Question de M. BURGOA Laurent (Gard - Les Républicains) publiée le 14/07/2022

M. Laurent Burgoa attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conséquences de la guerre en Ukraine pour les entreprises du bâtiment.
En effet, les difficultés d'approvisionnement de matériaux et la hausse vertigineuse des coûts, en particulier du carburant, ne sont plus tenables pour ces entreprises. D'autant que ces difficultés s'ajoutent à une période tendue en matière de hausse des coûts depuis plus d'un an.
Dans ce contexte, la demande répétée de la fédération française du bâtiment (FFB) d'une mobilisation des créances de « carry-back » pour soulager les trésoreries a d'autant plus de légitimité mais ne suffit plus. La FFB se mobilise pour demander plusieurs évolutions urgentes : une mesure transitoire de baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les carburants (personne ne comprendrait en effet que dans la période actuelle l'État cherche à engranger des recettes liées à une crise internationale) ; un gel des prix de l'énergie et des carburants, à l'image de ce que le Gouvernement avait décrété lors de la guerre du Golfe en 1991 ; dans les marchés publics, la prise en compte systématique des demandes d'indemnisation, d'avenant au marché, de non application des pénalités de retard ; la mise en œuvre de la théorie de l'imprévision tant dans les marchés publics que dans les marchés privés en vue d'imposer une renégociation des prix aussi longtemps que durera le conflit.
Il lui demande de bien vouloir entreprendre des discussions avec les professionnels du secteur.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 09/02/2023

Compte tenu notamment de la crise de la guerre en Ukraine, le Gouvernement a souhaité agir immédiatement afin d'accompagner le secteur du bâtiment et travaux publics (BTP). Ainsi, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a lancé avant l'été 2022, les Assises du BTP, réunissant les représentants du secteur, dont la Fédération française du bâtiment (FFB), qui pont pu exprimer leurs attentes et leurs propositions au sein d'une instance de débat et de dialogue. Ainsi les propositions de la FFB, citées dans votre question, ont également été débattues. A l'issue d'une première concertation entre l'ensemble des acteurs de la filière, le Gouvernement a annoncé des premières mesures. Afin d'améliorer la trésorerie des fournisseurs de l'Etat, le Gouvernement s'est engagé à relever les seuils planchers des avances dans tous les marchés publics. Ces seuils passeront de 20 % à 30 % pour l'ensemble des marchés publics passés par l'Etat avec des très petites entreprises (TPE) /petites et moyennes entreprises (PME) et le Gouvernement incite les collectivités territoriales à passer ce seuil de 10 % à 20 %. De plus, un guide des bonnes pratiques relatif aux pénalités de retard sera mis à jour afin d'éviter que les situations actuelles de pénuries ne soient injustement reprochées aux entreprises du BTP. Par ailleurs, l'échelonnement du remboursement de ces avances sera amélioré par une clarification des textes. Sur la prévisibilité des prix, le Gouvernement a saisi le Conseil d'Etat qui a autorisé la révision des marchés publics en cours, compte tenu des circonstances exceptionnelles. Une circulaire précise les démarches à entreprendre en la matière. En complément, une mission a été confiée au Médiateur des entreprises afin d'améliorer la prévisibilité des prix des matières premières, dans le prolongement de la médiation de filière et du comité de crise destinés à identifier les éventuels comportements abusifs, de sécuriser les approvisionnements et d'apaiser les tensions. Aussi, en vue de simplifier les démarches administratives des TPE/PME, le seuil de gré à gré sera augmenté, permettant d'exempter les marchés publics de travaux d'appels d'offres. Le délai entre la notification d'un marché et l'ordre de service de démarrage effectif des travaux sera quant à lui abaissé de 6 à 4 mois afin d'éviter une inflation des coûts durant cette période De plus,  dans la perspective de réduire l'augmentation des coûts subie par les professionnels, le Gouvernement a demandé aux acteurs publics d'appliquer dans toutes les situations possibles la théorie de l'imprévision pour les marchés publics ne comportant pas de clause de révision de prix et de ne pas appliquer les pénalités de retard lorsqu'il est justifié par une prorogation du délai de livraison d'un fournisseur, causée