Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SER) publiée le 14/07/2022

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la problématique de l'épandage des boues produites par les stations d'épuration dans le contexte de l'épidémie de covid-19.

L'arrêté du 30 avril 2020, pris d'après l'avis de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) du 27 mars 2020, impose la mise en œuvre systématique d'un traitement hygiénisant avant l'épandage agricole des boues d'épuration urbaines produites durant l'épidémie de covid-19.

L'ANSES préconisait alors cette mesure compte tenu du risque potentiel de présence du virus dans les boues d'épuration et du manque d'études concernant le devenir du potentiel infectieux du virus dans la filière d'assainissement et dans les boues.

Ces procédures d'hygiénisation et le stockage des boues, imposés par l'arrêté du 30 avril 2020, représentent des charges financières importantes pour les collectivités publiques chargées des stations d'épuration. À titre d'exemple, pour la communauté de communes Haut Nivernais Val d'Yonne, le coût supplémentaire s'est élevé à 180 000 euros.

Des aides financières existaient jusqu'en 2021 pour les collectivités afin de les aider à gérer leurs stocks de boues durant cette période épidémique.

Cependant, l'arrêt du versement de l'aide exceptionnelle dès 2022 par les agences de l'eau a mis en difficulté de nombreuses collectivités. Elles n'ont pas pu matériellement procéder à des investissements en masse pour permettre l'épandage des boues dans le respect des prescriptions le temps de la crise sanitaire.

Aussi, il sollicite son avis au sujet d'une reconduction de la subvention exceptionnelle versée par les agences de l'eau, pour l'année 2022, afin d'accompagner les collectivités dans l'élaboration de dossiers de projets d'investissement, éligibles aux aides prévues par le plan de relance.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires publiée le 08/12/2022

Les boues urbaines ont vu leurs conditions d'épandage modifiées suite à l'épidémie de COVID-19 (traitement complémentaire ou hygiénisation au sens de l'arrêté ministériel du 8 janvier 1998). Compte-tenu de l'évolution favorable de l'épidémie, du manque d'études prouvant le risque infectieux du virus ou des traces de virus présents dans les boues et les eaux usées et de l'impact financier de ces mesures sur le budget assainissement des collectivités, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a entrepris plusieurs actions. En premier lieu, une étude de parangonnage a été réalisée auprès de 7 pays européens. Cette étude a notamment mis en évidence qu'aucun des pays consultés ne semble avoir pris de mesures spécifiques du fait de l'épidémie. En effet, certains États ont estimé que les traitements requis avant épandage (notamment hygiénisation) et en vigueur avant le début de la pandémie permettent de prévenir du risque de propagation du virus. Cette information conforte les mesures prises au niveau national qui tendent à s'aligner sur celles appliquées dans ces États en situation courante. Par ailleurs, certains États ont estimé qu'aucune preuve scientifique ne documentait clairement que le COVID-19 se transmettait par la voie fécale-orale et donc via les boues (seules des traces de matériel génétique apparaissent dans l'eau mais celles-ci ne présentent pas de capacité infectieuse). Cette approche n'apparaît pas applicable en France, au regard du principe de précaution inscrit dans la charte de l'environnement annexée à la Constitution française. En parallèle, le ministère a lancé un état des lieux concernant la mise en œuvre des mesures réglementaires et des éventuelles difficultés soulevées. Il ressort des premiers retours que l'essentiel des dysfonctionnements constatés au niveau des stations préexistaient à l'épidémie de COVID-19 et n'ont donc pas de lien direct avec cette dernière. Au niveau des stations, le stockage des boues, préalablement à leur traitement ou leur épandage, semble la principale difficulté à laquelle les collectivités doivent faire face. L'envoi des boues vers des plateformes de compostage ou d'autres stations de traitement des eaux usées pour y être traitées ressortent comme les deux voies les plus privilégiées. Les stations d'épuration par lagunage et filtres plantés de roseaux sont particulièrement impactées. Pour le moment, les collectivités concernées ont majoritairement décidé de reporter l'extraction des boues issues de ces installations. Sur la base de ces éléments, le ministère a sollicité l'avis du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) sur l'opportunité de lever ou assouplir les restrictions actuellement en vigueur concernant l'épandage des boues et, le cas échéant, les conditions de mise en œuvre de ces mesures. Dans son projet d'avis qui sera rendu public d'ici la fin de l'année, le HCSP recommande de ne pas maintenir les mesures restrictives d'épandage des boues liées à l'épidémie de COVID-19, actuellement en vigueur. Ces éléments devraient donc permettre aux ministères chargés de l'environnement, de la santé et de l'agriculture d'abroger l'arrêté du 30 avril 2020 modifié qui précise les modalités d'épandage de boues pendant la crise de COVID-19. Les consultations nécessaires à la publication du texte d'abrogation seront lancées dès que cet avis sera officiellement publié. L'aide exceptionnelle versée par les agences de l'eau ayant pour but d'accompagner les collectivités pour les dépenses liées à l'hygiénisation ou au traitement préalable des boues avant épandage en période d'épidémie de Covid-19 a été renouvelée en partie sur les bassins en 2022, selon les priorités définies par leurs instances de gouvernance. Ainsi, seule l'agence de l'eau Adour-Garonne a intégralement prolongé ce dispositif d'aides exceptionnelles. Les agences de l'eau Rhone Mediterranée Corse, Loire Bretagne et Rhin-Meuse ont décidé de poursuivre le financement des investissements relatifs à l'hygiénisation des boues (dispositifs de déshydratation, y compris achat d'unités mobiles pour Rhone Mediterranée Corse, d'hygiénisation et de stockage des boues). Les agences de l'Eau Seine Normandie et Artois Picardie ont elles cessé les aides exceptionnelles liées au COVID-19.

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