Question de M. CARDON Rémi (Somme - SER) publiée le 18/03/2021
M. Rémi Cardon attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur le fonctionnement de la société Apple comme distributeur unique d'applications sur ses terminaux et le marché mobile iOS.
En octobre 2020, après seize mois d'enquêtes et un rapport de plus de 400 pages, le sous-comité antitrust de la Chambre des représentants américaine a précisément décrit le monopole d'Apple sur le marché des applications iOS. Selon les parlementaires américains, la société empêche notamment l'émergence d'une quelconque concurrence grâce à la double maîtrise de son système d'exploitation iOS et de son magasin App Store.
Ce faisant, la mécanique de la règle édictée par le constructeur sur les achats intégrés, et notamment la fameuse commission de 30 % prélevée sur le prix des applications et également sur les services par abonnement, constituait dès sa conception une distorsion de concurrence.
Apple impose également à tous l'utilisation de son système de paiement IAP (in app payment) et a fait du « Sherlocking » (pratique qui consiste à copier des applications innovantes à son propre bénéfice en intégrant celles-ci comme un nouveau service gratuit de l'IOS) une pratique assumée de son développement économique au détriment de la concurrence.
En France comme à l'étranger, Apple cristallise de nombreuses controverses. À commencer bien sûr par l'évasion fiscale qui, malgré de lourdes condamnations, ne semble pas pour autant faire infléchir l'entreprise, qui a décidé de répercuter la taxe GAFA sur ses prestataires en leur interdisant de la répercuter sur les consommateurs.
Plusieurs procédures judiciaires sont en cours : auprès de l'autorité de la concurrence en France : en octobre 2020 une plainte pour abus de position dominante a été déposée suite à la volonté d'Apple de supprimer les identifiants ne permettant plus aux annonceurs de réaliser des publicités ciblées. Cette mesure reviendrait de facto à donner à l'entreprise un monopole publicitaire sur ses smartphones ; auprès de la Commission européenne : l'entreprise Epic Games demande à Bruxelles « de remédier au comportement anticoncurrentiel d'Apple en imposant des mesures correctives rapides et efficaces » ; auprès de la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) : France digitale vient officiellement de déposer plainte devant la CNIL contre Apple pour non-conformité au règlement général de la protection des données (RGPD) s'agissant du recueillement du consentement des utilisateurs.
Il souhaiterait avoir connaissance des mesures que compte engager le Gouvernement pour réguler les comportements monopolistiques de la firme Apple.
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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 02/09/2021
Pour ce qui concerne le sujet de la publicité ciblée et du groupe Apple, l'Autorité de la concurrence a commencé un examen des mesures rappelées par le député. Si elle a pu considérer que des mesures d'urgence n'étaient pas justifiées au regard des principes de nécessité et de proportionnalité, relevant en particulier que, du point de vue de l'utilisateur, les mesures prises par Apple pourraient faciliter la maîtrise de l'utilisation de ses données personnelles, et donc contribuer à une meilleure protection des données privées, l'Autorité de la concurrence poursuit néanmoins son instruction au fond ; elle sera notamment attentive au point de savoir si Apple applique des règles plus contraignantes aux opérateurs tiers que celles qu'elle s'applique à elle-même. Au-delà de ce cas particulier, le ministre de l'économie, des finances et de la relance est très attentif aux pratiques des GAFA et veille à promouvoir un nouveau modèle de régulation économique des acteurs du numérique. A ce titre, le Gouvernement français, avec notamment l'Allemagne, a poussé les initiatives de la Commission européenne et soutient ainsi la proposition de « Digital Markets Act » : cette initiative consiste à garantir que les marchés numériques restent innovants et ouverts à la concurrence d'une part, et que les relations commerciales au sein de ces plateformes et des marchés qu'elles contrôlent soient équilibrées et équitables d'autre part. Elle cible en particulier les plateformes en ligne les plus puissantes et embrasse l'ensemble de leurs services. Le dispositif comprendra un ensemble d'outils, sur la base d'une liste d'obligations et de pratiques interdites, permettant aux pouvoirs publics d'apporter rapidement une réponse adaptée au comportement de ces acteurs économiques ; des sanctions dissuasives (jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires annuel mondial, avec la possibilité de recourir à des astreintes) et des mesures d'urgence seront également prévues.
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