Question de M. MOGA Jean-Pierre (Lot-et-Garonne - UC) publiée le 15/04/2021
M. Jean-Pierre Moga attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les éventuelles conséquences de la crise sanitaire sur les modalités du bail dérogatoire.
Le bail dérogatoire (article L. 145 5 du code de commerce) est en effet un contrat de courte durée de location de locaux utilisé pour l'exploitation d'un fonds de commerce ou artisanal. Dès lors, ce bail n'est pas soumis aux règles applicables aux baux commerciaux : la durée totale ne peut pas dépasser trois ans. Une requalification du bail dérogatoire (ou précaire) en bail commercial classique (article L. 145-4 du code de commerce) est opérée au bout d'un mois lorsque la durée du contrat dépasse trois ans, ou bien lorsque le locataire reste dans les lieux en accord avec le bailleur au terme du contrat.
Toutefois, en raison de la crise sanitaire depuis mars 2020, il souhaiterait savoir si des dispositions ont été prises concernant la durée desdits baux, ainsi que le versement des loyers, alors que, pendant cette même période où de nombreuses activités commerciales sont restées fermées, le bail peut arriver à échéance. Aussi, au regard de la durée de la crise, il souhaiterait savoir si une dérogation pourrait être envisagée pour tenir compte des conséquences des fermetures. Si l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période a permis de reporter intégralement ou d'étaler le paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels et commerciaux, elle reste muette sur la question des baux dérogatoires.
De son côté, si le tribunal de commerce de Paris (le 11 décembre 2020) ou encore le tribunal judiciaire de Paris (le 25 février 2021) ont tranché sur la question de l'exigibilité des loyers commerciaux pendant les périodes de fermetures imposées par la pandémie, aucune mention n'est faite de la durée ou d'une éventuelle prorogation des baux dérogatoires.
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 27/01/2022
La mesure de protection des entreprises mise en place par l'ordonnance 2020-316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie de Covid-19 et reprise à l'article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ne vise pas uniquement les baux commerciaux, mais également les loyers des locaux professionnels et commerciaux. Aucune disposition particulière n'a été prise concernant la durée des baux, et les baux dérogatoires se voient appliquer les aménagements exceptionnels qui ont été apportés à l'application des clauses contractuelles en général. Aux termes de l'article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, les propriétaires ne peuvent faire courir contre les entreprises titulaires d'un bail commercial des intérêts, pénalités ou toute mesure financière ainsi que toute action, sanction ou voie d'exécution forcé, ou encore mesures conservatoires, en raison du retard ou défaut de paiement des loyers ou charges locatives afférents à leurs locaux professionnels ou commerciaux, dès lors qu'elles ont moins de 250 salariés, un chiffre d'affaires (CA) inférieur à 50 M et ont subi une perte de CA de plus de 50 % au titre du mois de novembre 2020. Cependant, afin de préserver l'intérêt des bailleurs, ce texte ne prévoit ni suspension, ni réduction, ni abandon de loyer, et les propriétaires retrouveront tous leurs droits à l'issue de la crise sanitaire, y compris sur les loyers qui ont été dus pendant la période de protection des entreprises et qui n'auraient pas été acquittés. Les bailleurs et locataires sont invités à s'entendre sur des modalités de paiement des loyers, en fonction des contraintes de chacune des parties. Les bailleurs qui ont abandonné des loyers au profit d'entreprises locataires répondant à certaines conditions (effectif de moins de 5 000 salariés) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt. Pour les bailleurs d'entreprises de moins de 250 salariés renonçant aux loyers du mois de novembre 2020, le crédit d'impôt est de 50 % des sommes abandonnées. Les bailleurs sont éligibles au crédit d'impôt pour des abandons de loyers consentis jusqu'au 31 décembre 2021. Ainsi, un bailleur qui abandonne un loyer afférent au mois de novembre 2020 après le 31 décembre 2020 sera éligible au crédit d'impôt dès lors qu'il consent cet abandon au plus tard le 31 décembre 2021. Le bénéfice du crédit d'impôt devra être demandé dans le cadre de la déclaration d'impôt sur le revenu ou les sociétés suivante. Pour faciliter la mise en place d'accords entre les parties, il est proposé aux bailleurs et aux locataires de recourir à des modes amiables de règlement des différends : soit la commission départementale de conciliation des baux commerciaux, soit le médiateur des entreprises. Par ailleurs, des aides financières ont été mises en place dans le cadre d'une relation partenariale État et collectivités territoriales pour soutenir le commerce de proximité durement frappé par les conséquences économiques de la crise sanitaire. Enfin, les commerçants peuvent demander à bénéficier du fonds de solidarité, des exonérations ou report des charges sociales, d'aménagement du recouvrement des loyers de leur bail commercial, de la prise en charge des coûts fixes, etc.
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