Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 16/09/2021
M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fait que certains règlements de conseils départementaux ou régionaux renvoient des décisions à l'arbitrage des structures internes sans préciser pour autant ni la composition ni le fonctionnement de ces structures. C'est par exemple le cas d'un règlement intérieur qui indique que la répartition du temps de parole est effectuée par la « conférence des présidents » sans autre précision. Dans ce cas, le président peut finalement faire ce qu'il veut en y invitant des vice-présidents ou de simples conseillers délégués. Face à ce vide juridique, il lui demande si une telle situation est compatible avec les finalités poursuivies par les articles correspondants du CGCT.
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Transmise au Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales
Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/03/2022
L'article L. 3121-8 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose que : « Le conseil départemental établit son règlement intérieur dans les trois mois qui suivent son renouvellement. Le règlement intérieur précédemment adopté continue à s'appliquer jusqu'à l'établissement du nouveau règlement. Le règlement intérieur détermine les droits des groupes d'élus régulièrement constitués et les droits spécifiques des groupes minoritaires ou s'étant déclaré d'opposition. Le règlement intérieur peut être déféré devant le tribunal administratif. » Pour le conseil régional, l'article L. 4132-6 du même code prévoit des dispositions identiques. Le règlement intérieur a vocation à régir le fonctionnement interne des assemblées. Il ne peut toutefois pas déroger aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur. Il précise également les modalités pratiques d'application des droits reconnus aux membres de ces assemblées. Si aucune disposition législative ou réglementaire ne concerne expressément le temps de parole, les conseillers en disposent en application du principe posé par l'article 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 aux termes duquel "La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi". Le Conseil d'État a en outre reconnu le caractère opérant du moyen tenant à la méconnaissance du droit à l'expression des conseillers municipaux (CE, 22 mai 1987, M. Tête c/ Commune de Caluire-et-Cuire, n° 70085). En l'espèce, le requérant estimait ne pas avoir pu suffisamment exprimer son opinion sur la création d'une zone d'aménagement concerté pendant la séance du conseil municipal. Ce droit à l'expression est désormais matérialisé par l'article L. 2121-19 du CGCT qui permet aux conseillers municipaux d'exposer en séance des questions orales qui ont trait aux affaires de la commune. La faculté de poser des questions orales en séance est également ouverte aux conseillers départementaux (article L. 3121-20 du CGCT) et aux conseillers régionaux (article L. 4132-20 du même code). Le droit à l'expression des conseillers et la faculté de disposer d'un temps de parole s'appliquent donc également aux niveaux départemental et régional. D'après la jurisprudence, la limitation du temps de parole des conseillers ne peut être totale mais le règlement intérieur peut la prévoir tant que les droits d'expression et d'information des conseillers sont respectés. L'appréciation du juge est souveraine en la matière et dépend de l'ensemble des circonstances d'espèce. Ainsi, une limitation du temps de parole à 6 minutes a été jugée contraire au droit d'expression des conseillers (CAA Versailles, 30 décembre 2004, Commune de Taverny, n° 02VE02420) mais une limitation du temps de parole à 10 minutes a pu être considérée comme conforme (CAA Nancy, 8 juin 2017, n° 16NC01315). Par conséquent, rien ne semble s'opposer par principe à ce que le règlement intérieur prévoit que la répartition du temps de parole soit effectuée par une conférence des présidents dès lors qu'en pratique, le principe général de liberté d'expression des conseillers départementaux et régionaux est respecté.
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