Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 13/01/2022

Question posée en séance publique le 12/01/2022

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Salmon. Monsieur le ministre, parlons cannabis ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Après des années de flou, le Gouvernement précise enfin la réglementation autour du CBD (cannabidiol), en interdisant par arrêté la vente de fleurs et de feuilles brutes de chanvre contenant ce CBD, la molécule non psychotrope du cannabis.

Cette politique prohibitive, dont la faillite est évidente, pousse les milliers de personnes qui trouvent dans la fleur de chanvre un substitut au cannabis à se tourner vers les dealers au risque de leur santé : cela prouve, une nouvelle fois, que le combat pour la santé des consommateurs n'a jamais été votre objectif. Vous faites un vrai cadeau aux trafiquants !

Alors que tant de nos concitoyens trouvent dans ce produit de vraies vertus apaisantes et relaxantes (Exclamations amusées sur des travées du groupe Les Républicains.), dans une société toujours plus sous tension, où la consommation d'anxiolytiques frise des records, vous les renvoyez dans l'illégalité.

Vous freinez le développement d'une filière du chanvre prometteuse, répondant aux attentes sociétales et environnementales, permettant de développer tout le potentiel extraordinaire de cette plante complexe et pleine d'atouts. Nos agriculteurs ne vous remercient pas.

En faisant prospérer la philosophie de l'interdit, celle-là même qui a perdu devant nombre de juridictions, de la Cour de justice de l'Union européenne à la Cour de cassation, et qui perdra peut-être demain devant le Conseil d'État, vous mettez en évidence l'étroitesse de la vision que vous avez du sujet, prisonniers de votre politique de répression inefficace et dangereuse contre le cannabis.

Nous sommes les leaders européens du chanvre, et nous allons prendre un retard considérable sur tous nos voisins européens, notamment sur les Allemands, dont le pragmatisme tranche avec votre dogmatisme paternaliste et contre-productif.

Si la loi française interdit toute drogue à l'exception de certaines comme le tabac ou l'alcool, rappelons que le CBD n'est ni un stupéfiant ni un produit nocif pour la santé.

Alors, monsieur le ministre, allez-vous revenir sur ces décrets ubuesques interdisant le CBD, comme l'ont fait la grande majorité de nos voisins européens ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mmes Florence Blatrix Contat et Marie-Arlette Carlotti, MM. Yan Chantrel et Joël Guerriau applaudissent également.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 13/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 12/01/2022

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Daniel Salmon, merci de votre question, qui porte sur la culture du chanvre et, plus généralement, sur la consommation de CBD.

Par un arrêté publié le 31 décembre dernier, la France a confirmé l'autorisation de cultiver du chanvre dans notre pays. Vous avez raison de souligner qu'il s'agit là d'un enjeu agricole et industriel important. On parle beaucoup du chanvre en rapport à une forme de consommation, alors qu'en réalité ce produit est surtout utilisé pour l'isolation thermique ou pour bien d'autres usages. Nous souhaitons qu'il puisse être cultivé puis commercialisé, et nous entendons soutenir la filière agricole de chanvre dans la durée.

L'autre question est celle de savoir s'il faut aller au-delà et autoriser la consommation du chanvre.

Deux produits tirés du chanvre sont considérés comme psychoactifs, le CBD et le THC (tétrahydrocannabinol). Le THC donne les effets euphorisants recherchés par les consommateurs de drogue. Le CBD est un peu « borderline », si vous me permettez l'expression. On considère qu'il a des effets relaxants, et certains lui prêtent des vertus thérapeutiques ou de relaxation – attention, car la loi interdit de prêter au CBD une quelconque vertu thérapeutique, qui n'est aucunement reconnue scientifiquement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, cela reste un produit qui se fume, de fait. Or fumer n'est pas bon pour la santé. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

D'un point de vue sanitaire, il a été considéré que la consommation à usage individuel de CBD ne devait pas être autorisée, que ce soit sous forme directe de feuilles et de fleurs, vendues dans certaines boutiques, mais également sous forme déviée : on en trouvait dans des pots-pourris ou dans des tisanes, alors que chacun sait ce que les gens pouvaient en faire.

C'est donc ce que prévoit cet arrêté. Nous encourageons la culture de chanvre, mais non sa consommation individuelle. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour la réplique.

M. Daniel Salmon. Emmanuel Macron s'était présenté sous le costume d'un libéral moderne. En fait c'est un jeune conservateur, un type « Fillon II » ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et du RDPI. – M. Thomas Dossus applaudit.)

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