Question de M. BABARY Serge (Indre-et-Loire - Les Républicains) publiée le 24/06/2021

M. Serge Babary attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'accès aux marchés publics des petites et moyennes entreprises (PME).
L'allotissement ainsi que la méthode de comparaison des offres sont autant d'éléments susceptibles de limiter ou de favoriser l'accès des PME aux marchés publics.
En l'état actuel du droit, l'acheteur public n'est pas tenu de motiver les modalités de l'allotissement choisi dans les documents de consultation du marché. Il n'est pas plus tenu d'y justifier sa décision de ne pas allotir.
Or, en pratique, on s'aperçoit que les conditions de mise en œuvre de l'obligation d'allotir peuvent être décorrélées du principe d'identification de prestations distinctes.
Au contraire, de nombreux marchés publics sont allotis en fonction d'un seul critère géographique, avec des lots qui couvrent souvent des zones très étendues, parfois même des régions administratives entières.
Quant à la décision de ne pas allotir, les motifs circonstanciés de ce choix ne figurent pas ou trop peu dans les documents de consultation, et les candidats éprouvent beaucoup de difficultés à en obtenir l'explication.
Enfin, l'acheteur public n'est actuellement tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres qu'à l'issue de la consultation publique. Le choix de formule, ou de barème, est pourtant bien souvent tout autant décisif dans la notation que le nombre de points attribué par critère.
Il ne s'agit pas de faire peser des contraintes administratives supplémentaires sur les acheteurs publics, mais de transmettre en amont aux candidats des éléments qui doivent et ont nécessairement déjà été définis.
Disposer de ces différentes informations dès l'acte de candidature renforcerait les « principes de liberté d'accès et de transparence des procédures » mentionnés à l'article L. 3 du code de la commande publique, et favoriserait l'achat responsable, tout en permettant d'assurer un meilleur accès de nos PME aux marchés publics.
Aussi, il souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage d'améliorer l'information des candidats aux marchés publics en leur permettant d'être informés par les documents de consultation des considérations fondant l'identification des prestations distinctes justifiant les modalités de l'allotissement, des considérations de droit et de fait ayant justifié la décision de ne pas allotir, ou encore de la méthode objective de comparaison des offres.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 23/09/2021

Le droit de la commande publique consacre le principe de l'allotissement. L'article L. 2113-10 du code de la commande publique dispose que tous les marchés doivent être passés en lots séparés lorsque leur objet permet l'identification de prestations distinctes. L'acheteur doit alors fractionner l'objet d'une consultation en plusieurs lots attribués séparément et conduisant à la signature de marchés indépendants. Cette décomposition est établie en fonction des caractéristiques techniques distinctes des prestations ou de la structure du secteur économique concerné. Lorsque plusieurs prestations distinctes sont identifiées, l'acheteur ne peut recourir à un marché non alloti que dans des hypothèses limitativement énumérées à l'article L. 2113-11 du code de la commande publique et doit motiver son choix « en énonçant les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision ». Ces justifications doivent figurer dans le rapport de présentation mentionné à l'article R. 2184-1 ou, pour les marchés non soumis à l'obligation de réaliser un rapport de présentation, dans les documents de la procédure conservés en application de l'article R. 2184-12 du même code, lesquels sont des documents communicables au sens du Livre III du code des relations entre le public et l'administration sous réserve de l'occultation des mentions couvertes par le secret. Si, en cas de contentieux, le nombre et la consistance des lots font l'objet d'un contrôle restreint du juge administratif compte tenu de la marge d'appréciation de l'acheteur (CE, 21 mai 2020, Commune d'Ajaccio, n° 333737), la décision de ne pas allotir fait l'objet d'un contrôle entier dès lors que, comme toute exception, les conditions permettant de déroger au principe d'allotissement sont d'interprétation stricte afin de garantir une réelle concurrence entre les opérateurs économiques (CE, 27 octobre 2011, Département des Bouches-du-Rhône, n° 350935). S'agissant des modalités de sélection des offres, celles-ci doivent être portées à la connaissance des candidats afin que ces derniers soient informés des qualités qui seront appréciées, du poids respectif de chacune d'entre elles et, d'une manière générale, de l'ensemble des éléments qui seront utilisés pour juger l'offre. Ainsi, l'acheteur doit, dès l'engagement de la procédure, dans l'avis de marché ou dans les documents de la consultation, donner aux candidats une information appropriée sur les critères d'attribution du marché ainsi que sur les conditions de leur mise en œuvre. Toutefois, le principe de transparence n'impose pas que la méthode de notation soit communiquée aux candidats dès lors qu'elle est censée être neutre et sans incidence sur la construction des offres (CE, 31 mars 2010, Collectivité territoriale de Corse, n° 334279). Dans le cas contraire, il s'agirait de sous-critères qui devraient être communiqués aux candidats. De même, si le juge administratif refuse en principe de la contrôler afin de ne pas s'immiscer dans ce qui relève de l'opération subjective d'évaluation des mérites des candidats, il veille également à ce que la méthode retenue par l'acheteur n'ait pas pour effet de priver de leur portée les critères de sélection ou de neutraliser leur pondération (CE, 20 novembre 2020, Société Evancia, n° 427761). La Cour de justice de l'Union européenne a reconnu qu'il était en pratique nécessaire que les services chargés d'évaluer les offres puissent disposer d'une certaine liberté dans l'accomplissement de cette tâche et qu'ils devaient pouvoir adapter cette méthode (CJUE, 14 juillet 2016, TNS Dimarso NV, Aff. C-6/15). Compte tenu des équilibres actuels issus de la jurisprudence entre l'exigence de transparence et le souci de préserver la liberté de l'acheteur dans la détermination du mode de dévolution du marché et de la méthode de notation, le Gouvernement n'envisage pas d'accroître les obligations relatives à l'information préalable des candidats en ces matières. Toutefois, le Gouvernement, dans le cadre de la relance, a encouragé les collectivités locales bénéficiaires de France Relance, à allotir les marchés de travaux dans l'objectif de soutenir les artisans, TPE et PME.

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