Question de M. LAURENT Pierre (Paris - CRCE) publiée le 30/09/2021

M. Pierre Laurent attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le sommet de l'ONU sur les systèmes alimentaires qui s'est tenu les 23 et 24 septembre 2021.
Les plans d'ajustement structurels contribuent fortement depuis des dizaines d'années à la situation préoccupante de ces mêmes systèmes alimentaires.
Alors qu'il est essentiel de remédier notamment au fait qu'encore 10 % de l'humanité souffre de la faim, un chiffre en hausse depuis plusieurs années, force est de constater néanmoins que le sommet cité plus haut a fait l'objet de nombreuses critiques. Mi-août 2021, le rapporteur de l'ONU sur le droit à l'alimentation déplorait dans une note publique un manque de transparence dans la gouvernance du sommet et listait une série de mesures urgentes à prendre pour en faire un événement véritablement multilatéral. Le 22 septembre il a également indiqué que ce sommet est un échec et qu'il se présente à tort comme un “sommet des peuples”. Il a enfin indiqué que plus de 500 organisations représentant des millions de personnes avaient essayé de participer aux instances préparatoires du sommet et avaient constaté que leur voix était marginalisée. En octobre 2020, le « mécanisme de la société civile », qui siège au Comité de la sécurité alimentaire (CSA) de l'organisation des nations unies pour l'agriculture et l'environnement (FAO) et représente 550 organisations, avait dénoncé le manque de légitimité de cette initiative, issue d'un partenariat entre l'ONU et le Forum économique mondial, et indiqué son intention de la boycotter. Fin juillet le panel de scientifiques du International Panel of Experts on Sustainable Food Systems (IPES-food) démissionnait des instances préparatoires. L'organisme Alliance for food sovereignty for Africa (AFSA) a estimé quant à elle que la dénommée AGRA (Alliance for a Green Revolution in Africa), très liée à des grandes multinationales et dont la présidente a été nommée envoyée spéciale à la conférence de l'ONU, poursuivait une politique qui augmente la dépendance des paysans vis-à-vis des entreprises et des chaînes d'approvisionnement en intrants tout en nuisant à l'environnement et empêche une vraie transformation du système agricole actuel. A l'instar de nombreux autres acteurs l'AFSA estime que les investissements visant l'amélioration des performances du secteur agricole doivent résulter d'une démarche démocratique et sensible aux aspirations des paysans et proteste contre le fait qu'à l'AGRA aucun agriculteur ne siège dans le conseil d'administration.
Il lui demande quelles actions la France compte entreprendre en vue d'une prise en compte de ces critiques au niveau national, européen et mondial visant à empêcher que les intérêts de grands groupes privés prennent le pas sur l'intérêt général de l'humanité et par conséquent à améliorer la démarche de l'ONU en matière de systèmes alimentaires.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 24/02/2022

Le Sommet des Nations unies sur les systèmes alimentaires, convoqué par le secrétaire général des Nations unies les 23 et 24 septembre derniers, a mobilisé la communauté internationale sur l'enjeu de la transition vers des systèmes alimentaires durables, à la fois sous l'angle du développement et sous celui des politiques internes. Convaincue que les systèmes alimentaires font partie de la solution pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), en particulier l'ODD 2 « Faim Zéro », la France a participé à ce sommet pour mettre en avant sa vision de systèmes alimentaires sains et durables. La France a pris note, au cours de la préparation du sommet, des positions émanant notamment de plusieurs organisations de la société civile, qui ont critiqué l'opacité du processus et fait part de leurs préoccupations sur les sujets d'inclusivité, de durabilité et de représentation des intérêts de l'agriculture familiale. Tout en constatant que le processus de préparation de ce sommet, organisé sous la responsabilité des Nations unies, a pu parfois manquer de lisibilité, la France note que les ONG n'en ont pas été absentes. La France a, par ailleurs, plaidé pour une association accrue du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) à ce processus, en tant que plateforme internationale inclusive, qui permet à toutes les parties prenantes (gouvernements, société civile, secteur privé et communauté scientifique) de discuter ensemble des politiques pour lutter contre la faim et la malnutrition dans le monde. À cet égard, la France est particulièrement vigilante quant au dispositif de suivi des engagements pris lors du sommet, qui n'est pas fixé dans tous ses détails, mais qui reposera sur un centre de coordination associant les trois agences des Nations unies ayant leur siège à Rome : l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Programme alimentaire mondial (PAM), et le Fonds international de développement agricole (FIDA). La France plaide pour donner au CSA un rôle majeur dans le suivi du sommet, puisqu'il représente l'enceinte la plus légitime et inclusive pour discuter des questions relatives aux systèmes alimentaires. Le CSA est, en effet, un acteur clé de la gouvernance mondiale de la sécurité alimentaire et de la nutrition. La France appelle à renforcer le CSA, y compris le Groupe d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) qui lui est rattaché et dont les membres sont reconnus pour leur compétence, leur indépendance et leur diversité. Il est à noter que la mobilisation de la France et de ses partenaires, parmi lesquels des organisations internationales, des ONG et des organisations de petits producteurs, a permis de susciter une mobilisation en faveur de l'agroécologie et des cantines scolaires, avec le lancement de deux coalitions multi-acteurs dédiées à ces sujets.

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