Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 10/06/2021
M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports à la suite de la publication, début mai 2021, de la circulaire aux recteurs d'académie, aux directeurs de l'administration centrale et aux personnels du ministère de l'éducation nationale, qui vient de proscrire le recours à l'écriture dite « inclusive ».
Dès cette parution, certains syndicats ont appelé à la résistance et à la poursuite de la diffusion de l'écriture « inclusive » dans les écoles qui, d'ailleurs, se retrouvent de plus en plus dans des publications officielles, se normalisent dans certaines collectivités, voire se diffusent dans les médias...
Pourtant, des experts mettent en exergue les défauts linguistiques de ce type de rédaction et, notamment, les dangers concrets engendrés pour l'apprentissage de la lecture et, plus largement, pour la francophonie. Rappelons qu'en France, plus d'un élève sur cinq n'a pas une lecture fluide et est incapable de résoudre des problèmes de mathématiques du quotidien
Pour les enfants qui apprennent à lire et à écrire, ce sont bien des obstacles inutiles et supplémentaires qui ont pour effet d'aggraver encore les inégalités entre ceux issus d'un milieu culturel élevé et ceux issus de familles plus éloignées de l'école ne maîtrisant pas ou peu la langue française. Cette forme d'écriture s'oppose donc à la mission première de tout système éducatif : apprendre à lire !
En outre, elle ne sert en aucun cas l'égalité entre les femmes et les hommes. Comme le soulignait Simone Veil dans son discours de réception à l'Académie française le 18 mars 2010, « il ne faut pas faire semblant de croire que la féminisation des mots est un accélérateur de parité »
Plusieurs propositions de loi ayant été déposées afin de faire barrage au déferlement de l'écriture « inclusive » dans tous les pans de la société, notamment dans l'enseignement, il lui demande s'il entend œuvrer pour que priorité soit donnée à l'éducation.
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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports publiée le 10/03/2022
Dès 2017, la circulaire du 21 novembre 2017 relative aux règles de féminisation et de rédaction des textes publiés au Journal officiel de la République française (JORF) rappelait les règles à respecter dans les actes administratifs. Il y est notamment affirmé que les textes qui désignent la personne titulaire de la fonction en cause doivent être accordés au genre de cette personne, que lorsqu'un arrêté est signé par une femme, l'auteure doit être désignée, dans l'intitulé du texte et dans l'article d'exécution, comme « la ministre », « la secrétaire générale » ou « la directrice ». De même, l'intitulé des fonctions tenues par une femme doit être systématiquement féminisé et le recours à des formules telles que « le candidat ou la candidate » afin de ne pas marquer de préférence de genre dans les actes de recrutement et les avis de vacances publiés au JORF, systématique. Si la généralisation de la féminisation était largement souhaitée dans cette circulaire, le Premier ministre invitait à proscrire l'écriture inclusive des textes destinés à être publiés au JORF. Il est aussi rappelé que « les administrations relevant de l'État doivent se conformer aux règles grammaticales et syntaxiques, notamment pour des raisons d'intelligibilité et de clarté de la norme ». Le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a publié, comme cela est rappelé dans la question, une circulaire le 5 mai 2021 également relative aux règles à appliquer en matière d'écriture inclusive. Il y rappelle notamment que l'« égalité entre les filles et les garçons, prélude de l'égalité entre les femmes et les hommes, doit être construite, promue et garantie par l'École de la République ». Or, l'écriture inclusive est non seulement contre-productive pour lutter contre les discriminations, « mais nuisible à la pratique et à l'intelligibilité de la langue française ». L'apprentissage et la maîtrise de la langue française, au cur des missions de l'École, contribuent en effet à lutter contre les stéréotypes et garantissent l'égalité des chances de tous les élèves. Depuis sa nomination au ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, le ministre a souhaité mettre l'accent sur la maîtrise des apprentissages fondamentaux dont fait partie la maîtrise de la langue. Il a ainsi adressé, dès 2018, une lettre aux enseignants dans laquelle il affirmait sa volonté de renforcer les fondamentaux et prônait deux recommandations sur l'enseignement de la lecture et sur l'enseignement de la grammaire et du vocabulaire. Aussi ces objectifs ne doivent-ils pas être pénalisés par le recours à l'écriture dite « inclusive » dont la complexité et l'instabilité constituent autant d'obstacles à l'acquisition de la langue et de la lecture. Ces écueils artificiels sont d'autant plus inopportuns lorsqu'ils viennent entraver les efforts des élèves présentant des troubles d'apprentissage accueillis dans le cadre du service public de l'école inclusive. Il est donc rappelé dans cette circulaire que, « dans le cadre de l'enseignement, la conformité aux règles grammaticales et syntaxiques est de rigueur ». Ainsi, le recours à l'écriture inclusive est proscrit, car il crée un obstacle à l'apprentissage de l'élève, en particulier l'usage du point médian pour faire apparaître simultanément les formes féminines et masculines d'un mot employé au masculin lorsque celui-ci est utilisé dans un sens générique ou d'autres règles d'accords usuels que celles attendues dans le cadre des programmes d'enseignement. En outre, cette écriture, qui se traduit par la fragmentation des mots et des accords, constitue un obstacle à la lecture et à la compréhension de l'écrit. L'impossibilité de transcrire à l'oral les textes recourant à ce type de graphie gêne également la lecture à voix haute comme la prononciation et par conséquent les apprentissages, notamment chez les plus jeunes. Une telle écriture constitue un obstacle pour l'accès à la langue d'enfants confrontés à certains handicaps ou troubles des apprentissages. En appelant de ses vux au respect de ces règles communes, le ministre rappelle qu'elles participent à la promotion et à la garantie de l'égalité entre les filles et les garçons dans, comme en dehors de l'espace scolaire, mais aussi des enjeux fondamentaux de transmission de notre langue. Il donne ainsi priorité à l'éducation.
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