Question de Mme EVRARD Marie (Yonne - RDPI) publiée le 22/07/2021

Mme Marie Evrard attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les difficultés d'approvisionnement en matières premières auxquelles sont confrontés les acteurs de la filière bois en raison d'exportations massives de grumes vers l'Asie.
Ces difficultés concernent à ce jour quelques essences, en particulier le chêne et le bois Douglas du Morvan. Elles risquent de s'étendre à la rentrée 2021 à l'ensemble des essences, avec comme conséquence un ralentissement important des activités des acteurs de la filière du bois, faute d'approvisionnement suffisant en matières premières.
Depuis six mois, les professionnels du bois constatent que 35 à 100 % des volumes de chênes de la forêt privée partent à l'exportation, principalement en Chine, qui connaît une reprise économique importante. Cette situation entraîne des conséquences importantes sur la filière bois. Ainsi, 90 % des scieries de chênes n'ont plus assez de bois pour assurer leurs besoins de l'année. Par ailleurs, des constructeurs de maisons en ossature bois situés dans le Morvan sont confrontés à un doublement des prix de la matière première ou ne trouvent carrément plus de bois pour construire leurs maisons. Ce phénomène s'étend également au volume de résineux avec des acheteurs étrangers qui perturbent les achats.
Cette situation s'accélère et s'amplifie avec la décision de la Russie de bloquer ses exportations de grumes et de sciage auprès de son client principal, l'Asie.
L'industrie française du sciage et de la deuxième transformation est donc en grand danger. À cela s'ajoute le gâchis écologique que constitue l'exportation de grumes en Asie puisqu'il a pour conséquence d'annuler le bénéfice de la captation de carbone par le bois.
C'est pourquoi elle lui demande ce qu'il compte mettre en œuvre pour remédier à cette situation et permettre ainsi à la filière bois française de sécuriser ses approvisionnements.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès des ministres de l'économie, des finances et de la relance, et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques publiée le 29/09/2021

Réponse apportée en séance publique le 28/09/2021

Mme le président. La parole est à Mme Marie Evrard, auteure de la question n° 1767, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Mme Marie Evrard. Monsieur le secrétaire d'État, depuis le début de l'année, les acteurs français de la filière bois sont confrontés à d'importantes difficultés d'approvisionnement en matières premières. Plusieurs essences destinées à la construction et à des usages nobles sont concernées par ce phénomène, comme le chêne, le hêtre, les résineux ou le douglas du Morvan.

Ces difficultés s'expliquent par les exportations massives de grumes vers l'Asie. Les expéditions de bois brut issu de forêts françaises se font plus particulièrement vers l'économie chinoise, qui connaît une forte reprise depuis plusieurs mois.

Ces bois bruts expédiés par containers font défaut aux scieries françaises. Ainsi, 90 % des scieries de chênes n'ont plus assez de bois pour assurer leurs besoins de l'année. Dans ce contexte, des constructeurs de maisons en ossature bois situés dans le Morvan sont confrontés à un doublement des prix de la matière première ou ne trouvent carrément plus de bois pour poursuivre leur activité.

Ce phénomène s'étend également au volume de résineux avec des acheteurs étrangers qui perturbent leurs achats.

Cette situation difficile s'est accélérée et amplifiée avec la décision de la Russie de bloquer ses exportations de grumes et de sciage auprès de son client principal, l'Asie.

Dans ce contexte, l'industrie française du sciage et de la deuxième transformation se trouve en grand danger, avec le ralentissement, voire l'arrêt de ses activités. C'est d'autant plus regrettable que la reprise économique est bien présente. À cela s'ajoute le gâchis écologique que constituent les exportations de grumes depuis les forêts françaises vers l'Asie. Ces expéditions ont pour conséquence d'annuler le bénéfice de la captation du carbone par le bois.

Monsieur le secrétaire d'État, comme vous le savez, la filière du bois occupe une place particulièrement importante dans l'économie de nos régions, en particulier dans le Morvan.

Quelles actions le Gouvernement compte-t-il mettre en place pour soutenir la filière bois française et lui permettre de sécuriser ses approvisionnements ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Madame la sénatrice Evrard, comme vous l'avez dit, la filière bois doit aujourd'hui relever plusieurs défis.

La forêt française doit tout d'abord augmenter sa résilience pour faire face aux changements climatiques. Il s'agit d'une nécessité pour qu'elle continue à produire du bois de qualité tout en préservant la biodiversité et en stockant plus de carbone.

Les scieries de l'Hexagone subissent également depuis plusieurs mois des tensions d'approvisionnement, notamment en raison de l'augmentation de la consommation mondiale de bois – celle-ci enregistre une augmentation de 10 % en un an – et des restrictions aux exportations décidées par certains pays.

Ces dynamiques ne sont pas sans risques pour la filière : elles peuvent entraîner des hausses de coût, des augmentations de délais, voire des pénuries en bois brut.

La capacité de nos industries à être présentes sur le marché du bois de construction en plein essor est d'ailleurs une question de souveraineté.

Pour résorber ces tensions d'approvisionnement, le Gouvernement a saisi la Commission européenne en lui demandant de prendre des mesures de sauvegarde au titre de la compétence commerciale et d'éviter ainsi l'emploi sous-optimal des ressources forestières européennes.

Le Premier ministre a aussi demandé à l'Office national des forêts de développer au maximum les contrats d'approvisionnement avec les scieries françaises, pour éviter que la production de bois des forêts domaniales ne soit vendue aux enchères, s'exposant ainsi à l'action de traders qui exportent souvent hors d'Europe.

Dans le cadre du plan France Relance, le Gouvernement va également redéployer 100 millions d'euros supplémentaires pour abonder les différents dispositifs de soutien à la filière forêt et bois.

Ils s'ajoutent donc aux 200 millions d'euros déjà consacrés à la relance de la filière : 150 millions d'euros pour le renouvellement forestier en amont – cela correspond au reboisement de 45 000 hectares, soit environ 50 millions d'arbres – et 50 millions d'euros pour la modernisation des industries de transformation du bois en aval.

Enfin, pour assurer l'avenir à long terme de cette filière d'importance nationale et si particulière pour notre société, le Premier ministre a demandé aux ministres Julien Denormandie, Agnès Pannier-Runacher et Bérangère Abba d'organiser à l'automne des assises de la forêt et du bois.

Elles doivent être un espace de dialogue, décliné dans les territoires, en cohésion avec les acteurs amont et aval, mais aussi les experts et les associations, pour nourrir la vision la plus large possible de la forêt française et de la filière bois de demain.

Elles permettront de partager les enjeux du patrimoine forestier que nous avons en commun, pour que nous puissions collectivement faire prospérer cette richesse.

Mme le président. La parole est à Mme Marie Evrard, pour la réplique.

Mme Marie Evrard. Je vous remercie pour votre réponse positive, monsieur le secrétaire d'État. Elle était attendue par les acteurs de la filière bois implantés dans nos territoires ruraux.

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