Question de M. HOUPERT Alain (Côte-d'Or - Les Républicains) publiée le 22/07/2021
Question posée en séance publique le 21/07/2021
Mme le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Houpert. Monsieur le Premier ministre, l'une de vos formules favorites pour qualifier votre politique est « agir en responsabilité ». Vous avez eu raison de pointer les outrances et les images abjectes utilisées par certains extrémistes lors des manifestations contre l'obligation vaccinale et le passe sanitaire.
Toutefois, il serait bon que vous essayiez de comprendre le bruit de fond de tous les autres, qui sont loin de ces irresponsables minoritaires : ils défilent, ils ont défilé, ils défileront pour une certaine idée de la France, de notre France, où la liberté est assortie de devoirs, mais aussi de droits.
Monsieur le Premier ministre, je vous pose donc la question : est-ce agir en responsabilité de fracturer l'unité du peuple français, qui est consacrée par notre Constitution, en dressant les vaccinés contre les non-vaccinés ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Réponse du Premier ministre publiée le 22/07/2021
Réponse apportée en séance publique le 21/07/2021
Mme le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Ah ! sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, j'interviens après une série de questions sur ce sujet. J'ai même entendu une sénatrice me proposer de généraliser la vaccination, alors que, lors de la concertation que j'ai organisée avec tous les groupes politiques à l'Assemblée nationale, son groupe m'a demandé de la limiter au personnel soignant. Comprenne qui pourra (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. C'est un mensonge !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C'est faux !
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Alain Houpert, le Gouvernement et le Parlement ici réunis ne cherchent nullement à fracturer.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C'est raté !
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous avez raison, certains entretiennent des fractures de façon artificielle !
Plus que jamais, mesdames, messieurs les sénateurs, notre pays a besoin d'unité. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est fatigué, non pas par le Gouvernement ou le Parlement, mais par l'épidémie.
Le variant delta, dont je rappelle qu'il n'est pas propre à la France, mais qu'il est mondial, vient évidemment accentuer la lassitude de nos concitoyens, eux qui ont consenti je le dis, monsieur le sénateur, parce que vous ne l'avez pas fait ! beaucoup d'efforts dans le consensus pendant des mois et des mois. Ce ne sont pas ceux que l'on entend le plus hurler qui représentent l'ensemble du pays ; en tout cas, il ne faut pas le laisser croire !
La situation est marquée par une reprise épidémique, la quatrième vague. Je ne rappelle pas les chiffres, vous les connaissez. En revanche, il est un chiffre qu'il faut mentionner, car il a un lien avec votre question : 96 % des personnes contaminées ces jours derniers par le virus delta n'ont reçu aucune dose de vaccination. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Claude Requier. C'est vrai !
M. Jean Castex, Premier ministre. C'est dans les territoires ultramarins, où, malheureusement, la vaccination ne prend pas, que l'épidémie explose le plus.
Par conséquent, monsieur le sénateur, il n'y a pas de doute : il faut vacciner, vacciner et encore vacciner.
Mme Laurence Rossignol. On est d'accord !
M. Jean Castex, Premier ministre. Il faut le reconnaître et on peut en rejeter la faute sur le Gouvernement : il y a eu une diminution de la vaccination, en tout cas de son rythme, au cours du mois de juin. Ce n'est pas la faute de Pierre, de Paul ou de Jacques, mais c'est parce que la situation était meilleure et que la pression était moindre. Qui plus est, nous avons fait le choix de ne pas poursuivre la vaccination avec le vaccin AstraZeneca, comme l'ont fait certains pays voisins. Voilà la réalité.
Aujourd'hui, nous reprenons le rythme des vaccinations (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) et je me réjouis, sans doute avec vous tous, que l'intervention du Président de la République ait entraîné un nouvel engouement très fort pour la vaccination. Certes, il y a les manifestations dont vous avez parlé, mais, en ce qui me concerne, je constate qu'il y a des demandes de prise de rendez-vous.
