Question de Mme ARTIGALAS Viviane (Hautes-Pyrénées - SER) publiée le 10/06/2021

Question posée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Viviane Artigalas. Alors que le Président de la République souhaite consacrer sa dernière année de mandat à des réformes sociales, le calcul en temps réel des aides personnelles au logement (APL) est un ratage complet.

Cette réforme devait avantager ceux qui connaissent une chute subite de revenus. Elle devait surtout permettre à l'État d'économiser 750 millions d'euros. Les chiffres révélés hier confirment qu'elle a fait beaucoup de perdants, et de manière plus rapide que prévu. Et ceux qui en font les frais sont, en grande majorité, les jeunes.

Pour le seul mois de janvier, on compte 8,4 % d'allocataires en moins, et 41 % des allocataires ont vu baisser leur APL. Sans la réforme, leur aide n'aurait pas diminué, ou moins rapidement. Faut-il s'étonner de tels résultats, en l'absence d'une étude d'impact ?

Pour les jeunes, le calcul des APL tous les trois mois est très impactant : en raison d'un effet de rattrapage brutal, tous sont perdants. Et le dispositif mis en place par Action Logement n'a pas suffi, tant les besoins sont importants.

Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour vraiment compenser cette réforme ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)


Réponse du Ministère de la transition écologique publiée le 10/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/06/2021

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Madame la sénatrice Artigalas, le principe même de la réforme du calcul des APL en temps réel, c'est de rendre notre système de protection sociale plus juste.

Il s'agit de pouvoir verser rapidement une aide adaptée à la situation des bénéficiaires, mais aussi de moderniser et de simplifier les APL. Tout est calculé de façon automatique pour la grande majorité des allocataires, ce qui diminuera aussi le taux de non-recours, beaucoup trop important jusqu'à présent.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Bref, tout va bien ! (Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Barbara Pompili, ministre. À la suite du changement du mode de calcul au 1er janvier, une première actualisation trimestrielle des droits est intervenue en avril.

J'insiste, madame la sénatrice, sur le fait qu'il n'existe pas à ce stade de données consolidées sur les impacts de la réforme, y compris sur les droits versés en janvier. Les chiffres qui circulent actuellement dans la presse correspondent à des données provisoires et l'historique des années précédentes montre des évolutions sensibles entre données provisoires et données définitives. Le ministère du logement communiquera à ce sujet en juillet, une fois que les chiffres du mois de janvier seront stabilisés.

Concernant l'impact de la réforme, les jeunes actifs qui ont un travail verront en effet leur niveau d'APL diminuer plus rapidement qu'avec l'ancien système si leurs revenus salariés augmentent significativement. Mais ce sera l'inverse pour ceux dont les revenus diminuent, et c'est précisément le principe de la réforme.

Si les chiffres montrent véritablement une baisse des APL versées, cela signifiera surtout que les dispositifs de soutien que nous avons mis en place pendant la crise ont fonctionné. Je ne peux que le souhaiter.

Je rappelle par ailleurs que le niveau des APL est maintenu pour les étudiants, voire augmenté pour les étudiants salariés dont la prise en compte des revenus n'entraîne désormais plus de dégressivité des allocations. Les stagiaires et les alternants bénéficient également d'un système avantageux de prise en compte de leurs revenus.

Nous sommes particulièrement attentifs à la situation des jeunes. Nous avons fait le choix de modifier la formule de calcul des APL afin de mieux prendre en compte la situation spécifique de ceux qui sont en contrat de professionnalisation – cette évolution est effective depuis le mois dernier.

Je vous rappelle enfin que le Gouvernement déploie le dispositif « 1 jeune, 1 solution », sous l'égide de ma collègue Élisabeth Borne, afin d'aider chaque jeune à accéder à un emploi. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.

Mme Viviane Artigalas. Madame la ministre, contrairement à vos affirmations, les chiffres sont têtus : visiblement, ce que vous proposez ne suffit pas à répondre aux besoins.

Cela confirme que tout ce que le Gouvernement a entrepris en matière de logement n'aura fait qu'accroître les inégalités. La baisse des APL de 5 euros était déjà choquante. Trois ans plus tard, cette baisse est huit fois supérieure !

Elle a été couplée avec la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS), un dispositif dont la Cour des comptes a souligné les défaillances et qui a grandement fragilisé l'action des bailleurs sociaux, tant en matière de construction que de réhabilitation du parc existant.

La pandémie l'a montré, le logement est un sujet majeur. Pourtant, l'État persiste à se reposer entièrement sur des opérateurs comme Action Logement, tout en n'écartant pas la possibilité de ponctionner encore son budget, au risque de freiner ses actions.

Pour le Gouvernement, le logement n'est qu'une variable d'ajustement, une source d'économies. C'est bien la preuve de son désengagement en matière de progrès social. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et GEST. – Mme Valérie Létard applaudit également.)

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