par la crise actuelle. Pour les contrats de droit privé, les pouvoirs publics ont rappelé l'application d'un principe analogue à la théorie de l'imprévision. Une renégociation du contrat est possible si un changement de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrant rend son exécution particulièrement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque. En complément, l'Etat a procédé à une accélération de la publication des index du BTP. Ils sont désormais publiés 45 jours après la fin du mois afin d'actualiser plus rapidement les prix des matières premières dans l'exécution des contrats. Enfin, les cellules de crise BTP au sein des préfectures sont réactivées, afin d'offrir un espace de concertation sur les sujets de tension.  Elles réunissent, sous l'égide du préfet, l'ensemble des acteurs du secteur : fédérations professionnelles, distributeurs et industriels locaux, donneurs d'ordre publics et privés. Par ailleurs, afin de répondre à la crise énergétique, le Gouvernement a mis en place un dispositif complet prenant en charge une partie des hausses des factures d'électricité et de gaz. Dès le mois de février 2022, la fiscalité sur l'électricité (TICFE) a été abaissée à son minimum légal européen (à savoir 1 €/MWh pour les ménages et 0,5€/MWh pour les autres types de consommateurs). Cette baisse est reconduite en 2023, et représente un soutien de 8,4 Mds€ pour les entreprises. Par ailleurs, les 1,5 million de TPE de moins de 10 salariés avec un chiffre d'affaires (CA) annuel inférieur à 2 M€ de CA et ayant un compteur électrique d'une puissance inférieure à 36 kVA, peuvent bénéficier du bouclier tarifaire électricité réservé aux particuliers. Le bouclier tarifaire limite la hausse du prix du gaz à 15 % au 1er janvier 2023. Concernant les factures d'électricité, leur hausse sera également limitée à 15 % à partir de février 2023.Ce plafond permet d'éviter une augmentation de 120 % des factures d'énergie pour les TPE concernées. En réponse à la crise ukrainienne, l'Union européenne a  adapté son cadre juridique pour permettre de soutenir les entreprises. Un encadrement temporaire de crise des aides d'Etat a été adopté par la Commission européenne le 23 mars 2022, ouvrant notamment la possibilité pour les Etats membres de mettre en place des aides afin de couvrir les surcoûts dus à une augmentation exceptionnellement important des prix du gaz naturel et de l'électricité. Le guichet d'aide gaz et électricité a été ouvert sur cette base dès le mois de juillet. L'évolution de la crise a conduit à une modification de l'encadrement temporaire et à l'adoption d'un nouveau texte le 28 octobre 2022, qui a permis de simplifier et de renforcer le guichet d'aide à compter des dépenses de septembre 2022. De plus, les trois volets de l'aide ont vu leurs plafonds relevés en passant de 2, 25 et 50 M€ à 4, 50 et 150 M€ respectivement. Les intensités de l'aide ont également été revues à la hausse pour couvrir respectivement 50 %, 65 % et 80 % des coûts éligibles, dans la limite de 70 % des volumes consommés en 2021. En matière de calcul des coûts éligibles, une augmentation des factures de 50 % par rapport à l'année 2021 sera suffisante pour bénéficier de l'aide, plutôt qu'une augmentation de 100 % qui était exigée jusque-là. Les achats de chaleur et de froid produits à partir de ces énergies et réalisés dès le 1er mars 2022 seront éligibles au bénéfice de l'aide.  Ces assouplissements s'accompagnent d'une suppression à compter de la période éligible de septembre-octobre 2022 du critère de baisse de l'excédent brut d'exploitation (EBE) pour les entreprises souhaitant bénéficier du volet de l'aide désormais plafonné à 4 M€. Pour les deux autres volets de l'aide, un critère de baisse d'EBE de 40 % par rapport à l'année 2021 est introduit, comme alternative au critère d'EBE négatif au cours de la période éligible qui est maintenu. Ainsi, pour bénéficier de ces aides : le prix de l'énergie pendant la période de demande d'aide (septembre et/ou octobre 2022) doit avoir augmenté de 50 % par rapport au prix moyen payé en 2021, les dépenses d'énergie pendant la période de demande d'aide doivent représenter plus de 3 % du CA de 2021.  