Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 11/08/2022

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les inquiétudes que provoque la découverte d'une algue rouge invasive au large de l'île de Port-Cros.
Cette algue rouge filamenteuse, qui répond au nom scientifique de Lophocladia lallemandii, a été identifiée pour la première fois le 15 décembre 2021 dans les eaux du parc national de Port-Cros par des chercheurs de l'institut méditerranéen d'océanologie.
Originaire de la mer rouge et de l'océan indien, on la trouve en méditerranée depuis le début du XXe siècle, mais elle était jusqu'alors repérée dans les eaux plus chaudes du bassin oriental et du sud du bassin occidental. Or son extension, sans doute favorisée par le réchauffement actuel des eaux méditerranéennes, pourrait avoir des conséquences dommageables pour les écosystèmes locaux. En effet, cette algue produit des molécules toxiques qui la préservent des prédateurs, tandis qu'elle se développe en tapis extrêmement denses sur la plupart des types de substrat. Elle pourrait donc déstructurer les herbiers de posidonie, pourtant essentiels puisqu'ils servent de « nurserie » pour 25 % des espèces animales méditerranéennes (sèches, rascasses, grandes nacres...) et de barrière contre l'érosion.
Alors que la méditerranée connaît des épisodes de canicule marine en cet été 2022, avec des températures supérieures de 4 à 6° C aux normales de saison, il lui demande comment mieux appréhender l'ampleur de l'implantation de cette algue invasive et mesurer ses conséquences.

- page 4230

Transmise au Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie publiée le 13/07/2023

L'algue rouge filamenteuse (L. lallemandii), est une espèce exotique envahissante native de la région Indo-Pacifique centrale, observée depuis les années 1990 en Méditerranée occidentale. Plus récemment, sa présence a été décelée dans le périmètre du parc national de Port-Cros en 2021. Les scientifiques expliquent sa présence par l'élévation de la température des eaux et son introduction par le trafic maritime via le Canal de Suez. Cette algue est susceptible d'avoir un impact durable sur les milieux qu'elle colonise, pouvant provoquer le recouvrement des fonds et toucher très fortement certaines espèces natives (herbiers de Posidonie, Grande Nacre). L'éradication manuelle n'est pas efficace et il importe de contenir l'espèce avant que sa propagation soit à un stade avancé. Les connaissances actuelles n'indiquent pas toutefois de propagation plus étendue dans les eaux françaises de Méditerranée, les dernières données disponibles montrant même une régression au cours de l'hiver 2022 au sein du parc de Port-Cros. Son adaptation dans son nouvel environnement, sa diffusion, sa localisation éloignée d'autres régions où elle est présente et son impact sur le milieu marin constituent un ensemble d'éléments encore méconnus. Un travail de thèse a donc été initié en octobre 2022 à l'institut Méditerranéen d'Océanologie de Marseille, impliquant deux parcs nationaux (Port-Cros et les Calanques). Les objectifs de ce travail de recherche sont de comprendre la dynamique d'invasion de l'espèce et ses impacts sur la flore et la faune. Le parc de Port Cros réalise par ailleurs une surveillance attentive de l'espèce sur l'ensemble du littoral de PACA, avec l'appui d'usagers et d'associations (Planète Mer, clubs de plongée, d'apnée et de chasse sous-marine). La surveillance des macroalgues de substrats rocheux au niveau des côtes est également prévue dans le cadre de la mise en oeuvre du programme de surveillance du troisième cycle 2022-2027 de la Directive cadre sur l'eau. Enfin, ces initiatives sont complétées par le dispositif des réseaux ALIEN porté par l'Office Français pour la Biodiversité, qui visent à surveiller la progression des espèces exotiques envahissantes, à améliorer les connaissances disponibles, à renforcer et structurer la prévention et la sensibilisation (l'espèce a notamment été observée dans le cadre du réseau ALIEN Corse ; une cartographie des observations est disponible en ligne).

- page 4385

Page mise à jour le