Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 11/11/2021

Question posée en séance publique le 10/11/2021

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Laure Darcos. Ma question s'adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Monsieur le ministre, l'hôpital public va mal et les soignants sont au bord de la crise de nerfs. Quand le Gouvernement communique sur les milliards d'euros mobilisés dans le cadre du Ségur de la santé, sur le terrain, les services peinent à assurer leurs missions auprès des patients.

Remise en cause des vocations, multiplication des burn-out, pénurie de soignants, difficultés de recrutement ou encore fermetures de lit : l'hôpital fait face à des difficultés sans fin, dans le prolongement de la crise de la covid-19.

Puisque vous avez dit à ma collègue Florence Lassarade qu'elle faisait des amalgames, je vais vous donner un exemple précis, monsieur le ministre, celui des services de pédiatrie, qui sont dans une situation de tension extrême.

Ces services doivent aujourd'hui traiter les conséquences de l'épidémie sur la santé des adolescents, dans un contexte de saturation totale des structures régionales de pédopsychiatrie.

Ils doivent aussi composer avec un départ massif des pédiatres vers le secteur privé, où ces professionnels échappent aux contraintes toujours plus lourdes de la permanence des soins. À titre d'exemple, le service de pédiatrie de l'hôpital d'Orsay, dans mon département, l'Essonne, a perdu quatre de ses six pédiatres, ce qui a conduit à la fermeture de douze lits, qui manquent désormais cruellement.

La pénurie de personnel non médical, quant à elle, entraîne le gel de lits de pédiatrie et de néonatalogie dans tous les hôpitaux comme, par exemple, à Longjumeau.

Enfin, pour ajouter à cette situation désespérante, la survenue précoce de l'épidémie de bronchiolite engendre un nombre record de consultations dans les services hospitaliers.

Dans ce contexte se pose la question cruciale de la compensation de l'extrême pénibilité des gardes de nuit pour les médecins, qui s'élève actuellement à moins de 18 euros brut par heure. Nous savons que cette pénibilité se traduit par des départs multiples de l'hôpital public, en particulier dans les secteurs ne bénéficiant pas d'un calcul horaire du temps de travail des médecins, comme la pédiatrie et la gynécologie-obstétrique. Il s'agit d'un angle mort du Ségur.

Monsieur le ministre, vous avez vous-même reconnu la situation de tension dans les services d'urgence, de pédiatrie et dans les maternités, lors de votre présence au salon de la Fédération hospitalière de France. Comptez-vous prendre une initiative forte en la matière pour éviter la catastrophe annoncée ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre-Antoine Levi applaudit également.)


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 11/11/2021

Réponse apportée en séance publique le 10/11/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, sans vouloir nier les tensions qui peuvent exister, que l'on retrouve chaque année pendant la période automnale et hivernale, mais qui sont, cette année, un peu exacerbées après dix-huit mois de lutte effrénée contre la covid-19, attention, là encore, aux discours alarmistes. Sur le terrain, de tels discours peuvent avoir un effet, qui n'est certainement pas voulu dans votre cas, à savoir l'apparition de tensions ou d'un découragement, alors que, selon moi, les soignants ont, au contraire, besoin de nos encouragements. Je sais que cela ne correspond pas à votre démarche, madame la sénatrice, et je respecte votre question.

D'abord, vous indiquez qu'il y a de moins en moins de pédiatres ; mais oui, puisqu'il y a de moins en moins de médecins ! Et cela va durer pendant encore un peu de temps ; c'est la conséquence du numerus clausus. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)

De nouveau, je vous renvoie, madame la sénatrice, au constat dont vous et moi souffrons aujourd'hui, comme tous les Français : c'est un fait, il faut dix ans pour former un médecin. Je ne peux donc pas, en claquant des doigts, en former 15 000 et mettre des pédiatres partout ! (M. Jean-Claude Tissot s'agace.)

La conséquence de la mauvaise maîtrise médicalisée, pendant près de cinquante ans dans notre pays, c'est que l'on manque aujourd'hui de médecins. J'en fais avec vous le constat et je le déplore, mais nous avons pris la seule décision qui vaille : la suppression du numerus clausus, qui nous permet de former 2 000 médecins supplémentaires cette année par rapport aux promotions du quinquennat précédent. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Ensuite, il y a une charge de travail importante en pédiatrie, liée à l'activité de pédopsychiatrie que vous avez soulignée. Cette croissance de l'activité pédopsychiatrique, nous avions commencé de la constater avant la crise de covid-19, mais elle se poursuit, voire s'accentue. De fait, jusqu'à 30 % des lits de pédiatrie générale sont occupés par des enfants qui relèvent de pédopsychiatrie. Nous avons en effet une véritable pénurie médicale en pédopsychiatrie et, là encore, nous sommes déterminés à en former bien davantage dans les années à venir.

La période hivernale a effectivement commencé fort, avec une bronchiolite arrivée en avance, au moins deux ou trois semaines plus tôt que lors des années précédentes. Il n'y en a pas eu l'année dernière – il y avait peut-être un meilleur respect des gestes barrières –, donc l'immunité conférée et acquise par les enfants est moindre, ce qui provoque une épidémie assez violente.

En revanche, madame la sénatrice, pour ce qui concerne les lits d'obstétrique, toutes les enquêtes dont je dispose montrent qu'il y a, dans notre pays, autant de lits d'obstétrique ouverts qu'à la même période en 2019. Par ailleurs, l'activité de chirurgie, y compris pédiatrique, est plus importante cette année, par exemple dans le secteur privé, qu'il y a deux ans.

M. Jean-Marc Todeschini. Ah…

M. Olivier Véran, ministre. Donc, il y a bien des secteurs en tension, notamment dans les urgences ; la pédiatrie fait face à une très forte demande et, partout où il le faut, nous sommes au contact des hôpitaux afin de les aider à tenir dans cette période.

M. le président. Il faut conclure !

M. Olivier Véran, ministre. Il y a donc effectivement une situation de tension, mais celle-ci n'est pas générale et l'hôpital n'est pas en train de craquer ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

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