Je réponds à la précédente question sur le sujet : oui, nous devons tout mettre en uvre. Le Gouvernement et ses services déconcentrés s'occupent des doses, mais il faut aussi des centres de vaccination et des professionnels de santé, alors même que nous sommes en période estivale. C'est plus difficile, puisque le nombre de personnels soignants disponibles diminue. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Nous sommes parfaitement mobilisés. Je le dis, car cela n'a peut-être pas été porté à la connaissance de tout le monde : l'erreur de communication de l'agence régionale de santé à laquelle il a été fait allusion dans une précédente question a été corrigée. Oui, nous aurons des doses. Je ne veux pas jeter la pierre à cette ARS : j'assume cette erreur de l'administration centrale et, de toute façon, comme d'habitude, le responsable en dernier ressort, c'est moi !
La vérité, c'est que nous avons vacciné 1,2 million de primo-vaccinés dans les quinze derniers jours de juin ce chiffre avait baissé. Nous espérons atteindre 2 millions de primo-injections cette semaine. Dans le même temps et c'est heureux, très logiquement, le nombre de deuxièmes injections augmente fortement.
Notre objectif est que, dans les deux prochaines semaines, 7 à 8 millions de personnes supplémentaires soient vaccinées. C'est très ambitieux, inédit, mais nous devons absolument l'atteindre. Ainsi, nous cherchons à avoir 40 millions de primo-vaccinés au 31 juillet, alors qu'ici même j'avais dit que nous devions parvenir à ce chiffre le 31 août il faut donc que nous ayons un mois d'avance , et de l'ordre de 50 millions à la fin du mois d'août.
M. Bernard Jomier. Très bien !
M. Jean Castex, Premier ministre. Quant au passe sanitaire, il a fait l'objet de plusieurs questions, qui semblaient négliger le fait qu'il a deux objectifs.
Le premier est d'encourager, indirectement, à se faire vacciner. Vous en débattrez, mais le Gouvernement ne pense pas qu'il soit nécessaire, à ce stade, d'obliger tous les Français à se faire vacciner.
Mme Laurence Rossignol. Ah ! Dans trois mois, alors ?
M. Jean Castex, Premier ministre. Seuls deux pays dans le monde l'ont fait. Nous verrons ce que vous déciderez pour les soignants, entendus au sens large.
Le second objectif du passe sanitaire, face à la reprise épidémique, avec un variant quatre fois plus contagieux, est d'éviter de devoir de nouveau fermer les bars et restaurants, qu'on sait très propices à la contamination, parce qu'on ne peut pas y porter le masque. Vous savez combien de mois nous avons déjà dû les fermer
Une sénatrice m'a fait observer que le texte avait évolué depuis sa présentation en conseil des ministres. Heureusement ! C'est le rôle du Parlement que de l'améliorer, et j'espère, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous parviendrez à un texte satisfaisant, qui nous permettra, tous ensemble, de lutter efficacement contre la résurgence de l'épidémie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour la réplique.
M. Alain Houpert. Merci d'avoir répondu à une question qui vous était destinée, monsieur le Premier ministre Vous êtes excellent en marketing vaccinal ! (Rires sur des travées du groupe Les Républicains. Protestations sur les bancs du Gouvernement et sur les travées du groupe RDPI.) La vaccination est une solution, mais ce n'est pas la seule.
Vous dites souvent que la liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres. Chers collègues, voulons-nous d'une société dans laquelle les droits sont différents selon les choix en conscience des citoyens ? Voulons-nous d'une société dans laquelle chacun pourra surveiller l'autre ? Je répondrai à ces questions par une citation d'un prix Nobel de la paix qui connaît bien le prix de la liberté, Nelson Mandela : « Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu'un d'autre de sa liberté. L'opprimé et l'oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité. »
Nous sommes en train de nous attaquer aux fondements de notre société française, de notre trinité républicaine, « Liberté, Égalité, Fraternité », en sapant le premier, essentiel, la liberté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. M. Loïc Hervé applaudit également.)
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