Question de M. CUYPERS Pierre (Seine-et-Marne - Les Républicains) publiée le 18/11/2021
Question posée en séance publique le 17/11/2021
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. Monsieur le Premier ministre, la crise nous montre chaque jour que notre pays est devenu complètement dépendant de l'extérieur, y compris dans les domaines les plus stratégiques.
Je pourrais citer les médicaments ou les composants électroniques, mais je vais prendre un exemple dont on parle beaucoup moins, celui de notre agriculture.
Depuis le début de l'année, nous assistons en Europe et particulièrement en France, à un triplement du prix des fertilisants indispensables à la croissance des cultures végétales sur tous nos territoires. Cette situation fait peser un grand risque économique et social à notre pays, qui doit faire face à un surcoût estimé à plus de 4 milliards d'euros.
À cela s'ajouterait une pénurie d'azote, qui représente un véritable danger pour notre souveraineté alimentaire. Les productions accuseraient une diminution de leur teneur en protéines, tandis que les rendements seraient fortement affectés.
Cette inquiétante hausse des prix prend notamment sa source dans une flambée des prix du gaz naturel, indispensable à la fabrication de l'azote, et qui est presque intégralement importé. Elle est amplifiée par l'existence de barrières tarifaires européennes sur les importations de fertilisants, dont des droits de douane et des taxes antidumping.
Dans ce contexte, monsieur le Premier ministre et vous aussi, monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation vous devez agir ! Nous avons perdu des pans entiers de notre industrie ; en sera-t-il de même pour notre agriculture ?
Aussi, à l'aube de la présidence française de l'Union européenne, pouvez-vous décrire, ici, devant la représentation nationale, ce que vous comptez faire au niveau des instances européennes pour éviter ce cataclysme annoncé ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. Mme Nassimah Dindar applaudit également.)
Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 18/11/2021
Réponse apportée en séance publique le 17/11/2021
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Pierre Cuypers, vous avez commencé par mentionner la souveraineté agroalimentaire ; je ne crois pas avoir besoin de démontrer à quel point, depuis le premier jour où j'ai eu l'honneur de piloter ce ministère de l'agriculture, j'ai mis ce sujet au centre de toutes les politiques publiques.
D'ailleurs, lorsque le Président de la République a annoncé le plan France 2030, nous avions précisé, avant même le début de la crise des prix de l'engrais, que nous investirions dans la filière des engrais pour regagner notre autonomie en production de fertilisants. Je partage, en effet, avec vous l'impérieuse nécessité de regagner une souveraineté, y compris dans la filière des engrais.
Votre question a trait aux risques conjoncturels de pénurie, qui portent sur deux aspects principaux.
Premièrement, pour faire face aux difficultés d'approvisionnement, de livraison et de lutte contre la spéculation sur les marchés, nous travaillons depuis plusieurs semaines avec l'ensemble des filières pour mettre en place un plan d'approvisionnement spécifique aux cultures, car disons-le clairement l'engrais, c'est la nourriture des plantes, et, s'il n'y a pas d'engrais, il n'y aura pas de production.
Deuxièmement, la question du prix rejoint celle des tarifs douaniers instaurés au niveau européen. Je sais que vous êtes très actif sur le sujet, mais je n'ai pas attendu votre interpellation pour agir. Dès lundi dernier, j'étais à Bruxelles et, avec plusieurs de mes collègues européens, nous avons demandé à la Commission européenne de réétudier la question des tarifs douaniers, afin que nous puissions trouver des solutions. Les discussions sont en cours.
Si vous me le permettez, monsieur le sénateur, j'élargirai le champ de votre question à l'international. En effet, ma mobilisation est totale sur le marché national, car la situation m'inspire une crainte très forte. Toutefois, je redoute encore plus et c'est une crainte immense ce qui est en train de se passer à l'international, car derrière la crise des engrais se prépare peut-être une crise alimentaire mondiale de très grande ampleur. J'ai d'ailleurs sollicité l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) en début de semaine sur la question.
Il faut une mobilisation non seulement européenne, mais aussi mondiale sur la production d'engrais, car sa chute pourrait entraîner une pénurie alimentaire qui aurait de grandes conséquences à l'international. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.
M. Pierre Cuypers. Monsieur le ministre, je partage les réflexions que vous venez d'exposer.
Toutefois, je veux mettre en garde avec beaucoup de sérieux le Premier ministre, afin que ce Gouvernement ne propose pas comme solution pour l'agriculture un morceau de gruyère moins consistant que plein de trous (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
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