Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 07/07/2022

Mme Laure Darcos appelle l'attention de M. le ministre des armées sur l'impératif de sauvegarde et de conservation des objets et matériels à caractère patrimonial du ministère des armées. Les anciens aéronefs de l'armée française font partie de ces matériels que des collectionneurs français avertis souhaiteraient pouvoir acquérir aux fins de les conserver et les exposer. Or, en l'état actuel du droit, toute cession sur le territoire national de matériels incorporant des fibres d'amiante doit être précédée d'un désamiantage, ce qui exclut la cession d'aéronefs de collection dès lors qu'ils contiennent de l'amiante, à moins qu'ils ne soient destinés à l'exportation.
La réglementation en vigueur faisant obstacle à la bonne préservation du patrimoine aéronautique français, elle lui demande de bien vouloir mettre à l'étude une modification du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante.

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Réponse du Ministère des armées publiée le 23/11/2023

L'utilisation de biens contenant de l'amiante est très strictement encadrée au niveau européen par le règlement « REACH ». Les fibres d'amiante sont soumises à un régime de restriction défini aux articles 67 et suivants et précisé par l'annexe XVII de ce règlement (entrée 6). Cette annexe prévoit que : « La fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de ces fibres [d'amiante] et des articles et mélanges auxquels elles ont été délibérément ajoutées sont interdits ». Cette interdiction, directement applicable au ministère depuis 2009, est de portée très générale. En effet le terme « mise sur le marché », défini à l'article 3, signifie : « le fait de fournir un produit ou de le mettre à la disposition d'un tiers, à titre onéreux ou non. Toute importation est assimilée à une mise sur le marché ». Par ailleurs, depuis 2011, il n'est plus possible de déroger à ce principe d'interdiction. Seule une modification du règlement « REACH » permettrait ainsi de rouvrir les possibilités d'exemption afin, par exemple, d'y inscrire une possibilité d'exemption pour la préservation du patrimoine culturel. Toutefois, si la Commission européenne a récemment engagé le processus de révision du règlement, seules des évolutions des procédures applicables aux substances sont envisagées dans un but de simplification et d'efficacité. Les discussions sur les annexes ne seront pas rouvertes et il n'est aucunement envisagé de revenir sur le contenu des restrictions existantes, telles que celles concernant l'amiante. En vertu du deuxième alinéa de l'article 288 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne « le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre ». Ainsi, une modification du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante, qui a pour objet la protection des travailleurs et des consommateurs, afin que des collectionneurs français avertis puissent acquérir, aux fins de les conserver et les exposer, les anciens aéronefs amiantés de l'armée française, exposerait la France à une procédure de mise en demeure et de recours en manquement devant la Cour de justice de l'Union européenne. Au regard de l'ensemble de ces raisons, aucune tentative de modification du décret « amiante » visant à autoriser la cession de matériels amiantés ne saurait aboutir. La valorisation du patrimoine militaire par les associations, les collectivités territoriales et les collectionneurs désireux d'en assurer l'entretien est importante et participe notamment au renforcement du lien armées-Nation. C'est pourquoi, afin de concilier l'impératif de protection des travailleurs et consommateurs de substances dangereuses et la préservation de ce patrimoine, la mise à disposition de ces biens, de manière temporaire, par le ministère des armées est possible au cas par cas.

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