Question de M. MOUILLER Philippe (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 18/11/2021
Question posée en séance publique le 17/11/2021
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour le groupe Les Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (Hcaam), qui constate, comme nous tous, l'augmentation des déficits de la sécurité sociale ceux-ci atteindront 22 milliards d'euros en 2022 vient de proposer un nouveau et énième scénario pour sortir de ces déficits chroniques, lequel s'apparente à la création d'une « grande sécu ».
Ce n'est pas un hasard. Vous avez ainsi déclaré en octobre : « j'ai semé des petits cailloux pendant la crise sanitaire [
] et je n'ai vu personne s'en plaindre ».
Ce scénario coûterait, au minimum, plus de 20 milliards d'euros aux finances publiques, pourtant déjà bien mal en point. Il est vrai que le « quoi qu'il en coûte » permet toutes les audaces !
L'essentiel n'est pourtant pas là. Derrière cette proposition, on retrouve le dessein, porté depuis dix ans déjà, avec François Hollande puis avec Emmanuel Macron, d'étatiser notre système de santé.
Comment peut-on croire encore que l'État, champion des déficits, pourrait se charger de nouvelles dépenses ? S'il était aussi bon gestionnaire, cela se saurait, et les Français n'auraient pas à supporter à la fois des impôts record et une dette qui ne cesse de se creuser.
Pour revenir à la santé et à l'hôpital public, si celui-ci n'était pas suradministré, les patients seraient peut-être mieux accueillis et les personnels soignants, plus nombreux, travailleraient peut-être dans de meilleures conditions !
Faute de réformes et de moyens, l'État régule les dépenses de santé par la pénurie ; c'est cela la réalité à laquelle les patients sont aujourd'hui confrontés.
Étatiser les dépenses de santé, c'est aller chercher comme remède la cause même de nos déboires.
Monsieur le ministre, ne croyez-vous pas qu'étatisation rime avec grande illusion, et monopole d'État avec déficit ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 18/11/2021
Réponse apportée en séance publique le 17/11/2021
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, monsieur le sénateur, de me permettre de discuter d'un rapport que ni vous ni moi n'avons lu, mais qui est d'ores et déjà largement commenté.
Ni vous ni moi ne l'avons lu, puisqu'il sort demain.
Il fait pourtant couler beaucoup d'encre. C'est intéressant : peut-être touchons-nous un point sensible ? Quel est-il ? Les complémentaires santé sont des acteurs majeurs de la protection sociale, mais elles coûtent cher. Leurs coûts de gestion atteignent 19 % à 20 %, alors que ceux de l'assurance maladie sont à 3 % ou 4 %.
M. Vincent Segouin. C'est incomparable, vous faites de la démagogie !
M. Olivier Véran, ministre. Cette différence pèse sur le budget des ménages ; il s'agit donc d'un enjeu de pouvoir d'achat, encore plus important pour les retraités, les étudiants ou les personnes sans emploi.
Nous nous demandons comment améliorer le pouvoir d'achat des retraités ; il me semble que cette question fait l'objet d'un consensus dans cet hémicycle.
Néanmoins, confier au Hcaam, comme je l'ai fait, une mission de réflexion sur le rôle de chacun des acteurs de la protection sociale, ce qui arrive tous les dix ans, n'emporte aucune conséquence quant à des démarches gouvernementales. Il n'y a pas de réforme sous-jacente à cette réflexion, mais il est intéressant de se poser la question.
Vous le voyez bien : avant même que le rapport soit sorti, on ne compte plus les tribunes et les commentaires qui décrivent déjà ce qu'il faudrait faire ou ne pas faire.
Attendons le rapport. Les premières conclusions qui me sont parvenues, que je retrouve dans la presse, indiquent qu'une bascule des complémentaires santé vers l'assurance maladie équivaudrait à une bascule d'une cotisation indirecte que les Français payent chaque mois à leur complémentaire vers une cotisation directe, c'est-à-dire une hausse des cotisations ou des impôts.
Or, vous le savez, le Gouvernement n'augmentera les impôts sous aucun prétexte. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est déjà une façon de vous répondre quant à l'avenir de cette proposition.
Ensuite, il y a un enjeu d'emplois dans le secteur des complémentaires santé. Personne ne souhaite, évidemment, que des dizaines de milliers de nos concitoyens perdent leur emploi.
Se poser la question de l'avenir de la protection sociale est très sain dans une démocratie ; confier cette mission à une instance que vous avez créée quand vous étiez au pouvoir et qui est justement chargée de mener des réflexions sur ce sujet me semble être de bon aloi.
Quant aux conclusions, aux post-conclusions et aux synthèses déjà écrites, permettez-moi de vous dire qu'elles n'engagent ni le Gouvernement ni, au premier chef, le ministre que je suis. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, je vous entends et nous sommes d'accord sur la nécessité de réécrire les missions des complémentaires santé.
Toutefois, nous connaissons trop bien la méthode de ce gouvernement et les annonces nous inquiètent énormément,
M. Olivier Véran, ministre. Il n'y a pas d'annonces !
M. Philippe Mouiller. même si le rapport ne sort que demain. Si les fuites sont partout dans les médias, c'est bien qu'elles découlent d'une réflexion et qu'elles portent un message.
Notre inquiétude est la suivante : une « grande sécu » équivaudrait à une remise en cause des principes fondamentaux de 1945, il faut l'entendre. Ce serait, en outre, la fin de la médecine libérale, à laquelle nous sommes attachés.
Surtout, cela reviendrait à mettre en uvre un grand principe et à amplifier les déficits. Nous serons donc très vigilants quant à vos avis et à vos conclusions. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)
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