Question de Mme DUMAS Catherine (Paris - Les Républicains) publiée le 15/09/2022

Mme Catherine Dumas appelle l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur l'impact économique et social dramatique que pourrait avoir une décision trop drastique des mesures d'économie d'énergie envisagées par l'État.

Elle indique que sa récente visite du salon « Maison et Objet » fait ressortir une réelle inquiétude des entreprises françaises, notamment du secteur des arts de la table, vis-à-vis des sanctions et limitations énergétiques déjà évoquées par le Gouvernement.

Elle souligne que l'imprécision sur le calendrier et le montant de la pénalité pour dépassement du quota alloué est anxiogène pour beaucoup d'entreprises et métiers d'art.

Elle note l'éventualité d'un arrêt total des productions d'entreprises grosses consommatrices de gaz et souhaite savoir si cette éventuelle décision pourrait souffrir d'exemptions pour les entreprises pour lesquelles le gaz est un élément déterminant du prix de revient, ce qui est le cas notamment des porcelainiers, verriers, fabricants de cocottes en fonte.

Si l'arrêt de production s'avérait inéluctable, elle lui demande si le chômage partiel qui en résulterait serait pris en charge à 100 % par l'État.

Elle souhaiterait savoir, si des délestages sont nécessaires, en plus du plan de réduction de la consommation, si les verriers, porcelainiers et fondeurs de cocotte seront protégés de coupures qui endommageraient irrémédiablement leur outil de travail.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 16/02/2023

La décision de la Russie de réduire fortement les exportations de gaz vers l'Europe revient à supprimer environ 40 % de l'approvisionnement en gaz de l'Union européenne. Le Gouvernement a mis en place, y compris de manière coordonnée au sein de l'Union européenne, plusieurs mesures pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en gaz pour l'hiver 2022-2023 et pour les hivers suivants. Ainsi les stockages ont été remplis à 100 % au début de l'hiver, ce qui représente 130 TWh soit plus de 25 % de la consommation annuelle française. Les capacités de débarquement de GNL (gaz naturel liquéfié) dans les terminaux méthaniers français ont été renforcées sur les terminaux de Montoir, Fos et Dunkerque et un terminal méthanier flottant sera mis en place au Havre en 2023. Des mesures réglementaires ont été prises pour débloquer des projets de production de biométhane, notamment en prenant mieux en compte l'inflation qui menaçait leur équilibre économique. Des mesures de soutien renforcé à la rénovation énergétique, à la production de chaleur renouvelable et à la décarbonation de l'industrie ont été mises en place dès le printemps 2022, par exemple en augmentant le budget du fonds chaleur renouvelable à hauteur de 520 M€ en 2022 contre 370 initialement prévus. Enfin le plan de sobriété présenté le 6 octobre dernier comporte un ensemble de dispositifs de mobilisation pour les ménages (dont une campagne d'information sur les éco-gestes), pour les différents secteurs professionnels, d'actions d'accompagnement (par exemple le programme CEE ACTEE+ qui vise à accompagner les collectivités dans l'ingénierie de leurs projets de rénovation des bâtiments), de dispositifs financiers d'accompagnement et d'évolutions réglementaires, dans l'objectif de parvenir à une réduction de consommation d'énergie finale de 10 % d'ici deux ans. Du fait de l'ensemble de ces mesures, la France aborde l'hiver dans de bonnes conditions compte tenu du contexte. Cependant au-delà des mesures précédentes, notre situation d'approvisionnement peut varier en fonction de la rigueur climatique et des évolutions des approvisionnements externes, et nous devons donc préparer les mesures permettant de faire face à toutes les situations. En particulier des difficultés peuvent survenir en fin d'hiver, en cas de pointe de froid important, et si les stockages sont moins remplis, ce qui diminue alors mécaniquement leur capacité d'injection dans le réseau. Un mécanisme de réduction coordonnée de la consommation pourrait donc être nécessaire en cas de baisse trop forte de nos stockages. Ce type de mécanisme doit pouvoir faire l'objet de flexibilités et permettre des échanges entre les acteurs concernés, afin de permettre le plus de réduction là où c'est économiquement optimal. Les niveaux de réduction demandés ainsi que la période sur laquelle s'appliquerait un tel mécanisme dépendront nécessairement de la situation d'approvisionnement et de la rigueur de l'hiver. En tout dernier recours, un mécanisme de délestage est prévu depuis avril 2022 dans la règlementation, afin de réagir en cas de très forte demande qui ne pourrait être satisfaite par les importations, les émissions depuis les terminaux méthaniers et les stockages. Il vise à réduire rapidement la consommation de manière organisée pour éviter une baisse de pression brutale dans le réseau, amenant à un écroulement généralisé du réseau de gaz, ne pouvant être remis en service que sur plusieurs semaines et qui aurait des conséquences économiques, sociales et environnementales très lourdes. À la différence de l'électricité le délestage en gaz ne peut concerner que des gros consommateurs de plus de 5GWh par an, qui sont prévenus individuellement de la nécessité de réduire leur alimentation, pour une courte période. Définies par le décret n° 2022-495 du 7 avril dernier, les modalités de délestage de la consommation de gaz naturel prévoient, en cas de nécessité, de réduire l'alimentation en gaz en premier lieu aux « consommateurs produisant de l'électricité (jusqu'au niveau d'alimentation susceptible de remettre en cause la sécurité d'approvisionnement en électricité) », puis « les consommateurs de gaz naturel consommant plus de 5 gigawattheures par an » qui n'assurent pas « des missions d'intérêt général liées à la satisfaction des besoins essentiels de la nation, en matière notamment de sécurité, de défense et de santé » ou qui ne sont pas « susceptibles de subir des conséquences économiques majeures en cas de réduction ou d'arrêt de leur consommation de gaz naturel » et enfin tous les autres consommateurs de gaz naturel. Ceci permettra d'établir un ordre de priorité dans la mise en œuvre d'un éventuel délestage, afin de limiter au maximum les dommages économiques notamment. Il est important par ailleurs pour les entreprises d'une part d'envisager des actions d'économie d'énergie ou développement de moyens de chauffage décarbonés, que l'État peut soutenir financièrement, d'autre part d'étudier la mise en place de moyens permettant de faire face à d'éventuels délestages (même si ceux-ci seront exceptionels et de courte durée) ou même à des coupures inopinées de gaz qui peuvent survenir, par exemple en cas de situations accidentelles. Afin de suivre les prévisions de consommation par rapport à l'approvisionnement pour les jours à venir, les gestionnaires de réseau de transport ont développé le service Ecogaz, à l'instar du service EcoWatt pour l'électricité, ce qui permettra de prévoir les moments où des efforts de réduction volontaire seront nécessaires. Enfin, les gros consommateurs qui le souhaitent peuvent aussi conclure un contrat d'interruptibilité garantie avec le gestionnaire de réseau de transport de gaz. Cela permet d'avoir un préavis plus important pour réduire volontairement sa consommation en cas de risque sur le réseau (16h la veille) et d'être rémunéré pour cette action. Des arrêtés renforçant et précisant le dispositif ont été publiés début octobre.

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