Question de Mme de LA PROVÔTÉ Sonia (Calvados - UC) publiée le 23/12/2021
Mme Sonia de La Provôté attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé au sujet de la situation particulièrement difficile à laquelle doivent faire face le centre hospitalier de Lisieux et son personnel.
En effet, de nombreux services sont en tension et d'autres doivent tout simplement fermer.
Le service de médecine interne, ou « médecine polyvalente », qui avait pu rouvrir après une fermeture de juillet à l'automne 2020, doit désormais fusionner avec le service de gastro- entérologie, faute de médecins : sur les trois médecins qui composaient le service, l'un part et un autre est passé à temps partiel. Faute de remplaçants, la direction a été obligée de réorganiser ses services ; le service de gastro-entérologie va perdre 15 lits sur 25 et fusionner avec la médecine interne qui va perdre 10 lits sur 25. Cela fait donc une perte de 25 lits.
Si l'on compte l'ensemble des pertes de lits, cela fait 30 lits en moins depuis 18 mois pour aboutir à l'heure actuelle à 236 lits (médecine, chirurgie, obstétrique et pédiatrie).
En outre, d'autres services sont aussi sous la menace d'une réorganisation puisque des départs en retraite sont à prévoir dans les 2 ou 3 années à venir, notamment les services de pneumologie et de réanimation.
Ce manque de lits amenait et amènera encore davantage à répartir les patients non pas selon le service adéquat mais selon les places disponibles, ce qui pose un réel souci en matière de soins et risque d'emporter une perte de chance.
La situation ne peut, à l'heure actuelle, être le seul fait de la crise sanitaire, car au 14 décembre 2021 seuls 4 lits de réanimation sont occupés par des patients covid.
Lors d'une récente réunion avec l'agence régionale de santé (ARS), la réponse qui a été adressée au personnel a été conjoncturelle (report de congés, majoration des émoluments, heures supplémentaires etc.). Le plan blanc se voulait être un dispositif d'urgence, il ne peut pas être une réponse structurelle sans quoi il aggraverait l'épuisement et nuirait encore davantage à l'attractivité des professions médicales : le fonctionnement dégradé ne peut être conçu comme pérenne.
Si le Ségur a permis des avancées pour les médecins en début de carrière, il n'a pas fondamentalement arrangé la situation pour les médecins qui ont déjà une dizaine d'année d'expérience. Au-delà de la situation du centre hospitalier de Lisieux - qui est un enjeu majeur en matière d'accès aux soins, car il est un centre structurant localement - demeurent plus généralement de réels problèmes d'attractivité et de re-mobilisation de l'hôpital public, et de manque de lits.
Aussi, elle souhaiterait savoir les mesures qu'il envisage de prendre pour répondre à cette situation.
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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 26/01/2022
Réponse apportée en séance publique le 25/01/2022
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, auteure de la question n° 2019, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Mme Sonia de La Provôté. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation du centre hospitalier de Lisieux et j'associe à cette question, une fois n'est pas coutume, ma collègue députée Nathalie Porte.
Le service de médecine interne du centre hospitalier de Lisieux doit désormais fusionner avec le service de gastroentérologie par manque de médecins. Quelque 25 lits seront fermés, soit 10 % de la capacité de l'hôpital.
L'été dernier, les urgences de nuit ont fermé pendant trois semaines. La semaine dernière, les urgences pédiatriques ont fermé partiellement, avec pour conséquence la perte de 3 lits de néonatologie. Le centre hospitalier de Lisieux est pourtant l'hôpital référent pour l'accueil local des enfants prématurés.
Depuis juillet 2020, on dénombre au total une perte de plus de 30 lits, de sorte qu'il n'en reste plus que 255. Malheureusement, la tendance se poursuit et d'autres services sont sous la menace d'une réorganisation du fait des départs à la retraite, notamment en pneumologie et en réanimation.
Certes la crise sanitaire a des conséquences lourdes en termes de ressources humaines, mais elle n'explique pas tout, car seuls 3 lits de réanimation sont occupés par des patients atteints du covid.
Récemment, l'ARS a proposé des réponses conjoncturelles comme le report de congés, la majoration des émoluments ou la possibilité d'effectuer des heures supplémentaires. Or le plan blanc doit rester un dispositif d'urgence et ne peut, par nature, devenir pérenne.
Tout le monde le sait et vous aussi, monsieur le secrétaire d'État, le problème est structurel. Au-delà du centre hospitalier de Lisieux, partout, l'hôpital public est confronté au même problème. En atteste constitution d'une commission d'enquête sénatoriale sur la situation de l'hôpital et le système de santé en France, dont les travaux sont en cours.
Au-delà des murs, au-delà même des moyens dégagés par le Ségur de la santé, aussi importants soient-ils, c'est dans l'humain qu'il faut investir, dans les médecins et les soignants.
Qu'est-il prévu, monsieur le secrétaire d'État, pour améliorer le fonctionnement du centre hospitalier de Lisieux, le plus rapidement possible, car il est indispensable aux habitants ? Il faut fixer des objectifs en matière de calendrier, de chiffres et de montants.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Madame la sénatrice, le centre hospitalier de Lisieux connaît en effet des difficultés de recrutement médical, qui l'ont conduit à adapter temporairement l'organisation de ses activités, pour garantir la sécurité des prises en charge tout en assurant la gestion de l'épidémie, tant pour les soins que pour la vaccination.
En lien avec le CHU de Caen, l'unité de formation et de recherche (UFR) Santé et l'ARS, il mène une politique active pour stabiliser les équipes médicales et assurer leur renouvellement.
Un certain nombre de mesures ont été prises, dont la proposition faite aux jeunes médecins d'effectuer un post-internat, notamment en temps partagé avec le CHU, l'ouverture de postes d'internes pour faire connaître l'établissement aux jeunes qui sont en formation, l'autorisation d'exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne, la création d'un vivier de remplaçants et la mise en place de la prime de solidarité territoriale pour inciter les praticiens hospitaliers à consacrer une partie de leur temps de travail à des remplacements.
Le centre hospitalier de Lisieux occupe une place essentielle au sein du groupement hospitalier de territoire Normandie Centre. C'est la raison pour laquelle l'établissement compte parmi les plus soutenus de la région, au titre du Ségur.
Il bénéficiera ainsi d'une aide de l'État d'un montant de 26 millions d'euros afin d'assurer la pérennité de son offre de soins et de renforcer son attractivité. Un projet de modernisation et de mise aux normes impliquant le réaménagement de son bâtiment principal d'hospitalisation pourra ainsi être conduit. De plus, 11 millions d'euros lui seront alloués afin de restaurer ses capacités financières et de garantir ainsi une reprise durable de l'investissement courant.
Par ailleurs, l'investissement de l'agence régionale de santé auprès du centre hospitalier de Lisieux s'inscrit dans la durée. Une aide de 1,3 million d'euros accompagnera le projet de reconstruction du service d'urgences. Des investissements du quotidien à hauteur de 700 000 euros, en 2021, ont déjà permis de financer des verticalisateurs, des brancards, des fauteuils de dialyse, entre autres matériels. L'établissement a également reçu un soutien de 2 millions d'euros en crédits non reconductibles pour faire face à des difficultés de trésorerie.
Un travail global est en cours qui porte véritablement sur la qualité des soins et sur l'activité professionnelle.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour la réplique.
Mme Sonia de La Provôté. Monsieur le secrétaire d'État, merci de votre réponse, mais le plus bel hôpital du monde ne soignera bien que s'il dispose de soignants à l'intérieur. Même si l'investissement est important, le véritable sujet reste celui du fonctionnement.
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