Question de M. PATIENT Georges (Guyane - RDPI) publiée le 25/11/2021

M. Georges Patient demande à Mme la ministre de la mer quelles mesures le Gouvernement entend prendre en urgence pour lutter efficacement contre la présence permanente de pêcheurs illégaux dans les eaux françaises de Guyane. En effet, les pêcheurs guyanais constatent quotidiennement que des dizaines de bateaux brésiliens, surinamais et guyaniens (du Guyana) viennent pêcher en toute illégalité dans les eaux guyanaises. Le phénomène ne fait que s'accroître. Si rien n'est fait, ils seront dans quelques années plusieurs centaines de bateaux illégaux poussés par la raréfaction de la ressource halieutique dans les eaux territoriales des pays voisins en raison de la surexploitation. Les réponses apportées par l'État jusqu'à présent – 120 jours de lutte par an, plusieurs dizaines de bateaux raccompagnés à la frontière, saisie et destruction d'une dizaine de bateaux, discussions diplomatiques et recherche d'un accord entre État – ne sont pas du tout satisfaisante au regard de l'ampleur du phénomène. C'est une question de souveraineté, de respect du territoire national et il est insupportable d'entendre répondre qu'il est impossible d'en finir avec ce fléau, que l'objectif des autorités est de seulement en limiter l'importance. Par ailleurs, les pêcheurs guyanais sont contrôlés régulièrement sur l'application de toutes sortes de réglementations (taille des filets, taille des mailles, espèce de poisson, etc.) alors que pendant ce temps, les pêcheurs illégaux n'en respectent aucune. Les conséquences se font déjà sentir avec une chute de plus de 30 % des captures. C'est toute la filière qui est en danger. D'autant plus que depuis deux ans, il est appliqué à nos transformateurs des droits de douane de 15 % pour vendre aux Antilles et dans l'Hexagone quand la pêche surinamaise est écoulée en Europe sans droits de douane ! C'est pourquoi, en plus des mesures d'urgence de lutte contre la pêche illicite, non déclarée er non réglementée (INN), il lui demande les mesures qu'elle entend prendre pour soutenir et développer la filière de la pêche de Guyane.

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Réponse du Ministère de la mer publiée le 01/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 30/11/2021

Mme le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1955, adressée à Mme la ministre de la mer.

M. Georges Patient. Madame la ministre de la mer, je voudrais détourner votre regard de la Manche et du conflit franco-britannique, pour vous amener à le porter en Guyane sur un conflit plus ancien, qui n'est toujours pas réglé et qui, au contraire, s'est aggravé jusqu'à devenir aujourd'hui une véritable crise.

Oui, les pêcheurs guyanais, tout comme ceux de l'Hexagone, sont en grande colère et grondent. Cette colère est légitime face à l'explosion de la pêche clandestine et alors que les autorités réagissent peu en dépit des alertes lancées preuves à l'appui.

A contrario, pour la pêche légale et nos pêcheurs guyanais, c'est un véritable désastre, puisque la production a chuté de 30 % en un an.

Sont en cause les effets ravageurs de la pêche illégale, mais aussi l'arrêt de la moitié de la flotte guyanaise en raison de la pénurie de main-d'œuvre qui est due à la problématique des régularisations et qui a des répercussions sur tout le secteur.

Je ne puis non plus passer sous silence les nombreux contrôles tatillons que subissent nos pêcheurs, à telle enseigne que beaucoup d'entre eux n'hésitent pas à parler de « mise à mort organisée » !

Madame la ministre, il faut maintenant agir, et vite. Tout cela n'a que trop duré. Vous connaissez d'ailleurs cette situation ; je l'avais évoquée avec vous, lorsque vous étiez ministre des outre-mer.

Dans un premier temps, il faut faire respecter la souveraineté de la France dans ses eaux territoriales. Les pêcheurs illégaux sont dans nos eaux ; ce n'est pas une question de diplomatie. Craignons-nous que les autorités brésiliennes ou surinamaises viennent faire la police chez nous ? Comment est-il possible d'accepter d'emblée l'inacceptable ?

Dans un second temps, il faut mettre en place rapidement un véritable plan de développement de la filière, allant de la question des formations à celles du renouvellement de la flotte et de la pêche au large.

Madame la ministre, le temps presse, il faut agir vite !

Mme le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la mer. Monsieur le sénateur Georges Patient, vous l'avez dit, je connais bien ce sujet.

La réponse la plus forte pour lutter contre la pêche illégale est avant tout de structurer la filière légale : plus nous serons en mer, moins d'autres viendront dans nos eaux ! C'est ce que nous avons défendu ensemble, quand j'étais ministre des outre-mer.

Plusieurs mesures ont déjà été prises.

Tout d'abord, dans le cadre du plan d'urgence pour la Guyane, un fonds de redémarrage de l'activité de 2 millions d'euros avait été décidé, mais, comme vous le savez, il n'a jamais été véritablement engagé.

En 2018, j'ai mis en place un plan pour le développement de la filière pêche, qui agrégeait un total de 31 millions d'euros et qui a donné lieu à 97 mesures. Je vais demander l'établissement d'un bilan précis de ce plan, pour évaluer la façon dont les projets ont effectivement été soutenus.

Ensuite, dans le cadre du fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp), la collectivité territoriale de Guyane dispose de près de 7 millions d'euros pour structurer la filière et ainsi occuper le terrain.

Enfin, dans le cadre du plan de relance, quatre projets d'infrastructure ont été retenus en Guyane, pour 1,5 million d'euros.

Je souhaite davantage de présence des navires français dans nos eaux, bien entendu, et je lancerai dans quelques jours une réflexion sur un grand plan « Pêche durable française », dans lequel je souhaite qu'il y ait un volet spécifique pour les outre-mer. Je pense que nous pourrons aller plus loin ensemble dans ce cadre.

L'État doit aussi se donner les moyens de surveillance et de contrôle de nos eaux, ainsi que les capacités de répression. La Guyane est d'ailleurs l'un des rares territoires où les moyens ont été entièrement renouvelés : je pense aux deux patrouilleurs de la marine nationale et à la vedette des douanes.

Les moyens de l'État ont été renforcés, avec deux nouvelles unités. Je pense notamment à l'embarcation relève-filets qui est très efficace pour sanctionner économiquement les illégaux qui fuient, et à la création d'une unité légère des affaires maritimes dans l'Ouest guyanais. Nous avons aussi expérimenté les drones. Peut-être faut-il davantage les utiliser.

L'État doit enfin poursuivre ses actions de déconstruction des navires.

Mme le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre. Or l'on me dit que nous n'allons pas assez vite en la matière. Il faut donc insister sur ce point dans votre région, notamment à Mana, où nous avons localisé des terrains qu'il serait possible d'aménager à cet effet.

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