Question de M. PLA Sebastien (Aude - SER) publiée le 13/05/2021

M. Sebastien Pla alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le fait que l'extension de l'étiquetage nutritionnel « nutri-score » aux produits carnés sous signes officiels d'origine et de qualité (SIQO) réserverait aux productions françaises des scores très défavorables, non sans répercussion sur leur image, leur valeur et leur dynamique commerciale.
Ainsi en est-il des produits de la gastronomie française tels que le « porc noir de Bigorre », le « bœuf fin gras du Mézenc » ou encore les charcuteries de Corse qui pourraient, par exemple, se voir attribuer des scores extrêmement mauvais alors que des produits ultra-transformés contenant de nombreux additifs chimiques pourraient, quant à eux, obtenir des notations plus favorables.
Pourtant, l'authenticité de ces productions et le renom de ces terroirs, consacrés par l'obtention d'une appellation d'origine protégée (AOP), et identifiés dans l'esprit des consommateurs ainsi que la dimension culturelle et patrimoniale des produits, ne sont plus à démontrer.
Il lui rappelle l'intérêt économique et social des filières d'appellation d'origine protégée pour leurs territoires respectifs qui sont susceptibles d'être, à leur tour, confrontés à de graves difficultés, notamment en zone de montagne, comme ce pourrait être le cas, dans le département de l'Aude, où sont produits, à la fois du lait de brebis pour les productions de Roquefort mais aussi de la viandes de race Gasconne, deux productions susceptibles d'être concernées.
Soulignant l'ancrage des modes de production comme un élément central du patrimoine immatériel des territoires et des savoir-faire des hommes, il lui indique que les pratiques traditionnelles de ces productions, généralement de petites tailles, et aujourd'hui encadrées et garanties par les cahiers des charges sous appellation d'origine contrôlée ou protégée, contribuent à façonner les paysages et à préserver l'environnement, assurant la transmission depuis des siècles d'un patrimoine naturel d'une grande valeur.
Dès lors et à juste titre, le président de la fédération des viandes d'appellation d'origine (FEVAO) indique que « ces dispositifs d'étiquetage alimentaire, défavorables aux produits traditionnels et sous démarche officielle exemplaire, sont une entorse à la culture alimentaire défendue par la France, à travers sa politique de qualité des produits. »
Il lui demande quelles initiatives il compte engager pour protéger nos savoir-faire traditionnels et la qualité de nos produits, sans quoi les consommateurs français risquent de se détourner de l'outil « nutri-score », tant ils demeurent attachés aux traditions culinaires régionales qui font de la France un haut lieu de la gastronomie. Il lui demande aussi s'il entend, dès lors, faire valoir, auprès de la Commission européenne, la spécificité de ces productions et demander l'exemption pour les produits traditionnels, sous signe de qualité et d'origine, de cet étiquetage nutritionnel inadapté à la réalité de leur consommation.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 23/09/2021

Le Nutri-score est le dispositif que les pouvoirs publics français ont choisi de recommander à l'issue d'une démarche scientifique, innovante, inclusive et fondée sur le dialogue avec les parties prenantes. Ce logo fournit au consommateur, sur la face visible des emballages alimentaires, une information lisible et facilement compréhensible sur la qualité nutritionnelle globale des produits, au moment où il fait ses courses. Il peut ainsi comparer les produits et orienter ses choix vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Fondée par l'arrêté du 31 octobre 2017, la démarche d'engagement en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Il n'y a donc pas à l'heure actuelle d'obligation d'apposer le logo sur les produits artisanaux. Le Nutri-score est largement déployé par les professionnels de l'alimentation et plébiscité par les français. En juillet 2020, 415 entreprises étaient engagées dans la démarche Nutri-score en France, dont les parts de marché représentent environ 50 % des volumes de vente. Désormais, ce sont près de 500 entreprises qui se sont engagées en faveur du logo. De même, près de 94 % des français ont déclaré être favorables à sa présence sur les emballages. Enfin, plus d'un français sur deux déclare avoir changé au moins une habitude d'achat grâce au Nutri-score. De nombreux travaux scientifiques ont permis de montrer que le Nutri-score était un outil efficace pour discriminer la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires, de manière cohérente avec les recommandations alimentaires, en France mais également dans de nombreux pays européens. Le Nutri-score et les signes de l'origine et de la qualité (SIQO) qui sont soumis à un cahier des charges répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une « garantie » pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l'environnement, d'origine et de terroir, quand le Nutri-score informe le consommateur sur la qualité nutritionnelle des produits transformés, et permet de comparer les produits entre eux. Concernant les aliments ultra-transformés, le programme national de l'alimentation et de la nutrition prévoit l'évaluation de l'impact de ces produits sur la santé. Cette évaluation pose des difficultés, d'une part, car il est difficile de disposer des compositions détaillées et des process de fabrication des produits et, d'autre part, car il n'existe pas de définition des aliments ultra-transformés en France et les définitions existantes sont sujettes à des interprétations différentes. Il n'est donc pas actuellement possible de définir ces produits, et donc de limiter le Nutri-Score à leur périmètre. Certains produits sous AOP ou IGP comme les fromages font déjà l'objet d'une adaptation dans le calcul du Nutri-score, pour prendre en compte leur teneur élevée en calcium. Si certains de ces produits comme les fromages ou la charcuterie sont classés pour la majorité en D et parfois en E, ceci s'explique par le fait qu'ils contiennent des quantités non négligeables de graisses saturées et de sel et sont également caloriques. Mais, comme tous les produits classés D ou E avec le Nutri-score, ces produits peuvent parfaitement être consommés dans le cadre d'une alimentation équilibrée. Ce message est d'ailleurs rappelé par santé publique France dans sa campagne de communication à destination du grand public depuis le 5 juillet 2021. Informer les consommateurs sur la réalité de la qualité nutritionnelle de ces aliments n'exclut pas de les consommer mais encourage à le faire en quantités et/ou aux fréquences conformes aux recommandations nutritionnelles du programme national nutrition santé (par exemple deux produits laitiers par jour pour les adultes, trois produits laitiers pour les enfants, moins de 150 grammes de charcuterie par semaine), ce qui est totalement en cohérence avec la signification de leur classement sur l'échelle du Nutri-score. Enfin, sept pays sont désormais engagés en faveur du Nutri-score : la France, le Belgique, l'Espagne, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Une gouvernance a été mise en place entre ces pays, comprenant notamment un comité scientifique. Ce comité, composé d'experts scientifiques indépendants, s'est réuni pour la première fois le 12 février 2021 et aura pour mission d'évaluer la pertinence scientifique des propositions d'évolution du mode de calcul du Nutri-score. Toute évolution ne pourra donc être envisagée que sous réserve de validation scientifique par ce comité. La Commission européenne prévoit, dans sa stratégie « de la ferme à l'assiette » publiée en mai 2020 une proposition législative d'étiquetage nutritionnel en face avant harmonisé et obligatoire pour le 4e trimestre 2022. Dans ce cadre, le Gouvernement souhaite que le Nutri-score soit le dispositif retenu. Enfin, consciente des spécificités liées aux produits sous SIQO, la France portera des propositions dans un cadre européen afin que l'algorithme du Nutri-score et les critères utilisés tiennent compte de ces spécificités.

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