Question de M. LECONTE Jean-Yves (Français établis hors de France - SER) publiée le 07/07/2022
M. Jean-Yves Leconte attire l'attention de Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'application de l'article 9 du décret n° 79-433 du 1er juin 1979 relatif aux pouvoirs des ambassadeurs et à l'organisation des services de l'État à l'étranger.
En effet, cet article dispose : « L'ambassadeur peut demander le rappel de tout agent affecté à sa mission et, en cas d'urgence, lui donner l'ordre de partir immédiatement. »
A priori cela signifie que seuls les « agents affectés à une mission » auprès d'un ambassadeur seraient concernés, et non les « agents » exerçant un autre emploi à l'étranger ne dépendant pas hiérarchiquement de l'ambassadeur. Comme il peut être demandé le « rappel » de l'agent, cela confirmerait cette interprétation, et laisse entendre que l'agent sera ainsi « rappelé » auprès de l'administration centrale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, à Paris ou à Nantes selon les cas. De plus, le critère « d'urgence » n'est pas défini et semble être laissé à l'appréciation de l'ambassadeur. Enfin, on ignore si « l'ordre de partir immédiatement » concerne le fait de « partir » de l'emploi occupé par l'agent, ou bien de partir du pays étranger où l'agent exerce ses fonctions.
Or, cet article a, il y a à peine quelques mois, servi de fondement à un ambassadeur pour intimer l'ordre de partir du poste et du pays où il exerçait à un directeur d'établissement homologué d'enseignement français à l'étranger. Cet établissement est donc géré par une association de gestion de droit local, qui se trouve donc être l'employeur du directeur d'établissement. Ce directeur est ainsi un fonctionnaire détaché du ministère de l'éducation nationale, auprès d'un établissement d'enseignement français à l'étranger homologué et relevant du droit local, et non un agent du poste diplomatique, du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, ou encore d'un établissement en gestion directe de l'agence d'enseignement français à l'étranger (AEFE).
L'ambassadeur n'est donc pas ici l'autorité compétente en matière disciplinaire. Cette demande de l'ambassadeur a eu pour conséquence directe le licenciement du directeur d'établissement par l'association de gestion de l'école.
Ainsi, il lui demande de préciser les contours de l'application de l'article 9 du décret n° 79-433 du 1er juin 1979 précité. Il demande à ce que lui soit, en particulier, indiqué, d'une part, si cet article permet à l'ambassadeur d'exiger le départ de l'agent de son emploi, ou aussi de son pays de résidence, et d'autre part, si un ambassadeur peut faire application de cet article auprès d'un directeur d'établissement d'enseignement français à l'étranger simplement homologué (et donc sans qu'il n'existe de lien hiérarchique entre le chef de poste diplomatique et le salarié dont l'employeur est l'association de gestion de l'établissement), fonctionnaire détaché du ministère de l'éducation nationale, et salarié de droit local étranger.
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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications publiée le 03/08/2022
Réponse apportée en séance publique le 02/08/2022
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, auteur de la question n° 027, adressée à Mme la ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Leconte. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, faute d'obtenir une réponse d'une autre manière, je suis également contraint d'utiliser la voie des questions orales.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur l'application de l'article 9 du décret n° 79-433 du 1er juin 1979 relatif aux pouvoirs des ambassadeurs et à l'organisation des services de l'État à l'étranger. Cet article dispose que « l'ambassadeur peut demander le rappel de tout agent affecté à sa mission et, en cas d'urgence, lui donner l'ordre de partir immédiatement ». Cela signifie, a priori, que seuls les agents affectés à une mission auprès d'un ambassadeur seraient concernés, et non ceux qui exercent un autre emploi à l'étranger et ne dépendent pas hiérarchiquement de l'ambassadeur.
L'emploi de l'expression « rappel de tout agent » laisse entendre que celui-ci serait rappelé auprès de l'administration centrale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. De plus, le critère d'urgence n'est pas défini et semble être laissé à l'appréciation de l'ambassadeur.
Enfin, on ignore si l'ordre de partir immédiatement concerne le fait de quitter l'emploi occupé par l'agent ou bien le pays étranger où l'agent exerce ses fonctions.
Or cet article a servi de fondement à un ambassadeur pour intimer l'ordre de quitter l'emploi et le pays où il exerçait au directeur d'un établissement scolaire homologué de l'enseignement français à l'étranger.
Cet établissement est géré par une association de gestion de droit local, qui était l'employeur du directeur d'établissement ; ce directeur était donc un fonctionnaire détaché du ministère de l'éducation nationale auprès d'un établissement d'enseignement français à l'étranger, homologué et relevant du droit local, et non un agent du poste diplomatique ou un enseignant détaché auprès de l'agence.
L'ambassadeur n'était donc pas ici l'autorité compétente en matière disciplinaire. Cette demande de l'ambassadeur a eu pour conséquence directe le licenciement du directeur de l'établissement par l'association de gestion de l'école.
Aussi, je vous demande de préciser les contours de l'application de l'article 9 du décret précité et, en particulier, de m'indiquer si, d'une part, cet article permet à l'ambassadeur d'exiger le départ d'un tel agent de son emploi et de son pays de résidence et, d'autre part, si un ambassadeur peut en faire application lorsque le fonctionnaire détaché est un salarié de droit local.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Monsieur le sénateur Jean-Yves Leconte, je vous prie d'excuser ma collègue Catherine Colonna, qui n'a pas pu être présente.
En vertu de l'article 1er du décret n° 79-433 du 1er juin 1979 relatif aux pouvoirs des ambassadeurs et à l'organisation des services de l'État à l'étranger, l'ambassadeur représente le Gouvernement et chacun des ministres.
Les pouvoirs conférés aux ambassadeurs à l'article 9 du décret du 1er juin 1979, que vous citez, ne le sont pas en vertu de leur pouvoir disciplinaire propre, mais plus généralement en leur qualité de représentant du Gouvernement et de chacun des ministres à l'étranger. À ce titre, ils peuvent demander ou, en cas d'urgence, ordonner le rappel d'un fonctionnaire du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse exerçant ses fonctions dans un établissement homologué ; c'est ce qu'a fait un ambassadeur, il y a quelques mois.
Dans le cas que vous évoquez, dès qu'il a eu connaissance des faits de harcèlement reprochés au chef d'établissement, l'ambassadeur a demandé l'engagement d'une procédure au titre de l'article 40 du code de procédure pénale concernant les signalements de crimes et délits, en complément des plaintes déposées par les victimes. L'établissement scolaire figurait dans la liste des établissements homologués pour l'année scolaire 2020-2021 définie par l'arrêté du 25 mai 2020 fixant la liste des écoles et des établissements d'enseignement français à l'étranger homologués. Les personnels de cet établissement ayant la qualité de fonctionnaire restent, dans l'exercice de leur mission, placés sous l'autorité du ministère ; ils sont donc susceptibles de faire l'objet d'un rappel au titre de l'article 9.
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