Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SER) publiée le 13/01/2022

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation des patients issus des territoires sous-dotés en professionnels de santé qui, en l'absence médecins traitant sur leur territoire, sont contraints de se rendre aux urgences pour bénéficier de soins.
Depuis décembre 2021, dès qu'un patient se rend aux urgences, il doit désormais s'acquitter au préalable d'un « forfait de participation des patients aux urgences » (FPU).
Or, dans la grande majorité des territoires ruraux, l'accès à la médecine de ville n'est plus possible. Les urgences restent donc l'unique recours proposé à la population pour se soigner. Ce forfait sanctionne donc essentiellement les assurés issus des territoires ruraux qui se rendent aux urgences pour des soins considérés comme non urgents, en raison des pénuries de médecins généralistes et de la disparition des gardes le soir et le week-end.
Aussi, face aux déserts médicaux, au manque de dotations, aux départs de personnel, aux difficultés d'accès aux soins, il lui demande de soutenir la proposition de l'AMRF, afin que les patients privés de médecins, faute d'une densité suffisante de professionnels de santé, soient ajoutés à la liste des personnes exonérées intégralement de ce forfait.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 19/01/2022

Réponse apportée en séance publique le 18/01/2022

Mme le président. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 2049, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Patrice Joly. Depuis le 1er janvier 2022, le forfait patient urgences (FPU) est entré en vigueur. Il s'agit d'un forfait de 19,61 euros facturé à toute personne qui se rend aux urgences d'un hôpital pour des soins non suivis d'une hospitalisation.

Dans les déserts médicaux, ce forfait constitue une double peine pour les habitants.

La première est liée à l'impossibilité pour les habitants des territoires ruraux d'accéder à la médecine de ville, et cela n'est pas près de changer puisque le nombre de médecins qui pourraient partir à la retraite au cours des dix prochaines années est très élevé dans certains départements.

Ainsi, dans la Nièvre, les deux tiers d'entre eux ont plus de 55 ans. Comment pourra-t-on répondre aux besoins des Nivernais alors que, entre 2010 et 2017, le nombre de médecins a déjà diminué de 27 % ?

Aujourd'hui, il y a moins de sept médecins généralistes pour 10 000 Nivernais, sachant qu'une part importante d'entre eux exerce dans l'agglomération de Nevers.

À cette pénurie de médecins généralistes, il faut ajouter la disparition des gardes, le soir et le week-end, et le refus des quelques médecins restants à prendre de nouveaux patients, faute de temps.

Les urgences restent donc souvent l'unique recours proposé à la population pour se soigner.

Un autre phénomène encore plus inquiétant découle de ce forfait : l'accentuation des inégalités sociales d'accès aux soins. En effet, les personnes les plus précaires retardent malheureusement leurs soins faute de pouvoir avancer les frais et finissent aux urgences dans un état très critique, alors que cela aurait pu être évité.

Devant de telles inégalités, territoriales et sociales d'accès aux soins et, par incidence, d'espérance de vie, je vous demande, comme l'a fait l'Association des maires ruraux de France (AMRF), que les patients vivant dans des déserts médicaux, notamment dans le monde rural, et ceux qui sont privés de médecins soient ajoutés à la liste des personnes exonérées intégralement de ce forfait.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, vous appelez l'attention du ministre des solidarités et de la santé sur les conséquences de la mise en place du forfait patient urgences, notamment pour les personnes qui n'auraient pas accès à un médecin traitant, faute d'une densité suffisante de professionnels de santé.

Le Gouvernement est particulièrement sensible à la nécessité de garantir un véritable accès aux soins sur l'ensemble du territoire.

Je rappelle toutefois qu'une participation était déjà acquittée précédemment par les patients lors de leurs passages aux urgences.

La mise en place du forfait patient urgences n'augmente pas le reste à charge, mais elle simplifie les modalités de calcul de la participation en la forfaitisant. Le montant de cette participation forfaitaire a été calibré de manière à maintenir le niveau moyen de participation à l'identique.

Cette forfaitisation permet, notamment, une meilleure protection des usagers nécessitant des soins complexes, dont la participation pouvait auparavant atteindre un montant de 60 euros en moyenne.

L'accès aux urgences est toujours possible pour les patients, même s'ils n'ont pas leur carte Vitale ou leur pièce d'identité.

Par ailleurs, ce forfait est pris en charge par les complémentaires santé. La question des restes à charge est donc liée à l'accès des assurés à une couverture complémentaire, sachant que seuls 4 % des assurés ne disposent pas d'une telle couverture.

Le Gouvernement est pleinement engagé pour faciliter le recours à cette couverture. Ainsi, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 a permis l'attribution automatique ou simplifiée de la complémentaire santé solidaire aux bénéficiaires du revenu de solidarité active ou de l'allocation de solidarité aux personnes âgées.

Mme le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.

M. Patrice Joly. Madame la ministre, 3 millions de Français ne sont pas couverts aujourd'hui encore par une complémentaire santé, faute de moyens. Ces personnes retardent les soins, ce qui aggrave leur état et entraîne leur hospitalisation. Il est inacceptable que la santé devienne aujourd'hui un luxe alimenté par ce forfait !

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