Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 28/07/2022
M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les conséquences préjudiciables de la mode dite éphémère.
Le concept de « fast fahion », voire d'« ultra fast fashion », désigne une mode qui se renouvelle en permanence, poussant à acheter toujours plus de vêtements. Le commerce électronique permet même un modèle de vente au détail quasiment en temps réel, identifiant les tendances grâce à des algorithmes puissants et réduisant le temps, de la conception à l'emballage, à deux semaines maximum.
Or non seulement ces cadences infernales reposent sur des conditions de travail épouvantables dans des usines de conception chinoises, mais l'achat en masse de vêtements de mauvaise qualité, qui seront vite jetés ou revendus, constitue une catastrophe environnementale. L'industrie du prêt-à-porter serait responsable à elle seule de 8 à 10% des émissions de gaz à effet de serre de la planète. De surcroît, alors que la production textile a doublé entre 2000 et 2015, moins de 1 % est recyclé, et jusqu'à 35 % des microplastiques relâchés dans l'environnement sont issus de vêtements à base de polyester ou d'acrylique.
En conséquence, il lui demande comment bannir le « prêt-à-jeter » et rendre la mode plus durable et plus respectueuse de l'environnement.
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Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 24/08/2023
Le gouvernement est conscient des enjeux sociaux, économiques et environnementaux associés au modèle de production et de consommation de textiles. A l'échelle mondiale, l'industrie textile est le 3e secteur le plus consommateur d'eau et émet l'équivalent de 4 millions de CO2 par an. La consommation européenne de textiles a fortement augmenté depuis une quinzaine d'années, associée avec le développement de la « fast fahion ». Cette dernière repose sur la fabrication majoritairement hors d'Europe de produits très bon marché, le renouvellement rapide des collections et une durée d'utilisation très courte des produits. Les européens consomment en moyenne 26 kg de textiles et jettent 11 kg de textiles par an. Ce modèle engendre ainsi des quantités importantes de déchets qui, pour une large part, ne sont pas valorisés. Quant aux textiles usagés faisant l'objet d'une collecte, ils sont destinés à être réutilisés ou recyclés mais dépendent en grande partie de marchés à l'étranger. Le devenir des textiles exportés suscite des controverses grandissantes, que ce soit pour les conséquences sur les économies locales ou la question de leur réutilisation effective. Il en va pourtant de la responsabilité des pays européens de ne pas générer de pollutions dans les pays importateurs de déchets textiles. Face à ces constats, le gouvernement met en oeuvre des actions d'envergure pour accélérer la transition du secteur textile vers une filière durable et circulaire. La France est le premier pays européen à s'être doté d'une filière à responsabilité élargie du producteur (« REP ») pour les produits textiles. Dans le cadre de la filière REP textiles, les « producteurs » (fabricants, distributeurs, importateurs) sont responsables de la fin de vie des produits qu'ils mettent sur le marché selon le principe pollueur-payeur. A ce titre, ils doivent financer la mise en place de solutions de collecte, réutilisation, recyclage appropriées pour les déchets issus de leurs produits. Depuis sa création, la filière REP des textiles a permis en France d'accroître la collecte des textiles usagés pour atteindre aujourd'hui 230 000 tonnes et de soutenir financièrement l'activité de tri des textiles usagés, opérée notamment par des acteurs de l'économie sociale et solidaire. La filière REP textile a fait l'objet d'une importante réforme en novembre 2022 pour accroître ses performances environnementales. Le nouveau cahier des charges pour la période d'agrément 2023-2028 dispose d'objectifs renforcés en matière de collecte des textiles usagés, de réutilisation / réemploi de proximité et de recyclage. Il constitue un levier essentiel pour favoriser l'écoconception des produits textiles en fixant des bonus dont pourront bénéficier les producteurs de textiles certifiés par un label environnemental, conçus pour durer plus longtemps ou incorporant des matières issues du recyclage réalisé à proximité du lieu de collecte des déchets. Pour allonger la durée de vie des textiles, il prévoit un fonds doté de plus de 150 millions d'euros sur 6 ans pour inciter les consommateurs à réparer leurs vêtements plutôt que de les jeter et une enveloppe de 135 millions d'euros sur six ans pour développer le réemploi local de textiles. Enfin, la traçabilité du devenir des textiles usagés collectés dans le cadre de la filière REP est renforcée en application des dispositions de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire. A l'échelle européenne, la France soutient les orientations inscrites dans la stratégie sur les textiles durables que la Commission Européenne a publiée en mars 2022. Dans le cadre des négociations en cours sur la révision du règlement sur les transferts transfrontaliers des déchets, la France est favorable à la mise en place de règles plus contraignantes à l'export afin de s'assurer que les déchets exportés soient traités dans des conditions similaires à celles de l'Union Européenne pour éviter des impacts environnementaux inacceptables.
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