Pour les demandes des aides, un dossier simplifié est demandé, comprenant uniquement : les factures d'énergie de la période de demande ainsi que les factures de l'année 2021, les coordonnées bancaires de l'entreprise (RIB), le fichier de calcul de l'aide mis à votre disposition sur le site des impots.gouv.fr, une déclaration sur l'honneur attestant que l'entreprise remplit les conditions et l'exactitude des informations déclarées, seulement pour les aides plafonnées à 50 et 150 millions d'euros, une attestation de l'expert-comptable, du commissaire au compte et du comptable de l'entreprise. Les entreprises prétendant à ces deux volets de l'aide pourront également justifier leur énergo-intensivité au cours de l'année 2022, si, au cours du premier semestre 2022, leurs dépenses d'énergie correspondent au moins à 6 % de leur CA. Concernant le volet de l'aide désormais plafonné à 150 millions, la liste des secteurs éligibles est étendue à l'ensemble des secteurs et sous-secteurs du système d'échange de quotas d'émissions exposés à un risque de fuite de carbone pour la période 2021-2030 établie par la Commission européenne. Le guichet d'aide est ouvert pour l'ensemble des dépenses réalisées en 2023. Pour accompagner les entreprises dans leurs démarches, un ensemble de documentation est mise à leur disposition sur le site impots.gouv.fr. Une assistance téléphonique est ouverte pour toute question relative à ce dispositif au 0806 000 245. Enfin, chaque entreprise peut solliciter son conseiller départemental de sortie de crise pour obtenir plus d'informations.  Ces conseillers peuvent accompagner une entreprise en difficulté dans les demandes d'aide au paiement des factures d'électricité et de gaz et octroyer des facilités de paiement ou des reports de charges fiscales et sociales au cas par cas. Enfin, en cas de différend avec son fournisseur, un consommateur peut saisir le Médiateur national de l'énergie. Compte tenu du risque particulier que fait courir la hausse des prix de l'électricité sur les entreprises malgré les dispositifs déjà en vigueur, depuis le 1er janvier 2023 toutes les TPE qui ne sont pas protégées par le bouclier tarifaire et toutes les PME bénéficient d'un nouveau dispositif : l'amortisseur électricité. Concrètement l'Etat prend en charge, sur 50 % des volumes d'électricité consommé, l'écart entre le prix de l'énergie du contrat et 180 €/MWh, dans la limite d'une aide de 320 €/MWh. L'effet moyen de l'amortisseur est donc de 160 €/MWh sur la partie fourniture des factures des entreprises, c'est-à-dire hors abonnement, hors coût d'acheminement, hors coûts de réseau (TURPE) et hors taxes. Cette aide sera automatiquement déduite sur les factures des entreprises dès lors qu'elles se seront déclarées éligibles au dispositif auprès de leur fournisseur. Une enveloppe de 3 Mds€ est prévue, en partie financée par la contribution sur la rente inframarginale prélevée sur les producteurs d'électricité. Les fournisseurs seront compensés via une baisse de la CSPE. Les entreprises qui bénéficient de l'amortisseur électricité pourront continuer à bénéficier du guichet d'aide si elles remplissent toujours les conditions d'éligibilité après prise en compte des montants perçus. Les consommations de gaz, de chaleur et de froid produits à partir de gaz naturel ou d'électricité restent leur part pleinement éligibles au guichet d'aide. Sur la base de l'ensemble de ces dispositifs, l'Etat prend en charge une partie des factures des entreprises les plus touchées par la crise. Concrètement, une entreprise éligible à l'amortisseur ainsi qu'à l'aide plafonnée à 4 M€ qui payait 71 €/MWh en moyenne son électricité en 2021, qui avait une facture d'électricité de 7 500 € en janvier 2021 et qui a vu sa facture tripler en 2023 avec un prix de 213 €/MWh pourra bénéficier de 5 070 € d'aides (1 743€ via l'amortisseur et 3 327€ via le guichet d'aide), soit une prise en charge par l'Etat de 34 % de l'augmentation de sa facture. La facture sera ainsi ramenée à 17 429 € et le prix à 165 €/MWh. Les TPE qui ont renouvelé leur contrat entre le 1er juillet et le 31 décembre 2022 bénéficieront d'un prix maximum moyen de l'électricité (hors taxes et hors tarif de réseau) de 280 €/MWh pour toute l'année 2023. Les TPE concernées doivent déclarer qu'elles souhaitent bénéficier du tarif garanti dans l'attestation d'éligibilité [celle de l'amortisseur] à transmettre à leur fournisseur.                                          Le Gouvernement sera particulièrement vigilant sur les suites données à ces mesures ainsi que sur l'évolution de la situation, afin de répondre au mieux aux besoins des professionnels du bâtiment.

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