Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 01/07/2021
M. Jean Hingray attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur l'inquiétude des élus locaux face à la disparition progressive des distributeurs automatiques de billets (DAB) dans les territoires ruraux notamment. Les modalités de paiement évoluent et un grand nombre d'usagers utilisent les moyens de paiement dématérialisés, réduisant de fait le recours à l'argent liquide et contribuant à la diminution des points de retrait, voire des agences bancaires. Les communes rurales en sont les premières victimes alors que le paiement en espèce demeure une pratique répandue et que la présence de DAB est souvent déterminante pour le maintien des commerces de proximité qui ne disposent d'ailleurs pas forcément de terminaux de paiement. Les personnes âgées sont en outre habituées au mode de règlement en espèces quand d'autres usagers y sont contraints en raison d'un interdit bancaire. Ils n'ont alors ni chéquier, ni carte de paiement et ne possèdent qu'une carte de retrait d'espèces leur permettant de faire leurs achats de première nécessité. La disparition progressive des distributeurs automatiques de billets accroît l'isolement des habitants (personnes âgées ou à mobilité réduite) des zones rurales et constitue un frein à la cohésion sociale. Certains citoyens sont obligés de parcourir des dizaines de kilomètres pour pouvoir retirer des espèces, opération souvent facturée car effectuée en dehors de leur enseigne d'origine. De nombreux habitants des zones enclavées, sont déjà confrontés à la désertification médicale, à la fracture numérique, au manque de transports en commun, d'un bureau de poste et plus globalement de services publics. Cette situation nourrit le sentiment de relégation dont souffrent de nombreux habitants dans les départements ruraux, dans le département des Vosges, à l'instar de la commune de Docelles, qui a fait l'actualité sur cette question. La migration des groupes bancaires vers le tout digital et la quête de réduction des coûts qui en est le corollaire s'opposent de plus en plus à l'objectif d'une répartition équitable, sur le territoire, des services bancaires. Les élus locaux ne ménagent pas leur peine pour contrer cette évolution vers une désertification bancaire qui risque d'amplifier la dévitalisation progressive des communes rurales et la fracture territoriale. Ils ne sauraient être seuls dans ce combat. C'est pourquoi il lui demande quelles sont les mesures fortes envisagées par le Gouvernement pour que les banques prennent acte de la nécessité d'assurer l'accès aux espèces et aux services de proximité bancaires sur l'ensemble du territoire national.
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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 01/12/2021
Réponse apportée en séance publique le 30/11/2021
Mme le président. La parole est à M. Jean Hingray, auteur de la question n° 1750, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
M. Jean Hingray. En avril 2018, madame la secrétaire d'État, à l'occasion d'une visite dans notre département des Vosges, le Président de la République plaidait pour une « ruralité active ».
Je vous l'assure, dans les Vosges, la ruralité est active ! Les élus locaux ne ménagent pas leur peine au quotidien pour faire vivre notre territoire.
Les élus et habitants des zones enclavées sont pourtant confrontés à la désertification médicale, à la fracture numérique, au manque de transports en commun et à l'absence de bureau de poste ou, plus globalement, de services publics. Cette situation est synonyme, pour beaucoup de ruraux, d'abandon et de mépris de la part de l'État.
Ce sentiment d'abandon est accentué par la fermeture des services bancaires. Alors que le paiement en espèces demeure une pratique répandue, les communes rurales sont les premières victimes de la diminution du nombre de distributeurs de billets.
Or la présence de distributeurs est déterminante pour le maintien des commerces de proximité et la lutte contre l'isolement des personnes âgées, bref pour la cohésion sociale.
Dans mon département, la charmante commune de Docelles a récemment vu son agence bancaire fermer et son distributeur de billets disparaître. Idem pour la commune de Provenchères-et-Colroy, qui a perdu ce service. Les élus du secteur ont tenté, en vain, de s'opposer à ces fermetures. Ils ne sauraient être seuls dans ce combat.
Madame la secrétaire d'État, que comptez-vous faire contre de telles fermetures ? Quelles sont vos intentions à l'égard des banques qui devraient être garantes d'un service à la population ? Comment garantir l'accès à un service de proximité bancaire sur l'ensemble du territoire national ?
Vous allez me répondre qu'il s'agit d'entreprises privées et qu'elles agissent comme bon leur semble. Vous allez aussi me répondre que, lorsque l'initiative privée est défaillante, la commune peut prendre le relais et financer l'implantation d'un distributeur. Vous allez enfin me répondre que ces dispositifs sont fortement soutenus par l'État.
Au-delà de ces éléments de langage tout préparés, j'aimerais des réponses concrètes ! À titre d'exemple, le maire de Provenchères-et-Colroy et son équipe ont reçu, pour pallier cette défaillance privée, différentes offres qui avoisinent 1 700 euros par mois. Cette somme est très importante pour le budget de la commune et sera nécessairement synonyme de sacrifices sur d'autres lignes budgétaires.
À partir de cet exemple, quelles sont les mesures concrètes j'insiste sur cet adjectif , qui sont envisagées par le Gouvernement pour être fidèle aux promesses du Président de la République ?
Mme le président. Mon cher collègue, je vous rappelle que vous devez respecter votre temps de parole.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Jean Hingray, je vous remercie de cette question, qui porte sur un sujet essentiel pour notre ruralité : la présence de distributeurs d'argent en espèces.
Pour la première fois en 2020, le nombre de distributeurs automatiques est passé sous la barre des 50 000. Ce chiffre n'est pas forcément alarmant en soi, car on constate que les distributeurs se sont maintenus dans les communes de moins de 1 000 habitants, alors qu'ils ont plutôt tendance à fermer dans les petites villes.
Ainsi, 27 communes ont perdu leur dernier distributeur l'année dernière, et la Banque de France a calculé que 80 % de la population vivait à moins de cinq minutes en voiture d'un distributeur et 99 % à moins de quinze minutes.
Quand bien même ces chiffres sont rassurants, l'accès aux espèces constitue un sujet de préoccupation qui est partagé par le Gouvernement. Celui-ci le suivra attentivement, afin d'apporter des réponses localisées aux situations concrètes qui posent problème.
C'est aussi une question que nous souhaiterions aborder dans le cadre de la discussion qui aura lieu en 2022 avec l'Association des maires de France et La Poste autour du nouveau contrat de présence postale territoriale.
Comme vous le savez, la loi confie à La Poste des missions de service public pour l'exercice desquelles l'État va augmenter sa contribution de plus de 500 millions d'euros. En contrepartie de cette contribution supplémentaire, le Premier ministre a demandé à La Poste de travailler avec l'État et les maires pour améliorer la qualité du service rendu aux usagers.
Le Gouvernement a d'ores et déjà commencé à discuter avec les associations d'élus, qui font remonter des propositions sur la question des distributeurs de billets ; nous allons les examiner.
La réponse peut aussi venir des banques commerciales : vous avez peut-être observé que BNP Paribas, la Société générale et le Crédit mutuel ont commencé à étudier la mutualisation de leurs distributeurs, bien sûr pour réaliser des économies sur les coûts de structure, mais aussi pour bien coordonner leurs décisions en matière de répartition.
Ces banques ont déclaré qu'elles prendraient en considération la question du maillage territorial. L'Association des maires de France, l'Association des maires ruraux de France et le Gouvernement y seront très vigilants.
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