Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 03/02/2022
M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice , sur les conséquences de l'annulation de la procédure dans le cadre d'une comparution immédiate.
L'annulation de la procédure dans le cadre d'une comparution immédiate peut être prononcée en cas de vice de procédure, notamment pour un défaut de mention expresse des infractions reprochées dans le procès-verbal de mise en garde à vue ou encore l'absence de notification du droit à garder le silence.
Ainsi, alors que les faits sont souvent établis et les soupçons de culpabilité sont forts, notamment en cas de flagrance, dans le cadre d'une comparution immédiate, le prévenu peut quitter librement le tribunal sans même de mesures de contrôle judiciaire.
Si ces dispositions doivent permettre de garantir les droits de la défense, cette libération peut, dans certains cas, paraitre contradictoire avec la nécessité de protéger la société ou difficilement acceptable pour des infractions particulièrement choquantes, par exemple en cas d'agressions physiques à l'encontre de personnes dépositaires de l'autorité publique.
Aussi, il lui demande s'il ne conviendrait pas de prendre des mesures pour éviter de telles situations.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 14/04/2022
Il ressort des dispositions de l'article 395 du code de procédure pénale, que si le maximum de l'emprisonnement prévu par la loi est au moins égal à deux ans, ou au moins égale à six mois en cas de délit flagrant, le procureur de la République, lorsqu'il lui apparaît que les charges réunies sont suffisantes et que l'affaire est en l'état d'être jugée, peut, s'il estime que les éléments de l'espèce justifient une comparution immédiate, traduire le prévenu sur-le-champ devant le tribunal. Cette voie procédurale a été choisie par les parquets dans 8,15 % des procédures poursuivies devant les tribunaux judiciaires en France en 2020. Elle permet d'assurer une réponse rapide, notamment pour des faits d'une particulière gravité ou lorsque la personnalité de l'auteur laisse présager un risque de réitération ou de récidive. L'article 171 du code de procédure pénale dispose par ailleurs qu'il y a nullité lorsque la méconnaissance d'une formalité substantielle prévue par ce même code, ou toute autre disposition de procédure pénale, a porté atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne. L'article 802 du code de procédure pénale précise qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité, ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne. Comme l'a rappelé la chambre criminelle de la Cour de cassation, toutes les irrégularités de procédure ne sont pas sanctionnées par une nullité (notamment Crim. 8 novembre 1988, n° 88-83.666 et Crim. 24 avril 2013, n° 12-82.863). En outre, l'annulation de l'acte entaché d'irrégularité, qui peut être totale ou partielle, entraine la nullité des seuls actes postérieurs et subséquents, dont l'existence repose sur l'acte initial. L'annulation d'un acte n'entraîne donc pas nécessairement celle de l'ensemble de la procédure. Ainsi, les dispositions textuelles relatives au nullités et la jurisprudence en la matière permettent, tout à la fois, de préserver les droits de la défense, les libertés individuelles, et d'assurer la légitimité de la réponse judiciaire. Le maintien de cet équilibre est une composante essentielle d'un Etat de droit. Pour éviter que les procédures soient entachées d'irrégularités, la circulaire de politique pénale du 1er octobre 2020 a notamment rappelé que le préalable à la qualité des décisions de justice repose sur la qualité des procédures établies par les services d'enquête. Les procureurs de la République ont, dans ce cadre, été invités à accentuer leur contrôle sur celles-ci et, lorsque des annulations de pièces ou des relaxes sont prononcées en raison de la faiblesse des investigations, à ordonner le retour de la procédure vers le service ou l'unité concerné, afin de souligner les points qui auraient mérité une plus grande attention. S'agissant plus particulièrement de l'action de la justice dans la lutte contre les atteintes aux forces de l'ordre, celle-ci s'inscrit dans une direction clairement énoncée à plusieurs reprises : systématicité, rapidité et fermeté. Ainsi, la dépêche du 4 novembre 2020 relative à la lutte contre les atteintes commises à l'encontre des forces de l'ordre et la circulaire du 27 mai 2021 relative aux atteintes contre les forces de sécurité intérieure ont rappelé la nécessité de faire preuve de réactivité dans la conduite de l'action publique envers les auteurs de ces infractions, en veillant particulièrement à ce qu'une réponse pénale systématique, adaptée, individualisée et visible soit apportée à chacun des actes commis à l'encontre des fonctionnaires de police ou des militaires de la gendarmerie, aux fins de leur garantir un exercice serein et efficace de leurs missions. Prévenir la commission de nouvelles infractions, protéger la société et garantir les droits de la défense sont des principes directeurs des décisions judiciaires, pour desquels le Gouvernement est totalement mobilisé.
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