Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - CRCE-R) publiée le 17/06/2021
Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur le choix des sujets au baccalauréat de sciences économiques et sociales pour l'année scolaire 2020-2021.
En effet, elle a découvert avec stupeur que l'un des sujets soumis dans cette matière était libellé de la manière suivante : « à l'aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrerez que des politiques de flexibilisation du marché du travail permettent de lutter contre le chômage structurel. »
Elle s'étonne de la façon dont ce sujet est formulé et des termes très directifs qui sont utilisés. En effet, le sujet ne suggère pas d'analyser les différents points de vue ou ne laisse en rien la possibilité d'exprimer une position plus critique pourvu qu'elle soit argumentée évidemment.
Elle lui demande s'il est bien conforme à l'éthique éducative de présenter ainsi aux candidats comme une vérité un point de vue très largement contesté, même chez les économistes.
Elle lui demande si ce type de formulation ne met pas en cause, les principes éducatifs de l'esprit critique ainsi que la neutralité de l'enseignement public alors même que le sujet tel qu'il est formulé affiche comme une évidence une décision qui relève plus d'un choix politique que d'un fait irréfutable.
Elle lui demande si le Gouvernement ne prend pas ainsi le risque d'entacher l'école républicaine de partialité et que cette dernière subisse l'accusation d'orienter abusivement les choix des élèves et des candidats aux examen alors que ce doit être, et le plus souvent la noblesse de l'école publique et de l'éducation nationale.
Très attachée à ces exigences éthiques, elle lui demande les dispositions qu'il compte prendre pour éviter à l'avenir de tels sujet qui risque d'entacher la confiance de nos concitoyens dans nos institutions éducatives.
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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports publiée le 03/03/2022
Il parait d'abord nécessaire de contextualiser la place de ce sujet de l'épreuve d'enseignement de spécialité « Sciences Economiques et Sociales » dans un corpus de sujets. En effet, l'élève ne se voit imposer aucun sujet. Il avait en 2021 le choix entre une dissertation et deux épreuves composées, elles-mêmes composées d'une question de mobilisation des connaissances, d'une étude de document et d'un raisonnement mené à partir d'un dossier documentaire. Les trois sujets étaient là encore déterminés de façon à couvrir plusieurs dimensions du programme : - le sujet de dissertation et ceux des troisièmes parties de l'épreuve composée portent sur au moins deux champs du programme (science économique ; sociologie et science politique ; regards croisés) et sur des questions différentes du programme ; - chacune des trois parties de la première épreuve composée porte sur des questions du programme, différentes de chacune des mêmes parties de la seconde épreuve composée. Le sujet incriminé était un sujet de raisonnement (partie 3 d'une épreuve composée) et non pas un sujet de dissertation. Le libellé n'est donc jamais sous une forme de question, et ce qui est évalué n'est pas la capacité à débattre de manière problématisée (dissertation), mais à construire un raisonnement logique et argumenté à partir du dossier documentaire et de ses connaissances personnelles. En l'occurrence le dossier documentaire autorisait toutes les nuances. Il n'y a évidemment aucun biais idéologique dans les sujets et l'élève a le choix de thématiques variées et de champs disciplinaires divers. L'élève avait le choix entre cette épreuve composée (et donc ce sujet de raisonnement) et une dissertation qui portait sur les classes sociales (sociologie) et une autre épreuve composée (et donc un autre raisonnement) qui portait sur les formes de l'engagement politique (science politique). Les sujets de raisonnement portent toujours (pour faciliter le travail de l'élève et ne juger que la capacité à construire un raisonnement) sur un seul objectif d'apprentissage du programme, et jamais sur un chapitre entier ou sur des libellés transverses aux différents chapitres. En l'occurrence si le sujet porte sur le rôle des institutions sur le chômage structurel, outre que cela fait partie des savoirs établis par la science économique, le chapitre concerné du programme (comment lutter contre le chômage ?) aborde toutes les formes de chômage, la complexité du phénomène, les multiples politiques susceptibles d'y faire face. Il est donc l'occasion de présenter tous les débats sur la question. De plus, le lendemain, le sujet comportait une question strictement complémentaire : « À l'aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrerez que les politiques de soutien de la demande globale peuvent permettre de lutter contre le chômage. » Cette question mettait alors en exergue un autre « type » de chômage (le chômage conjoncturel) et convoquait d'autres références théoriques (celles issues du courant keynésien). Par ailleurs, les sujets sont élaborés par des commissions regroupant des professeurs de sciences économiques et sociales, sous le pilotage d'un IPR et sous la co-présidence d'un inspecteur général.
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