les acteurs. La mise en uvre de ces mesures fait l'objet d'un suivi précis. Entre le 9 juin 2021 et le 21 avril 2022, 4 circulaires et 3 dépêches ont fixé les grandes orientations du ministère en matière de lutte contre les violences conjugales : protection et accompagnement de la victime à tous les stades de la procédure ; politique de juridiction en faveur du décloisonnement des acteurs ; évaluation du danger et suivi renforcé des auteurs de violence conjugales. A titre liminaire, il importe de relever que certaines recommandations du rapport étaient déjà satisfaites à la date de sa publication. En effet, une forte politique d'incitation des parquets au recours au téléphone grand danger a continuellement accompagné l'assouplissement du cadre d'octroi de ce dispositif de protection. Au 2 septembre 2022, 4 367 TGD étaient déployés dans les juridictions dont 3 183 TGD étaient actifs (contre 1593 TGD déployés dont 1177 attribués au 5 octobre 2020). De même, les dépêches des 19 et 27 mai 2021 incitaient déjà les parquets à requérir davantage de bracelets anti-rapprochement (BAR), à tous les stades de la procédure et notamment dans le cadre post-sententiel. Au 3 octobre 2022, 82% des BAR étaient prononcés en post-sententiel. Dans la continuité de la circulaire du 28 janvier 2020, qui invitait les juridictions à évaluer la dangerosité des auteurs de violences conjugales, et de la dépêche du 19 mai 2021, qui préconisait de procéder à un état des lieux conjoint des magistrats du parquet et du SPIP, en lien avec le service de l'application des peines, de tous les dossiers post-sentenciels de violences conjugales, le partage d'information concernant les acteurs ayant à connaître de situations de violences conjugales a été renforcé. Au sein des juridictions, cette recommandation s'est traduite par la généralisation des COPIL VIF au sein de chaque ressort de juridiction préconisée par le rapport a été annoncée avec la circulaire du 7 septembre 2021, laquelle rappelle les termes de la dépêche du 27 mai 2021 appelant à la généralisation, au sein de chaque juridiction, de la tenue d'un comité de pilotage unique, se substituant aux COPIL TGD et dédié aux violences intrafamiliales (COPIL VIF), afin d'assurer un suivi particulier des situations individuelles à risque. Par ailleurs, l'information de la victime de violences conjugales est désormais effective à tous les stades de la procédure pénale. Dans la continuité des dispositions applicables au stade de l'exécution de la peine et à la suite de la dépêche du 19 mai 2021 préconisant une systématisation de l'information de la victime de violences conjugales sur la date de libération du condamné, le décret du 24 décembre 2021 applicable au 1er février 2022 et la circulaire du 28 février 2022 relative à son application indiquent, aux termes d'un nouvel article D.1-11-2 du code de procédure pénale, que l'autorité judiciaire doit aviser la victime d'infractions commises au sein du couple avant toute décision d'élargissement, même temporaire, de la sortie de détention d'une personne poursuivie ou condamnée. En outre, suivant une recommandation du rapport, une rationalisation de l'évaluation dite initiale a été opérée, en janvier 2022, grâce à l'élaboration d'une unique Grille d'évaluation du danger. Ce dispositif a été relayé auprès des juridictions dans une dépêche du 13 janvier 2022. Enfin, tenant compte de la dernière recommandation du rapport, un groupe de travail commun aux ministères de la justice et de l'intérieur, débuté en octobre 2021, détermine actuellement les conditions de la création d'un fichier des auteurs de violence conjugale, dit FPVIF (fichier de prévention des violences intrafamiliales). Ce fichier est destiné à disposer d'une vision exhaustive des situations de violence conjugale, mais aussi d'un outil partagé actualisé en fonction des actions policières menées, avec déclenchement de mesures d'accompagnement et de prévention soit par la justice, soit par les forces de sécurité intérieure.
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