Question de M. MONTAUGÉ Franck (Gers - SER) publiée le 06/05/2021

Question posée en séance publique le 05/05/2021

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Franck Montaugé. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à monsieur le Premier ministre, que je salue.

Des politiques dures pour les faibles et faibles pour les forts : votre réforme de l'assurance chômage, comme un marqueur politique de plus, montre que vous n'avez pas le souci des situations de vie problématiques que subissent au quotidien beaucoup trop de nos concitoyens.

Le chômage, ce n'est pas un concept théorique, c'est une réalité humaine dévastatrice que je connais personnellement, dans la chair de ma chair !

C'est un cancer sociétal, qui plonge des femmes et des hommes responsables, désireux de travailler, attachés, quoi qu'en disent honteusement certains, à leur contribution économique à la société française, en même temps qu'à leur autonomie de vie.

Je crois que vous ne savez pas ce que c'est moralement que de se retrouver proche de la fin de ses droits, quand on a de jeunes enfants et souvent une maison qu'il va falloir vendre, parce que le projet de vie vole en éclats à cause de la perte d'emploi !

Moi, comme des millions de Français, je le sais. Et votre politique n'en apparaît que plus injuste et violente, a fortiori dans cette période où les problèmes sociaux et sociétaux sont, hélas, déjà là, et devraient encore s'aggraver.

Faire payer aux plus faibles d'entre nous près de 1,5 milliard d'euros à un moment où, à bon droit, on inonde l'économie de centaines de milliards d'euros, il fallait oser, et vous l'avez fait !

Ma question est simple : comment envisagez-vous de traiter ce dossier à l'avantage des chômeurs, qui ne demandent qu'à retrouver au plus vite un travail utile, sensé, à la hauteur de leur qualification et au bénéfice de notre société ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)


Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion - Insertion publiée le 06/05/2021

Réponse apportée en séance publique le 05/05/2021

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'insertion.

Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, chargée de l'insertion. Monsieur le sénateur Franck Montaugé, la réforme de l'assurance chômage est l'aboutissement de six mois de concertation avec les partenaires sociaux. (Protestations sur des travées des groupes SER et CRCE.) Vous le savez, nous sommes nous aussi proches des territoires, de leurs habitants et de nos concitoyens.

Cette réforme est née d'un constat : le système actuel est injuste. Un demandeur d'emploi travaillant à mi-temps perçoit une allocation très inférieure à celle que toucherait un demandeur ayant travaillé une semaine sur deux pour le même salaire et le même nombre d'heures travaillées. Cela n'est pas satisfaisant.

Par ailleurs, le système est coûteux. L'alternance entre contrats courts et périodes de chômage coûte environ 3 milliards d'euros par an à l'assurance chômage.

Plus globalement, le régime est déficitaire depuis plus de dix ans, avec près de 40 milliards d'euros de dettes cumulées avant même la crise de la covid.

Le système actuel a enfermé de nombreux demandeurs d'emploi dans le chômage, et il a encouragé la précarité. J'en veux pour preuve un seul chiffre : le nombre de CDD de moins d'un mois a augmenté de 250 % en dix ans.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous avez tout fait pour !

Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée. Avec le bonus-malus, les entreprises seront désormais incitées à proposer davantage de CDI et à allonger la durée des CDD.

Mme Sophie Primas. Une vraie usine à gaz !

Mme Brigitte Klinkert, ministre déléguée. Face à la crise, nous avons adapté l'entrée en vigueur de la réforme.

Tout d'abord, nous avons prolongé la durée des allocations des demandeurs d'emploi en fin de droits : depuis la fin du mois d'octobre dernier, ce sont près de 700 000 personnes qui sont concernées, pour un coût total de 2,5 milliards d'euros.

Ensuite, nous avons décalé la réforme au 1er juillet, et son déploiement sera progressif. Je veux rassurer nos concitoyens : notre système d'assurance chômage restera très protecteur, puisque nous maintenons une durée longue d'indemnisation, un taux de remplacement relativement élevé et des conditions d'affiliation très ouvertes.

Enfin, le montant global d'indemnisation du demandeur d'emploi restera le même ; c'est la durée d'indemnisation qui est prolongée par la réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.

M. Franck Montaugé. Je vous remercie, madame la ministre.

Monsieur le Premier ministre, le « quoi qu'il en coûte » s'est iniquement et cyniquement transformé en un « quoi qu'il en coûte socialement ». (Mme Patricia Schillinger proteste.)

Quant à nous, nous le rejetons. Nous combattrons avec fermeté et avec sens de la justice cette politique de décohésion sociale, ainsi que toutes les autres politiques que vous vous obstinez à mener envers et contre tous. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)

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