Question de M. GREMILLET Daniel (Vosges - Les Républicains) publiée le 06/01/2022

Question posée en séance publique le 05/01/2022

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Daniel Gremillet. C'est avec une réelle anxiété que nous avons pris connaissance du projet d'acte délégué sur la taxonomie verte proposé par la Commission européenne, car il est en retrait par rapport à la résolution adoptée par le Sénat le 7 décembre 2021.

L'énergie nucléaire serait assimilée non pas à une activité durable, mais à une activité transitoire. Elle serait mise sur le même plan que le gaz naturel. C'est une complète aberration en ce qui concerne le climat, car les émissions sont sans commune mesure : selon l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, dite Agence de la transition écologique), une centrale nucléaire émet 6 grammes de CO2 par kilowattheure, contre 418 grammes pour une centrale à gaz. C'est aussi un sérieux revers vis-à-vis de notre partenaire allemand.

L'énergie nucléaire serait soumise à une information spécifique, ne garantissant pas la neutralité technologique avec les autres énergies décarbonées. Elle ne serait intégrée que dans un an, alors que la taxonomie est applicable depuis le 1er janvier : comment justifier un tel décalage ? Les rénovations de centrales seraient éligibles jusqu'en 2040 et leur construction jusqu'en 2045, alors que tous les scénarios démontrent que les besoins d'investissement vont bien au-delà de 2045.

Ce statut transitoire est un non-sens au regard de l'objectif cardinal visé par la taxinomie : l'atteinte de la neutralité carbone.

Aussi, madame la ministre, ma question est simple : quelle est la position du Gouvernement sur ce projet ? Que compte-t-il faire pour obtenir un statut, une information, un délai et des conditions plus favorables pour l'énergie nucléaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Industrie publiée le 06/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 05/01/2022

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'industrie.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie. Monsieur le sénateur Gremillet, il y a quelques mois, j'avais pris l'engagement devant votre assemblée d'œuvrer avec mes collègues Bruno Le Maire, Barbara Pompili et Clément Beaune pour l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie européenne.

Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est désormais chose faite ! C'est très exactement ce qui vient de se passer, car le texte aujourd'hui proposé par la Commission européenne – il n'est pas encore adopté, je le rappelle – précise très clairement que le nucléaire est une énergie bas-carbone et sûre, ce qui nous donne les outils de financer nos projets dans le cadre de la finance durable.

C'est une étape décisive pour la filière nucléaire et ses 220 000 professionnels.

Mme Sophie Primas. Non !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. C'est une étape décisive pour notre mix énergétique, dans lequel le nucléaire garantit une énergie stable, bon marché et accessible.

C'est une étape décisive pour notre indépendance énergétique.

On voit bien aujourd'hui, alors que les prix du gaz et de l'électricité croissent, la protection que nous donne l'énergie nucléaire. Je rappelle aussi que les deux derniers sites européens de production d'aluminium sont situés en France. C'est du fait de cet avantage que nous avançons. (M. François Bonhomme et Mme Sophie Primas s'exclament.)

Nous poursuivons la stratégie du Président de la République pour une transition écologique. Notre avenir énergétique repose sur deux jambes : les énergies renouvelables et le nucléaire. Nous investissons massivement dans ces deux secteurs.

M. François Bonhomme. En décalage !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Ainsi, nous avons dédié 470 millions d'euros dans le plan France Relance à la modernisation de notre tissu industriel et 1 milliard d'euros dans le plan France 2030 aux technologies les plus innovantes – je pense aux SMR (Small Modular Reactors), sur lesquels le Président de la République s'est engagé.

M. François Bonhomme. Et la question !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Nous disposons donc aujourd'hui de tous les moyens pour financer la transition nucléaire avec des financements privés. Enfin, il est faux de dire que la mise en place est décalée d'un an. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Sophie Primas. Ce n'est pas une réponse !

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.

M. Daniel Gremillet. Madame la ministre, je suis désolé de vous dire qu'une énergie considérée comme transitoire n'est pas qualifiée de la même manière en termes de financements. Vous le savez parfaitement !

Ce statut transitoire est une véritable provocation pour l'indépendance énergétique de la France, alors que nos choix en la matière font partie de la colonne vertébrale de l'Union européenne. Il dissuadera les financeurs de s'engager dans la filière nucléaire.

Comment voulez-vous inciter les chercheurs et les jeunes à s'engager dans une filière transitoire ?

Cela pèsera lourdement sur la compétitivité de notre économie et le pouvoir d'achat des ménages.

Où est le retour en grâce du nucléaire annoncé à l'automne par le Président de la République ? La présidence française du Conseil de l'Union européenne commence bien mal ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

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