Question de M. BLANC Étienne (Rhône - Les Républicains) publiée le 10/06/2021
Question posée en séance publique le 09/06/2021
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Étienne Blanc. Ma question s'adresse à Mme la ministre des armées.
Madame la ministre, entre 2001 et 2014, environ 50 000 soldats français ont servi sur les théâtres opérationnels d'Afghanistan. À leurs côtés ont travaillé environ 700 Afghans chauffeurs, voituriers, magasiniers, interprètes ou traducteurs. Aujourd'hui, un grand nombre d'entre eux ont pu gagner la France : le Gouvernement leur a attribué des visas. Mais tous n'en ont pas reçu.
Or voici qu'à la faveur de l'évolution de la situation politique et militaire en Afghanistan, les armées talibanes sont aux portes de Kaboul. De manière très explicite, elles ont mis une cible sur ces Afghans qui ont travaillé à nos côtés. Aujourd'hui, ceux-ci subissent une inquiétude terrible. Ils sont identifiés, ils sont connus, et leurs familles avec eux.
M. David Assouline. C'est honteux !
M. Étienne Blanc. Or il ne reste a priori que quelques semaines avant l'entrée des talibans dans Kaboul.
Alors, madame la ministre, ma question est simple : quelle est la position du Gouvernement quant à l'attribution à ces Afghans qui ont servi notre pays de titres de séjour qui leur permettront de rejoindre une terre d'asile ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, RDSE, SER et CRCE.)
Réponse du Ministère des armées publiée le 10/06/2021
Réponse apportée en séance publique le 09/06/2021
M. le président. La parole est à Mme la ministre des armées.
Mme Florence Parly, ministre des armées. Monsieur le sénateur Étienne Blanc, comme vous l'avez rappelé, la France a été engagée en Afghanistan entre 2001 et 2014, sous des mandats successifs de l'ONU. Au cours de cet engagement, 90 militaires français sont morts au combat ; permettez-moi de leur rendre hommage, mes pensées vont vers leurs familles.
Comme la plupart des autres nations qui se sont engagées en Afghanistan, nous avons eu recours à des civils recrutés localement pour aider la force dans sa mission au profit de la population afghane. Environ 1 000 personnes ont ainsi constitué le personnel civil de recrutement local (PCRL) ; parmi eux, une majorité d'interprètes, qui ont uvré au profit de leur pays, aux côtés des forces françaises.
Entre 2013 et 2015, lorsque la France s'est désengagée de ce conflit, nous avons organisé en deux vagues le rapatriement de 171 d'entre eux et de leurs familles, soit 550 personnes au total.
En 2017, le Président de la République a considéré, au vu de la dégradation des conditions sécuritaires, en particulier à Kaboul, qu'il était nécessaire de rapatrier d'anciens PCRL qui en émettraient le souhait. C'est la raison pour laquelle un nouveau dispositif d'accueil a été mis en place ; entre 2018 et 2019, nous avons rapatrié 51 ex-PCRL supplémentaires ainsi que leurs familles, soit 218 personnes. Au total, ce sont donc 222 ex-PCRL et leurs familles qui ont été rapatriés, soit près de 800 personnes.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, de nouveaux événements sont récemment venus marquer ce pays. Avant de les évoquer, je voudrais vous rappeler que le ministère de l'Europe et des affaires étrangères avait organisé, dans le cadre des procédures de droit commun, les éventuelles demandes de retour exprimées par les ex-PCRL. Toutefois, du fait du retrait organisé par les États-Unis et les troupes de l'OTAN, ce ministère a mis en place un nouveau dispositif au profit des agents de droit local : 500 bénéficiaires ont d'ores et déjà été identifiés, parmi lesquels 400 ont déjà été rapatriés à ce jour ; une centaine d'autres devraient l'être d'ici à la fin de ce mois.
Je crois donc, monsieur le sénateur, que la France a su assumer ses responsabilités et exprimer sa solidarité vis-à-vis de ces personnes qui l'ont accompagnée durant toutes ces années d'engagement. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour la réplique.
M. Étienne Blanc. Madame la ministre, votre réponse à ces situations très particulières et spécifiques était extrêmement attendue.
Je voudrais tout de même attirer votre attention sur le fait que l'expérience antérieure démontre que, dans un certain nombre de cas, les visas ont été contestés ; il a fallu plaider devant des tribunaux administratifs français pour que certains de ces cas soient résolus.
Le sens de mon propos est celui-ci : sur de tels sujets, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda) permet exceptionnellement à des étrangers de séjourner sur le territoire français au titre des services rendus à la France. Il faut à mon sens nous montrer très ouverts et très conciliants quant à l'interprétation des textes.
Tout le monde pense à ce qui s'est passé pour les harkis : il y va de l'honneur de la France ! Il s'agit d'apporter satisfaction à des Afghans qui ont servi la France et à leurs familles, à ceux qui ont servi loyalement un pays qu'ils ne connaissaient même pas, et qui l'ont servi de manière constante. Les questions juridiques ne doivent pas constituer un frein ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, RDSE et SER. M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)
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