Question de M. PERRIN Cédric (Territoire de Belfort - Les Républicains) publiée le 22/07/2021

Question posée en séance publique le 21/07/2021

Mme le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Cédric Perrin. En l'absence de Mme la ministre des armées, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le 3 février dernier, j'étais à cette même place et j'alertais sur les risques que faisaient peser les conclusions de l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne sur notre armée.

La ministre des armées m'avait alors répondu être farouchement opposée à ces conclusions que vous connaissez aujourd'hui. Le président du Sénat, M. Gérard Larcher, et le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Christian Cambon, ont adressé un courrier au Président de la République, qui contenait cet appel : « Une parole politique au sommet de l'État est attendue. Vous seul pouvez la porter. »

Au mois d'avril dernier, avec Jean-Pierre Chevènement, j'ai publié une tribune dans la presse sur cette question : c'est « un coup mortel porté à notre défense », avertissions-nous. Nous implorions alors le Président de la République de défendre notre armée et de s'exprimer.

La ministre des armées tout comme le chef de l'État n'ont eu de cesse de nous rassurer. Visiblement, le Gouvernement n'a aucune influence en Europe. Maintenant que la CJUE a tranché et témoigné de sa méconnaissance totale des spécificités de l'engagement militaire, il faut agir dans l'intérêt de notre pays et de l'Union européenne. Une possibilité s'offre au Président de la République : reprocher à la Cour d'avoir statué au-delà des compétences que lui attribuent les traités. C'était la solution que je suggérerais au mois de février dernier.

Monsieur le Premier ministre, soutiendrez-vous cette proposition ?


Réponse du Secrétariat d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement publiée le 22/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 21/07/2021

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement.

M. Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Cédric Perrin, vous êtes un spécialiste des questions de défense et vous connaissez aussi très bien l'Europe. Vous savez donc que la Cour de justice de l'Union européenne est indépendante et qu'il ne s'agit pas là de questions d'influence politique de la France en Europe. C'est une décision qui a été rendue par une juridiction indépendante.

J'affirme de nouveau, dans ce débat, l'attachement de ce gouvernement à la construction européenne : nous voulons une Europe forte et efficace dans le respect de la compétence des États membres. Toutefois, je le dis sans détour : en matière d'organisation de ses forces armées, la France n'entend pas déléguer sa compétence.

L'action militaire est collective, elle ne se résume pas à l'addition d'emplois du temps individuels. La fierté de nos militaires, c'est de faire primer la réalisation de la mission sur toute autre considération. La responsabilité des chefs militaires, c'est d'être attentifs à chaque instant à la santé et au moral de leurs soldats.

Par conséquent, la responsabilité de l'État, c'est de garantir aux militaires les droits qu'ils méritent. Les militaires ont de lourdes obligations, qui font l'objet de compensations adaptées ; cela s'appelle le statut général des militaires, vous le connaissez bien. Cette organisation donne pleinement satisfaction, elle fait la fierté et l'admiration des Français.

La Cour de justice de l'Union européenne a joué son rôle. Nous jouerons le nôtre : une réponse au droit par le droit s'impose. Dès lors que les conséquences de cet arrêt auront été précisément analysées pour l'ensemble des forces armées, nous prendrons les initiatives qui s'imposent. Nous le ferons avec rigueur sans nous soustraire à nos responsabilités, qui sont, je le rappelle, d'assurer en tout temps et en tout lieu la sécurité des Français, de prendre acte des décisions de justice de l'Union européenne et, enfin, d'agir pour faire évoluer le droit de l'Union européenne si notre sécurité l'exige. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme le président. La parole est à M. Cédric Perrin, pour la réplique.

M. Cédric Perrin. Monsieur le secrétaire d'État, une fois de plus, sans vouloir vous contrarier, je note que vous évitez soigneusement de répondre à ma question.

Il ne s'agit pas de savoir si la CJUE a joué son rôle. Elle ne l'a pas joué. La renégociation de la directive européenne que vous évoquez dans toutes vos réponses est une option que j'ai soulevée au mois de février dernier. Aujourd'hui, la question qui se pose, c'est celle des juges de l'Union européenne, qui statuent au-delà de leur compétence et qui s'attaquent au paragraphe 2 de l'article 4 du traité sur l'Union européenne.

Si elle veut survivre – et je pèse mes mots –, l'Union européenne doit comprendre qu'elle n'est qu'un outil au service des peuples européens. Ce ne sont ni les fonctionnaires européens ni les juges qui doivent faire la politique européenne et donner l'image d'une Union européenne incapable, une fois de plus, de comprendre le monde tel qu'il est, le monde tel qu'il devient et le monde extrêmement dangereux dans lequel nous vivons.

Mme le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Cédric Perrin. Le Quai d'Orsay et l'Élysée ont soigneusement évité de faire pression sur l'Union européenne. Maintenant, nous vous demandons d'agir pour défendre les militaires : ils ont besoin de soutien, pas de mots. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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